Les Living Labs, une perspective territoriale
Auteur / Autrice : | Quentin Marron |
Direction : | Bernard Pecqueur |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences du territoire |
Date : | Soutenance le 31/05/2022 |
Etablissement(s) : | Université Grenoble Alpes |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale sciences de l'homme, du politique et du territoire (Grenoble ; 2001-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Pacte, laboratoire de sciences sociales (Grenoble, Isère, France) |
Jury : | Président / Présidente : Magali Talandier |
Examinateurs / Examinatrices : Christine Liefooghe | |
Rapporteur / Rapporteuse : Gabriel Colletis, Danielle Lafontaine |
Mots clés
Résumé
Cette thèse part du constat d’une crise des politiques publiques et au-delà du système actuel de démocratie représentative, dont le marqueur le plus visible est celui de l’abstention croissante. Si le niveau local était pendant plusieurs décennies relativement protégé, il ne l’est plus. Les citoyens ont le sentiment d’être mis à distance, mesurant mal les enjeux, les compétences et les acteurs en place. Surtout, ils estiment que les pouvoirs publics ne répondent que partiellement aux difficultés qu’ils rencontrent. Alors, en écho, il émerge partout des initiatives novatrices dans lesquelles les parties prenantes se prennent en main, afin de résoudre directement les problèmes qui les incombent. Parmi la foisonnance d’entités existantes notre choix s’est porté sur les Living Labs. Initialement issus du milieu universitaire et du monde privé ils vont progressivement s’étendre aux politiques publiques, notamment à l’échelle locale. Des collectivités vont s’en saisir, voyant une opportunité intéressante pour constituer des formes d’action collective et impliquer les citoyens dans la gestion locale. Une des particularités réside dans l’implication des usagers. En les positionnant comme co-constructeurs, ils remettent en cause le principe d’une linéarité descendante. L’acteur public ne conçoit plus seul, il se doit de composer avec les usagers. Cela induit un partage de sa posture de décideur et une remise en cause de sa propre organisation. En ce sens, les Living Labs recèlent une dimension démocratique fondamentale. En allant plus loin, ils peuvent être considérés comme une réponse à la crise de l’action publique locale, en changeant les manières de la concevoir et de la conduire. Au point de participer à leur transformation, possiblement. En tout cas, la thèse s’attache à qualifier leur caractère éventuellement nouveau, différencié et transformateur. Précisons, qu’à la différence d’une majorité de dispositifs, ceux que nous étudions, ont la particularité de contenir une forte vocation territoriale. Ils revendiquent clairement un ancrage géographique et la prise en considération de spécificités. Nous les nommons les Living Lab territoriaux. Face à un objet de recherche relativement nouveau et mouvant, l’enjeu est de déployer un bagage théorique composite recourant à d’autres disciplines telles que la sociologique et la science politique. L’enquête de terrain impose d’articuler des temporalités, méthodes et espaces différents. Dans un premier temps nous établissons une comparaison nationale avant de nous concentrer sur trois dispositifs : le Lab’01, Brie’Nov et Autonom’lab. Le protocole méthodologique repose sur l’analyse de documents et la réalisation d’entretiens. La thèse montre que la réponse apportée par les LLT à la crise de l’action publique locale est relative, tout comme leur caractère transformateur. Leur capacité à changer les manières de faire reste marginale. En étant utilisé de manière intermittente, ils ne donnent pas lieu à une densification organisationnelle. Le manque de durabilité des initiatives limite la capacité à se diffuser et à avoir des effets de contagion. En outre, ils sont dans l’incapacité de changer d’échelle, en dépassant le niveau local, pour agir de manière structurelle. Les normes organisationnelles et institutionnelles dominantes ne sont que peu modifiées. Ils ne sont donc pas doté d’une vision de transformation profonde à même de pénétrer et d’influer durablement le système dominant conventionnel. Leur inaptitude à endosser un tel renouveau ne doit, néanmoins, pas occulter leur contribution et leur potentiel. Ce sont des dispositifs encore « discrets », à tel point que l’on peut parler de « transformations silencieuses» et de « changements graduels transformateurs », notamment en matière de démocratie locale et d’imprégnation de nouveaux principes (expérimentation, droit à l’échec, culture de la co-construction) auprès des institutions publiques.