Thèse soutenue

Trois essais sur les inégalités de genre sur le marché du travail

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Auteur / Autrice : Caroline Coly
Direction : Éric Maurin
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Analyse et politiques économiques
Date : Soutenance le 03/11/2022
Etablissement(s) : Paris, EHESS
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale d'Économie (Paris ; 2004-....)
Jury : Président / Présidente : Anne Solaz
Examinateurs / Examinatrices : Anne Solaz, Laura Hospido, Ghazala Azmat
Rapporteurs / Rapporteuses : Laura Hospido, Antoine Rebérioux

Résumé

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Cette thèse explore différents aspects des inégalités de genre sur le marché du travail. Le premier chapitre examine l'effet de la décentralisation de la négociation sur les inégalités de genre au niveau de l'entreprise. Ces inégalités pouvant se manifester par de nombreux canaux différents, obliger les entreprises à mesurer les inégalités femmes-hommes et à développer leurs propres solutions pourrait donc être un moyen efficace de les réduire. Dans ce chapitre, j'estime l'impact causal d'une loi adoptée en 2010 en France qui oblige certaines entreprises à négocier sur les inégalités de genre avec les délégués syndicaux. En utilisant des données administratives et la signature échelonnée des accords, j'estime l'effet de la signature d'un accord sur un large éventail de mesures d'inégalités de genre grâce à une approche de différence dans les différences. Je constate que la signature d'un accord ne réduit pas les écart salariaux et ne modifie pas la probabilité d'être promue ou la part des femmes parmi les plus hauts revenus. Ces résultats s’expliquent par le fait que : (i) la loi n’imposant pas des résultats, les entreprises ont ainsi souvent négocié des accords dépourvus de toute mesure contraignante ; (ii) les employeurs n’ont pas toujours fourni des mesures d'inégalité sexuées aux délégués syndicaux ; (iii) ces délégués considèrent souvent l'égalité entre les sexes comme une question de second rang et non comme une priorité. Le deuxième chapitre, co-écrit avec Cyprien Batut et Sarah Schneider-Strawczynski, analyse l'impact de #MeToo sur le marché du travail français. Le harcèlement sexuel ou les attitudes sexistes sont des problèmes omniprésents sur le lieu de travail pouvant avoir un impact sur la carrière des femmes. Ce chapitre utilise le mouvement #MeToo comme un choc exogène sur les normes concernant ces comportements au travail. Nous combinons des données d'enquête sur les comportements toxiques déclarés dans les entreprises avec des données administratives exhaustives pour créer une mesure du risque de comportements toxiques pour tous les établissements français. Nous utilisons une stratégie de triple différence en comparant les flux de travailleurs féminins et masculins dans les entreprises à haut et à faible risque avant et après #MeToo. Nous trouvons que #MeToo a augmenté les taux de sortie des femmes dans les lieux de travail à haut risque, tandis que les flux de travailleurs masculins n'ont pas été affectés. En particulier, les femmes sont plus susceptibles de quitter leur emploi et de rejoindre des entreprises payant 2% de moins en moyenne. #MeToo ne semble donc pas avoir amélioré de manière significative la responsabilisation des entreprises ou des hommes harceleurs, mais a permis de sensibiliser et de sortir les femmes de situations toxiques où elles seraient restées plus longtemps en l’absence du mouvement. Le troisième chapitre, joint avec Paolo Santini, cherche à comprendre comment les syndicats américains ont performé en termes d'égalité de genre depuis les années 1960 car ceux-ci jouent un rôle clé dans la promotion de l'égalité des travailleurs. Nous utilisons un nouvel ensemble de données sur la composition des travailleurs des syndicats américains entre 1959 et 2016 pour analyser l'évolution de ces inégalités au sein de ces organisations. Nous trouvons que la part des femmes parmi les travailleurs des syndicats a augmenté rapidement dans les années 1970, à mesure que la participation des femmes au marché du travail augmentait. En 2016, environ 25% des cadres supérieurs syndicaux étaient des femmes, soit près de 4 fois la valeur dans les sociétés cotées. En outre, les écarts salariaux ont diminué et sont maintenant très proche de zéro, même au plus haut niveau. Nous trouvons de grandes hétérogénéités par vague de syndicalisation, suggérant qu'en fonction de leur culture, certains syndicats ont été des précurseurs tandis que d'autres ont été à la traîne en termes d'égalité des sexes.