Structure et évolution du chanté nwel en Guyane Française : patrimoine d’une tradition pour les valeurs et la cohésion sociales
Auteur / Autrice : | Emmanuella Bade |
Direction : | Apollinaire Anakesa Kululuka |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Arts plastiques, musicologie |
Date : | Soutenance le 29/06/2022 |
Etablissement(s) : | Antilles |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Milieu insulaire tropical : dynamiques de développement, sociétés, patrimoine et culture dans l'espace Caraïbes-Amériques (Pointe-à-Pitre) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre de recherches interdisciplinaires en lettres, langues, arts et sciences humaines (Schoelcher, Martinique) |
Jury : | Examinateurs / Examinatrices : Apollinaire Anakesa Kululuka, Alice Tacaille, Monique Blérald, Mondher Ayari |
Rapporteurs / Rapporteuses : Alice Tacaille, Monique Blérald |
Mots clés
Résumé
Le Chanté Nwèl est une forme d’expression artistique et culturelle créole des Antilles‑Guyane françaises, autour de laquelle se réunissent familles et entourages, pour chanter viva voce cantiques et noëls durant le mois de décembre. Pour autant, dans les anciennes colonies françaises et plus particulièrement en Guyane, son histoire demeure peu connue voire carrément méconnue. Il s’agit du Chanté Nwèl, hérité d’une pratique encore plus ancienne, nommée Chanté Kantik et dont les origines remontent à la période esclavagiste. Le Chanté Nwèl a émergé, à la fin des années 1980, simultanément à la Martinique et la Guadeloupe, sous l’impulsion d’acteurs locaux alors désireux de perpétuer la tradition des chants et cantiques de Noël. En Guyane française, une poignée de Créoles antillais qui, soucieux de préserver leur identité, devinrent involontairement les principaux instigateurs de l’émergence du Chanté Nwèl à la fin de la décennie suivante (1995-2000). Dès lors, le Chanté Nwèl suscitera un engouement sans précédent auprès de la société guyanaise. L’étude de cette réalité culturelle, au travers de la thèse, présent un double intérêt D’une part, elle vise à mettre en lumière la systématique d’un art de sons comportant plusieurs singularités techniques et esthétiques, en particulier mélodiques, dont les airs, riches en symboles et en significations, sont exécutés pendant une période tout autant particulière pour la vie socioculturelle de la population, lors des rassemblements spécifiques, dits Chanté Nwèl. Structurellement, des mélodies relativement courtes sont chantées sous les formes strophique et couplet/refrain. Les airs de Chanté Nwèl et de Chanté Kantik, d’ambitus assez réduit, sont très populaires et faciles d’exécution. Leur harmonie s’appuie sur le système tonal occidental, avec une prédominance du mode majeur. D’autre part, l’étude tient compte des plans ontologique, cognitif et sémiologique du Chanté Nwèl sur la terre guyanaise, en tant que pratique rituelle, comportant, entre autres, une sémiotique riche en réalités représentatives et en significations, ainsi qu’un jeu sur la dichotomie sacré‑profane, avec des fonctions et éléments d’une grande force cohésive. Pour répondre à la problématique sous-jacente, nous proposons une approche multidisciplinaire convoquant, plus singulièrement, les approches de l’histoire, de l’anthropologie et de la sociologie. Des résultats obtenus de nos analyses, la musique chanté nwèl, et plus particulièrement sa pratique vocale, apparaissent comme un puissant vecteur de cohésion sociale. Nous nous sommes également référée aux récentes études en neuroscience. Elles nous permettent une meilleure compréhension des fonctions cohésive et thérapeutique de ce rituel. Elles démontrent combien les effets de la musique influent sur l’organisme humain, par le biais des hormones. Par ce biais, nous sommes également parvenue à saisir que la force cohésive, par le Chanté Nwèl ou le Chanté Kantik, n’est pas une banalité, et elle est loin de ne l’être uniquement que par la musique. Pour parvenir à mieux rassembler les hommes, dans le cadre de ces pratiques rituelles en l’occurrence, la religion et les valeurs humaines sont également à l’œuvre, même si la religion comme les valeurs humaines n’attirent pas systématiquement une harmonie véhémente : elles peuvent, en effet, s’avérer exclusives.