Un égalitarisme radical enté sur une philosophie matérialiste : la théorie juridique de Joseph Rey (1779-1855)
Auteur / Autrice : | Mathilde Regad-Pelagru |
Direction : | Jérôme Ferrand |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Histoire du droit |
Date : | Soutenance le 28/06/2022 |
Etablissement(s) : | Université Grenoble Alpes |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale sciences juridiques (Grenoble, Isère, France ; 2003-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre d'études et de recherche sur la diplomatie, l'administration publique et le politique (Grenoble) |
Jury : | Président / Présidente : Jean-Louis Halpérin |
Examinateurs / Examinatrices : Claire Courtecuisse, Amélie Imbert | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Nader Hakim, Ludovic Frobert |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Mots clés libres
Résumé
La Révolution de 1789 a engendré des bouleversements sans précédent dans l'histoire sociale, politique et juridique de la France. L'affirmation du principe d'égalité et la mise en place du régime représentatif ont produit des changements radicaux qui, dans une large mesure, se sont concrétisés dans la législation française. Les juristes du premier XIXe siècle se trouvent ainsi confrontés à un droit nouveau qui suscite de nouvelles interrogations. Pourtant, si la rupture avec l'Ancien Régime est indéniable, la doctrine juridique semble avant tout chercher à canaliser les idéaux démocratiques et égalitaires qui furent ceux des Lumières et de la Révolution. Presque unanimement acquis au libéralisme et à l'individualisme qui s'épanouissent alors, la plupart des juristes se montrent méfiants envers les revendications égalitaires. Ils s'attachent alors à les discréditer en produisant une critique qui se veut avant tout d'ordre philosophique, mais qui doit aussi beaucoup à leurs partis pris politiques. Sous l'influence de l'éclectisme spiritualiste de Victor Cousin, ils s'opposent ainsi à tous les discours qu'ils identifient comme matérialistes et qu'ils jugent coupables des « excès » révolutionnaires.Un tel contexte confère un statut d'autant plus exceptionnel à la pensée de Joseph Rey (1779-1855) qu'il revendique tout à la fois l'héritage des matérialistes du XVIIIe siècle, de Rousseau et de la Révolution française. Magistrat, avocat et théoricien du droit, Rey est peut-être le seul juriste à avoir entrepris de lutter de manière philosophique contre l'individualisme libéral auquel la doctrine juridique et les philosophes spiritualistes prêtaient leurs armes. À partir d'un socle fondamentalement matérialiste, hédoniste et utilitariste, il formule une proposition juridique essentiellement politique : réaliser l'égalité par le droit.Ses positionnements jugés trop radicaux et subversifs conduisent ses homologues juristes à le reléguer aux marges des professions judiciaires et de la doctrine juridique. Malgré les efforts qu'il fournit pour rendre son propos audible en l'adaptant à la nouvelle configuration politique et intellectuelle post-révolutionnaire, sa théorie juridique demeure, aujourd'hui encore, largement méconnue. Joseph Rey a pourtant produit une œuvre théorique aussi originale que conséquente. L'objet de cette thèse est de mettre en lumière la façon dont Rey élabore son discours sur le droit, en portant un intérêt soutenu à ses soubassements philosophiques et au contexte très singulier du premier XIXe siècle.