Et si l'appendice prolongeait la vie ?
Auteur / Autrice : | Maxime Collard |
Direction : | Eric Ogier-Denis, Yves Panis |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Physiologie et physiopathologie |
Date : | Soutenance le 22/10/2021 |
Etablissement(s) : | Université Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Bio Sorbonne Paris Cité (Paris ; 2014-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre de recherche sur l'inflammation (Paris ; 2014-....) |
Jury : | Président / Présidente : Valérie Paradis |
Examinateurs / Examinatrices : Valérie Paradis, Sophie Thenet, Fabien Milliat, Jérémie Lefèvre, Bertille Marquet | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Sophie Thenet, Fabien Milliat |
Mots clés
Résumé
Des travaux récents ont révélé que la réalisation d'une appendicectomie chez les patients atteints d'une rectocolite hémorragique (RCH) pourrait être un traitement efficace de l'inflammation colorectale chronique. Certaines études ont cependant démontré une augmentation significative du risque de cancer colorectal associé à la colite (CCR-AC) après appendicectomie ; ces deux conséquences de l'appendicectomie se confrontent au dogme actuel considérant que le risque de CCR-AC est proportionnel à l'intensité et à l'étendue de la RCH. Le mécanisme cellulaire impliqué dans ce sur-risque de CCR-AC lié à l'appendicectomie n'a jamais été exploré. Sur un modèle murin de CCR-AC, nous montrons que le patch caecal (équivalent fonctionnel de l'appendice) est un lieu d'éducation des lymphocytes T et que l'ablation de cette structure immunitaire conduit à la perte de l'immunosurveillance contre le CCR-AC. En revanche, l'induction d'une néo-appendicite ou la thérapie cellulaire par injection de lymphocytes T-CD8+ éduqués au cours d'une néo-appendicite protègent contre le CCR-AC et confirment le rôle essentiel de l'appendice dans l'immunosurveillance anti-tumorale de ce cancer. Les explorations immunohistochimiques conduites chez l'Homme ont corroboré ces résultats expérimentaux en mettant en évidence une diminution significative de la densité intra-tumorale en lymphocytes T et T-CD8 dans le CCR-AC chez des patients atteints de RCH avec un antécédent d'appendicectomie. Ce travail apporte des connaissances nouvelles sur la fonction immunitaire de l'appendice et interroge sur l'innocuité d'une appendicectomie comme traitement de la RCH. Face à cet effet bénéfique de l'appendice sur le CCR-AC, nous nous sommes posés la question de savoir si la fonction d'éducation immunitaire de l'appendice et ses conséquences sur l'organisme pouvaient avoir une influence plus générale sur l'histoire évolutive des espèces. Au cours de l'évolution il est postulé que la sénescence d'une espèce est modelée par le taux de mortalité extrinsèque (prédation, maladie infectieuse') et que la probabilité de survie est allongée lorsque la mortalité extrinsèque diminue. Selon ce postulat, nous avons émis l'hypothèse que l'appendice pourrait retarder la sénescence en diminuant la mortalité extrinsèque et par voie de conséquence aurait un impact sur la longévité des espèces sélectionnées au cours de l'évolution. À partir d'une analyse statistique portant sur 258 espèces de mammifères, dont 39 avec un appendice et 219 sans appendice, et en intégrant l'interdépendance évolutive des espèces, nous démontrons que la longévité des espèces avec un appendice est significativement augmentée. De plus, nous mettons en évidence que durant l'histoire évolutive des mammifères, l'appendice est apparu au moins 16 fois et a secondairement disparu une fois seulement. Cette asymétrie évolutive en faveur du gain de la structure suggère que la présence de l'appendice confère un avantage évolutif au regard de la sélection naturelle. L'ensemble de ces travaux renforce l'idée que l'appendice n'est pas un vestige évolutif, mais bien une structure fonctionnelle positivement sélectionnée au cours de l'histoire évolutive et que les conséquences de la perte de sa ou ses fonctions suite à une appendicectomie doivent être considérées avec une attention toute particulière.