Deux décennies d’invention académique en France : ampleur et forces d'impulsion
Auteur / Autrice : | Elodie Carpentier |
Direction : | Nicolas Carayol, Pascale Roux |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences économiques |
Date : | Soutenance le 31/03/2022 |
Etablissement(s) : | Bordeaux |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Entreprise, économie, société (Talence, Gironde ; 1991-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Bordeaux sciences économiques |
Jury : | Président / Présidente : John P. Walsh |
Examinateurs / Examinatrices : Nicolas Carayol, Pascale Roux, John P. Walsh, Dirk Czarnitzki, Cornélia Lawson | |
Rapporteur / Rapporteuse : Dirk Czarnitzki |
Mots clés
Résumé
Depuis Bush, (1945), les gouvernements des économies avancées ont pris conscience de l’importance de la science pour le progrès technique et la croissance économique. Cependant, ce n’est que très récemment que les chercheurs ont commencé à pouvoir quantifier les flux de connaissances entre le monde universitaire et le secteur privé. Dans cette thèse, je mesure d’abord la contribution directe des universitaires à l’invention, puis je vais plus loin en évaluant l’impact de différentes politiques publiques sur les incitations des universitaires à inventer. Tous les chapitres sont basés sur le cas français, pour lequel nous avons collecté des données quasi-exhaustives sur la population des universitaires et leurs inventions sur une vingtaine d’années. Dans le premier chapitre, je quantifie l’invention académique en France et j’explore ses facteurs individuels et sociaux. Je trouve que plus de 11% des inventions brevetées pour les années 1995-2012 proviennent du milieu universitaire, révisant à la hausse les estimations précédentes. Chaque année, non seulement le nombre d’inventions académiques augmente, mais aussi la propension des professeurs à inventer (de 75% entre 1995 et 2012). Étant donné que les déterminants de cette diffusion restent peu clairs, j’étudie la contribution des caractéristiques aux niveaux micro et méso. J’explore les effets de l’âge et de la cohorte : les jeunes formés dans une culture plus entrepreneuriale sont-ils plus enclins à inventer, ou moins enclins que leurs aînés en raison de la priorité qu’ils accordent à l’avancement de leur carrière ? Je trouve des arguments en faveur de cette dernière hypothèse, c’est-à-dire un effet de cycle de vie plutôt qu’un effet de cohorte. Mais l’invention est aussi un phénomène social, et je me demande donc si le fait d’être entouré de collègues inventeurs (dans le laboratoire ou à l’université) a une incidence sur la propension à inventer. Mes résultats indiquent qu’un professeur dépose quatre fois plus d’inventions lorsque ses collègues du laboratoire déposent un brevet de plus par an en moyenne. Dans le deuxième chapitre, j’évalue l’impact de l’implémentation du régime de propriété universitaire sur l’invention académique. Ce régime a été introduit dans de nombreuses économies avancées à la suite de la loi pionnière américaine Bayh-Dole. Il consiste à attribuer les droits de propriété intellectuelle sur les inventions universitaires aux universités, plutôt qu’aux professeurs, aux entreprises ou aux agences fédérales, dans le but d’encourager l’invention universitaire et son transfert à la sovciété. La France a introduit sa loi sur l’innovation et la recherche en 1999. Comment le régime de propriété universitaire affecte-t-il les incitations des professeurs à inventer ? Je constate que seules certaines universités mettent effectivement en oeuvre les recommandations politiques correspondantes, et ce à des moments différents. J’apparie les universités qui franchissent le pas et gèrent de plus en plus activement leur propriété intellectuelle à d’autres universités qui n’ont pas franchi le pas et j’effectue une régression de différence de différences sur les inventions que leurs professeurs font breveter et transfèrent par la suite. Je constate qu’après la mise en oeuvre du régime dans leur université, les professeurs font breveter jusqu’à 20% d’inventions supplémentaires. Je conclus qu’il est efficace d’attribuer les droits de propriété intellectuelle aux universités, et je suggère que les effets négatifs observés dans d’autres pays peuvent résulter d’un manque de flexibilité envers les universités dans la mise en oeuvre pratique du régime. Dans le troisième chapitre, j’évalue l’impact du financement compétitif de la science sur la contribution des universitaires à l’innovation. Le gouvernement français a introduit le financement compétitif de la recherche scientifique en 2005.[...]