Thèse soutenue

Essais sur la taxation et mobilité internationale des travailleurs en Europe

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Auteur / Autrice : Mathilde Munoz
Direction : Thomas Piketty
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Analyse et politiques économiques
Date : Soutenance le 21/06/2022
Etablissement(s) : Paris, EHESS
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale d'Économie (Paris ; 2004-....)
Jury : Président / Présidente : Cécile Gaubert
Examinateurs / Examinatrices : Cécile Gaubert, Emmanuel Saez, Antoine Bozio, Thierry Mayer
Rapporteurs / Rapporteuses : Emmanuel Saez, James M. Poterba

Mots clés

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Résumé

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Cette thèse est une collection de quatre essais qui analysent les implications de la mobilité internationale des travailleurs pour la redistribution et le bien-être, en utilisant l'Union européenne comme laboratoire. Le premier chapitre analyse les effets redistributifs des politiques de détachement, introduites pour la première fois dans l'Union européenne. Je combine de nouvelles données administratives sur les missions de détachement en Europe, des variations quasi-expérimentales de la politique et un modèle de commerce de services, pour évaluer les implications redistributives de l'exposition de nouveaux emplois à la concurrence internationale. Je montre que la libéralisation progressive du détachement dans les pays à bas salaires a augmenté de manière permanente le commerce des services en Europe. Dans les pays d'accueil, l'emploi domestique dans les secteurs et départements exposés a diminué après la libéralisation du détachement, alors que l'ouverture du détachement a déclenché d'importants gains économiques dans les pays d'origine à bas salaires. En calibrant un modèle d'échange de services, je quantifie finalement que la libéralisation a augmenté le bien-être des consommateurs européens de 0,3 % en moyenne. Dans le deuxième chapitre, j'étudie un nouveau canal par lequel les différentiels fiscaux affectent la mobilité internationale des travailleurs dans un monde globalisé. En utilisant l'Europe comme laboratoire, je montre que les règles de fiscalité du travail fixées dans les traités commerciaux affectent la mobilité internationale des travailleurs par le biais des échanges de services. Un modèle de fiscalité et de services transfrontaliers commence par éclairer le rôle de la politique fiscale dans l'allocation spatiale des travailleurs et des services. Je valide ces prédictions théoriques en utilisant la mise en œuvre de régimes fiscaux préférentiels pour les travailleurs étrangers dans les pays d'accueil et d'origine, et un modèle de gravité. L'élasticité des flux de détachement aux différentiels de taxes est proche de l'unité. À l'aide de ces estimations, je quantifie qu'appliquer la coopération fiscale dans les traités commerciaux européens actuels réduirait les flux de migration commerciale au sein de l'UE d'environ 30 % et affecterait principalement les exportations de services des pays à faible coût. Le troisième chapitre étudie les effets des taux d'imposition supérieurs sur la migration des hauts revenus, en utilisant un nouvel ensemble de données individuelles sur la mobilité représentative de l'ensemble de la population de 21 pays européens. Je trouve que les choix de localisation des plus riches sont significativement affectés par les taux d'imposition supérieurs. L'élasticité du nombre de contribuables aisés par rapport au taux net d'imposition est comprise entre 0,1 et 0,3 ; c'est autour de un pour les étrangers. Les élasticités migratoires varient considérablement d'un État membre à l'autre, entraînant des incitations différentes à mettre en œuvre des politiques du moins disant fiscal au sein de l'Europe. Le quatrième chapitre quantifie les effets sur le bien-être de la concurrence fiscale dans une union où les individus peuvent répondre à la fiscalité par la migration. Je dérive les barèmes optimaux d'impôts et de transferts dans une union de libre mobilité composée de pays symétriques. Je montre comment, dans l'union de la concurrence, les réponses de mobilité à la fiscalité affectent la capacité de redistribution des gouvernements. La calibration de ces formules montre que même lorsque les élasticités migratoires sont faibles et bien inférieures à 1, les 50% les plus pauvres sont toujours perdants face à la concurrence fiscale. Mes résultats montrent qu'être dans une union de la concurrence plutôt que dans une union fédérale avec un taux d'imposition uniforme pourrait diminuer le bien-être des individus les plus pauvres jusqu'à -20 %.