Thèse soutenue

Les rivalités de puissance et leurs conséquences à l’ONU : le cas des opérations de paix (1948-2022)

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Auteur / Autrice : Arthur Boutellis
Direction : Jean-Vincent Holeindre
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Science politique
Date : Soutenance le 08/11/2022
Etablissement(s) : Université Paris-Panthéon-Assas
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Georges Vedel Droit public interne, science administrative et science politique (Paris ; 1992-....)
Jury : Examinateurs / Examinatrices : Guillaume Devin, Ronald Hatto, Lise Morjé Howard, Marie-Joëlle Zahar
Rapporteurs / Rapporteuses : Delphine Allès, Frédéric Charillon

Résumé

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Depuis leur création en 1948, les opérations de paix onusiennes se sont adaptées et ont été façonnées par les évolutions de l’ordre international. Si elles ont longtemps fait l'objet d’un relatif consensus, notre thèse démontre que ces opérations sont devenues un terrain de rivalités de pouvoir et d’influence de grandes et moyennes puissances aux intérêts et valeurs de plus en plus divergents. A rebours des thèses libérales qui dominent l’étude du maintien de la paix depuis la fin de la guerre froide, nous proposons une grille d’analyse « réaliste-constructiviste » originale de la notion de puissance et des modes d’action des États à l’ONU (contrainte, influence, résistance), enrichie des méthodes bureaucratiques et de la psychologie politique, qui à notre avis permet de mieux comprendre ces opérations de paix et leurs limites. Nous testons d’abord cette grille d’analyse à travers un historique des opérations de paix de l’ONU de la guerre froide jusqu’au tournant de la stabilisation des vingt dernières années. Nous analysons ensuite les conséquences de la résurgence des rivalités de puissances, au siège des Nations Unies et dans la conduite des opérations elles-mêmes. A New York, nous nous intéressons au Conseil de sécurité, à l’Assemblée générale mais aussi au Secrétariat des Nations Unies (ou la bureaucratie), et aux négociations des résolutions et déclarations, des budgets, mais aussi au champ des valeurs et des normes, ainsi qu’aux nominations de plus en plus politisées. Sur le terrain d’autres jeux de pouvoir se manifestent aussi à travers les contributions en troupes, le comportement des pays hôtes, et diverses forces parallèles. Malgré la capacité des membres du Conseil de sécurité de « compartimenter » leurs différences, ces rivalités risquent d’affecter durablement l’impartialité, la légitimité et la pertinence des opérations de paix. Notre étude de cas approfondie de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA, 2013-2022) illustre comment les Casques bleus finissent dans certains cas pris en étau entre les intérêts contradictoires de certains pays. Nous posons la question du futur des opérations de paix dans un contexte de rivalités exacerbées par la montée en puissance de la Chine et la guerre en Ukraine. Enfin, nous soumettons l’idée qu’un désintérêt et désengagement total des puissances serait aujourd’hui encore plus préjudiciable que leur ingérence excessive. L’ONU doit donc mieux prendre en compte cette réalité, sans s’y soumettre. Les États doivent pouvoir se servir des opérations de paix tout en les servant, mais sans les instrumentaliser, ni les compromettre car cela reviendrait à se priver à l’avenir de cet outil important du multilatéralisme.