Thèse soutenue

Naissance de la pensée symbolique chez l’Homme : Étude des bases neurales de la perception des gravures paléolithiques abstraites et des visages culturalisés en neuroimagerie fonctionnelle.

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Auteur / Autrice : Mathilde Salagnon
Direction : Emmanuel Mellet
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Neurosciences
Date : Soutenance le 29/09/2022
Etablissement(s) : Bordeaux
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de la vie et de la santé (Bordeaux)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut des Maladies Neurodégénératives
Jury : Président / Présidente : Sylvie Chokron
Examinateurs / Examinatrices : Sylvie Chokron, Carole Peyrin, Antoine Balzeau, Yann Heuzé
Rapporteurs / Rapporteuses : Carole Peyrin, Antoine Balzeau

Résumé

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Les découvertes archéologiques décrivant les premières gravures paléolithiques abstraites et l’ornementation du corps, à travers les objets de parure et l’utilisation de pigments, suggèrent que l’utilisation de signes et/ou de symboles n’est pas circonscrite à Homo sapiens mais pourrait concerner des Hominines beaucoup plus anciens. Nous plaçant dans une perspective neuroarchélologique, nos études visent à inférer les bases neurales nécessaires à l’apparition de ces premiers comportements attestant d’une pensée symbolique. Nous avons utilisé l’Imagerie par Résonance Magnétique fonctionnelle (IRMf), qui permet d’enregistrer l’activité cérébrale de participants, lorsque nous leur présentions des stimuli issus d’innovations culturelles potentiellement symboliques. Il s’agissait de versions schématiques et de photographies des premières gravures paléolithiques, puis de visages culturellement ornementés avec des perles en bois et des traits de peinture rouge, inspirés d’ornementations préhistoriques.Les résultats de la première étude montrent que la perception visuelle des premières gravures paléolithiques abstraites mobilise des aires cérébrales visuelles associatives, situées dans la partie antérieure de la voie occipito-temporale. Ces régions, impliquées dans la reconnaissance et l’identification de percepts visuels, indiquent que les premières gravures paléolithiques abstraites sont perçues comme des stimuli auquel on peut attribuer une signification. A cet égard, cette observation est compatible avec l’hypothèse proposant que ces premières gravures auraient pu constituer des signes voire des symboles.Dans une deuxième étude, afin de mimer les effets de familiarité des gravures que nos ancêtres possédaient sans doute, nous avons comparé les réponses cérébrales d’experts archéologues et de participants novices dans une tâche de discrimination de gravures intentionnellement produites par des Hominines et de marques issues de processus naturels. Les résultats montrent un effet de familiarité avec ce type de matériel. En effet, lorsque des archéologues avaient à catégoriser les motifs, ils mobilisaient davantage la partie ventrale du cortex occipital latéral, ainsi que le thalamus médiodorsal. Ces activations refléteraient l’analyse fine perceptive réalisée, en lien avec des connaissances stockées à long terme. Par ailleurs, la catégorisation des motifs abstraits en fonction de leur origine humaine ou naturelle a révélé l’engagement des structures sous-corticales comme la tête du noyau caudé et le thalamus, et de régions corticales dont l’insula antérieure et ce, quel que soit le niveau d’expertise des participants. Ces régions appartiennent au réseau de la saillance, qui joue un rôle dans la détection d’éléments pertinents de l’environnement pour effectuer la tâche.Enfin, la troisième étude montre que l’attribution d’un statut social à partir de visages culturalisés mobilise des régions visuelles de la voie occipito-temporale manifestent le traitement approfondi d’informations visuelles, jusqu’au pôle temporal dont il a été suggéré un rôle d’association entre la perception de visages et l’identité d’informations à propos d’une personne, des régions impliquées dans la détection d’éléments saillants de l’environnement et des régions frontales appartenant au « cerveau social ».Le travail de ma thèse suggère qu’au Paléolithique et Stone Age, les bases neurales étaient déjà fonctionnelles pour sélectionner les éléments pertinents de l’environnement afin de reconnaitre des productions intentionnelles d’autrui, puis d’être capable d’y attacher une signification, probablement culturellement déterminée, ceci dans le contexte d’une organisation sociale toujours plus complexe.