Le défi chinois des Lumières : savoirs techniques et économie politique en France au temps des circulations sino-européennes (XVIIe -XVIIIe siècle)
Auteur / Autrice : | Sébastien Pautet |
Direction : | Liliane Hilaire-Pérez |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Histoire et civilisations |
Date : | Soutenance le 27/11/2021 |
Etablissement(s) : | Université Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences des sociétés (Paris ; 2019-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Identités, cultures, territoires (Paris ; 1992-....) |
Jury : | Président / Présidente : Catherine Jami |
Examinateurs / Examinatrices : Liliane Hilaire-Pérez, Catherine Jami, Pierre-Yves Beaurepaire, Stéphane Van Damme, Bing Zhao, Giorgio Riello, Laurent Brassart | |
Rapporteur / Rapporteuse : Pierre-Yves Beaurepaire, Stéphane Van Damme |
Mots clés
Résumé
Les techniques chinoises occupèrent une place singulière dans la pensée politique, économique et savante du XVIIIe siècle en France. Un ensemble de facteurs convergents en Chine et en Europe (religieux, commerciaux, savants, politiques) contribuèrent au cours des XVIIe et XVIIIe siècles à faire de l'empire des Ming et surtout des Qing un modèle d'expertise en matière de techniques dans un champ élargi de savoir-faire et de productions. Le royaume de France, en raison du rôle stratégique qu'occupa la mission jésuite de Pékin tout au long du XVIIIe siècle et des liens tissés entre État, science et entreprise depuis Colbert, fut aux avant-postes de circulations majeures d'informations sur les techniques chinoises. Tout en insistant sur les raisons qui contribuèrent à singulariser la Chine au regard d'autres espaces avec lesquels l'Europe était en contact, nous montrons qu'en France l'expertise chinoise fut mobilisée par le biais d'enquêtes commandées à des acteurs implantés dans le Céleste empire en vue de perfectionner les techniques manufacturières et artisanales européennes et servir de contrepoint aux voies de développement privilégiées par les administrateurs durant la première industrialisation. Le manuscrit se divise en trois parties. La première partie met en évidence les raisons qui ont concouru à faire de la Chine un éminent « sujet » des Lumières techniciennes. Alors que littérature missionnaire du XVIIe siècle contribua à enraciner l'idée d'une commensurabilité des savoirs techniques chinois et européens et à construire un imaginaire technique de la Chine, les relations commerciales sino-européennes entraînèrent une mise en contact des productions analogues susceptibles d'améliorations mutuelles. En France, l' « administration technicienne » du XVIIIe siècle érigea la Chine en source d'interrogation sur les perfectionnements techniques à apporter à son industrie, par le biais de multiples questionnaires envoyés en Asie orientale et à la structuration d'un canal d'échanges d'informations au long cours. La deuxième partie montre la façon dont les acteurs sollicités par les autorités ont cherché à répondre à la demande émanant des institutions savantes et royales au cours du XVIIIe siècle. Cette partie insiste sur l'importance des mobilités humaines pour la transmission de savoirs techniques à l'époque moderne et explicite les réponses qui furent apportées aux commanditaires par les agents de terrain en privilégiant une micro-histoire des acteurs et lieux d'observation et de collecte d'informations sur les techniques en Chine. La troisième partie étudie la façon dont les informations envoyées de Chine furent diffusées au cours du XVIIIe siècle. On insiste en particulier sur les ressources matérielles, textuelles, et visuelles reçues de Chine et les réseaux qui y eurent accès. Pour ancrer les circulations de savoirs dans une approche concrète, on privilégie dans cette dernière partie plusieurs études de cas démontrant que les circulations de techniques chinoises eurent moins pour finalité leur réplication en Europe qu'à servir d'expertise pour orienter les décisions stratégiques prises par le gouvernement royal dans la seconde moitié du XVIIIe siècle.