Thèse soutenue

Anthropologie de la colère et des contestations en Côte d’Ivoire : étude des manifestations exacerbées, des violences et des troubles suscités par la divulgation de la notion d’ivoirité

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Auteur / Autrice : Zacharia Bandaogo
Direction : Rémy Bazenguissa
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sociologie
Date : Soutenance le 28/11/2022
Etablissement(s) : Paris, EHESS
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales
Jury : Président / Présidente : Richard Banégas
Examinateurs / Examinatrices : Richard Banégas, Francis Akindès, Marie Miran-Guyon, Dakouri Gadou
Rapporteurs / Rapporteuses : Richard Banégas, Francis Akindès

Résumé

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L’étude vise à méditer sur les métamorphoses de la colère, de la traduire et de décrypter ses aptitudes guerrières. Pour cela, elle focalise l’attention sur une notion : l’ivoirité. Cette notion conduit à poser la problématique d’une « Anthropologie de la colère » pour mieux expliquer les manifestations exacerbées, les troubles et les violences qui ont émaillé la vie politique ivoirienne. Bien qu’elle prend en compte une sociologie politique et une anthropologie classique, l’ « Anthropologie de la colère et des contestations » est dirigée beaucoup plus dans une perspective de sociologie historique. Elle explore le mythe et l’idéologie. L’approche du mythe « Djaa » et l’idéologie « l’houphouëtisme » entrent dans le processus de l’explication de la fabrication de l’État-nation.Une génération - « Génération Zouglou » - est l’objet d’une analyse sous la gouvernance du président bédié. Cette notion ne se rapporte pas directement aux mélomanes du Zouglou mais démontre les rapports de force entre l’État et une jeunesse estudiantine sensible aux mots d’ordres des opposants au régime. Ces étudiants qui font trembler les pouvoirs se plaignent des gouvernants qui oublient leur cause. La FESCI qui naît sous les cendres de l’ancien MEECI mène un combat avec le gouvernement. Le pouvoir tente de créer une fissure dans le mouvement en créant d’autres organisations plus aptes à la discussion. Les organisations estudiantines sont souvent de connivence avec les partis politiques. Le phénomène n’est pas propre à la Côte d’Ivoire. Au Burkina, au Cameroun, au Gabon, au Congo, en RCA, au Sénégal, les étudiants protestent conspuent leurs dirigeants. Les étapes qui conduisent aux élections préparées par la junte qui renverse le régime d’Henri Konan Bédié montrent l’enchevêtrement des faits entre Etat, pouvoir et mouvements estudiantins. Sur scène, les militaires ne veulent pas faire piètre figure. Ils jouent dans la séduction et rassurent sur les paroles du général « arbitrer des élections libres et transparentes ». Parce que l’ivoirité divise le peuple, les militaires lui demandent de se prononcer par référendum sur un article litigieux de la constitution. Faut-il avoir pour père et mère un Ivoirien pour être candidat à la magistrature suprême ou l’un des deux ? Un conflit latent décrypté à travers des termes propres au parler ivoirien populaire, le Nouchi .A travers ce que les Ivoiriens appellent « Gbangban » - guerre- apparaît l’explication de ce terme mais aussi la démonstration des passions culturelles dans une situation socio-politique trouble. Véritable politique spectacle, la volonté du désarmement ne convainc pas d’où des déceptions et des critiques à l’encontre des acteurs. L’étude s’intéresse en dernier ressort à la lutte qui oppose les deux principaux acteurs que sont Alassane Dramane Ouattara et Laurent Gbagbo dans des élections supervisées par la communauté internationale. La victoire de l’un, Alassane Dramane Ouattara, fait de l’autre Laurent Gbagbo, le vaincu traduit plus tard à la CPI (Cour pénale internationale)À la veille du 58ème anniversaire de l’indépendance nationale, Alassane Dramane Ouattara amnistie 800 prisonniers dont l’ex-Première dame Simone Ehivet Gbagbo. Une stratégie politique que se permet le Prince pour apaiser les tensions politiques avant les présidentielles de 2020. Pourraient-elles se traduire par une résurgence des violences que l’acteur fait vite de dissiper ce spectre. L’alliance politique qui a mené en 2010 et 2015 le RDR au pouvoir n’est plus. Par deux fois, le PDCI-RDA a soutenu Alassane Dramane Ouattara pour en faire le candidat unique du RHDP. À travers la notion d’ivoirité et les expressions agonistiques qui lui sont arrimées, le pari a été de montrer la complexité, les multiples formes et réalités sociales du pouvoir politique dans la société ivoirienne.