De la Défiance à l'Ecologisation : des pratiques alimentaires pour résister
Auteur / Autrice : | Emmanuelle Lefranc Petit |
Direction : | Jocelyn Raude |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Santé et Sciences sociales |
Date : | Soutenance le 24/11/2022 |
Etablissement(s) : | Paris, EHESS |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales |
Jury : | Président / Présidente : Valeria Siniscalchi |
Examinateurs / Examinatrices : Valeria Siniscalchi, Jean Foyer, Nicolas Bricas, Nicoletta Diasio, Bernard Hubert | |
Rapporteur / Rapporteuse : Jean Foyer, Jean-Pierre Poulain |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Mots clés libres
Résumé
Cette recherche a pour origine un questionnement sur les conflits observés entre de personnes choisissant de modifier leur alimentation ou celle de leurs enfants en évitant certains produits pourtant au cœur de la culture alimentaire française (lait, pain) et des médecins considérant ces pratiques comme dangereuses. Quel sens donner à l’engagement des individus dans ces conversions alimentaires marquées par une redéfinition du comestible ? Comment comprendre leurs motivations notamment en situation de conflit ? La méthode est basée sur une approche mixte associant des observations participantes, des entretiens avec des pratiquants de ces explorations alimentaires, une observation des effets de ces pratiques sur différents secteurs (marché alimentaire, nutrition médicale, industrie agro-alimentaire) et une enquête quantitative qui permet d’estimer et de situer ces pratiques au sein de la population française. Loin d’être une pratique irrationnelle ou ignorante des recommandations de santé officielles, l’éviction de certains aliments témoigne d’un mal-être sociétal. Celui-ci est empreint d’une défiance à l’égard des cadres et institutions politiques et socioéconomiques. Ces pratiques alimentaires d’évictions procèdent d’un besoin de se soigner de la société. La résistance au système dénoncé passe par une vigilance concernant les incorporations alimentaires. Le comestible est redéfini selon des critères de vitalité et de naturel qui s’imposent à l’individu. Ces valeurs non questionnées deviennent un guide pour l’action se substituant à la culture alimentaire communément partagée. Nous avons abordé leur engagement comme une croyance mais de manière pragmatique, c’est-à-dire en portant avant tout attention à ce qu’elle fait faire aux enquêtés. Le rapport à la science n’échappe pas à cette dialectique défiance/croyance et l’enquête explore la proposition d’un autre rapport à la scientificité dans lequel sont valorisés le ressenti et l’intuition comme sources de savoirs. L’émergence des recherches sur les microbiotes, dans lesquels dominent les notions d’interdépendances et d’écosystème, coïncide avec ces propositions profanes qui questionnent les représentations des frontières du soi et du hors-soi. Enfin, sous l'égide d'un mouvement d'écologisation de la nutrition marquée par l’actuel questionnement sur la durabilité alimentaire la convergence d'acteurs aux approches heuristiques opposées (holisme vs réductionnisme) est mise en évidence.