Thèse soutenue

Avalappoq, prendre la mer et danser : migrations étudiantes et formation des positions dominantes entre Groenland et Danemark

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Auteur / Autrice : Marine Duc
Direction : Béatrice Collignon
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Geographie
Date : Soutenance le 22/11/2022
Etablissement(s) : Bordeaux 3
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Montaigne-Humanités (Pessac, Gironde ; 2007-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Passages (Pessac, Gironde ; Pau ; Talence, Gironde)
Jury : Président / Présidente : Myriam Houssay-Holzschuch
Examinateurs / Examinatrices : Béatrice Collignon, Ivalo Rosing, Agnès Van Zanten
Rapporteurs / Rapporteuses : Camille Schmoll, Saba A. Le Renard

Résumé

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Cette thèse porte sur la construction des trajectoires étudiantes dans la configuration postcoloniale entre Groenland et Danemark. S’appuyant sur une enquête combinant essentiellement observation participante et entretiens, elle retrace les biographies d’étudiant·e·s groenlandais·e·s à travers un système scolaire forgé par les rapports de force hérités de la colonisation danoise et bâti sur la dispersion de l’offre de formation. Elle montre que loin de n’être dédié qu’au tri social, ce dispositif scolaro-migratoire constitue également un dispositif de transformation des individus, qui travaille vers les régions supérieures de l’espace social transatlantique. Elle déstabilise ainsi l’image de la migration étudiante comme privilégiée autour de deux axes. En prenant en compte les caractéristiques prémigratoires des individus, elle montre l’hétérogénéité des origines sociales de celles et ceux s’orientant vers une formation au Danemark, et le poids des transclasses sur les routes de cette migration. Cela s’explique notamment par l’encadrement matériel et moral affirmé par les pouvoirs publics groenlandais, qui voient dans la fonction technique de production de qualifications du système éducatif une stratégie politique de concrétisation de l’indépendance. Le deuxième axe réinscrit cette migration dans les asymétries globales des formations raciales. Il analyse le rôle de la migration étudiante dans la construction de frontières raciales, associant danicité et blanchité d’une part, et groenlandité et inuité de l’autre, dans les interactions quotidiennes avec la population majoritaire et dans les placements scolaires. Toutefois, la migration étudiante offre également les conditions d’une déstabilisation de la position minoritaire, non seulement dans les rapports de classe, mais également dans les rapports de race. La thèse met en évidence la dimension racialement codée des acquisitions socialement valorisées propres à la migration étudiante (façons de se comporter et de percevoir le monde, dispositions linguistiques ou encore certains goûts), à travers l’étude de la façon dont les étudiant·e·s sont perçu·e·s et se perçoivent pendant leur parcours. Ainsi, en s’appuyant sur les approches bourdieusiennes de la reproduction, sur le nexus analytique de la colonialité et sur les travaux récents sur la socialisation raciale, cette thèse prend le contrepoint de l’analyse de la formation des frontières raciales en migration, qui sont souvent envisagées comme (re)produisant ou solidifiant ces frontières raciales : ces dernières trouvent dans le dispositif scolaro-migratoire postcolonial les conditions de leur (re)production comme les conditions leur mise en crise.