ThĂšse soutenue

PhénomÚnes d'ßles en français : approches empiriques et formelles

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Auteur / Autrice : Elodie Winckel
Direction : Anne AbeillĂ©, Stefan MĂŒller
Type : ThÚse de doctorat
Discipline(s) : Linguistique
Date : Soutenance le 21/01/2021
Etablissement(s) : Université Paris Cité en cotutelle avec Humboldt-UniversitÀt (Berlin)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences du langage (Paris ; 2019-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire de linguistique formelle (Paris) (1972-....)
Jury : Président / Présidente : Barbara Hemforth
Examinateurs / Examinatrices : Anne AbeillĂ©, Stefan MĂŒller, Barbara Hemforth, Rui P. Chaves, Dominique Sportiche, Karen Lahousse
Rapporteurs / Rapporteuses : Rui P. Chaves, Dominique Sportiche

Résumé

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On appelle traditionnellement les contraintes sur les dĂ©pendances non-locales des ''Ăźlots'', et on les considĂšre syntaxiques (Ross, 1967). Mais trĂšs tĂŽt des explications alternatives ont vu le jour. Certains linguistes, comme Erteschik-Shir (1973), proposent que ces ''Ăźlots'' viennent de contraintes discursives. D’autres, comme (Kluender & Kutas, 1993b), pensent qu’on peut les expliquer par le traitement (processing). Je m’intĂ©resse ici Ă  la contrainte de l’''Ăźlot sujet'', d’abord dĂ©finie comme portant sur les sujets phrastiques (Ross, 1967), puis Ă©tendue Ă  tous les sujets (cf. la contrainte de ''Sous-jacence'' chez Chomsky 1973). Il existe une vaste littĂ©rature sur le sujet, et beaucoup de contre-exemples dans plusieurs langues (Stepanov 2007 en offre un aperçu). Actuellement, certains chercheurs considĂšrent que ces Ăźlots sont un phĂ©nomĂšne syntaxique et d’autres pensent qu’il s’agit seulement d’une impresion due Ă  des facteurs cognitifs ou discursifs. Le français en offre un bon exemple : Godard (1988) a montrĂ© qu’il est possible d’extraire hors du sujet dans les relatives en dont ; mais Tellier (1990,1991) soutient que dont est une exception et n’est pas soumis aux contraintes de sous-jacence. Le français est aussi intĂ©ressant parce qu’il ne s’agit pas d’une langue Ă  sujet nul (dites pro-drop) comme le sont les autres langues romanes ; or Uriagereka (2012,ch. 2) affirme que les contre-exemples sont en fait tous des cas spĂ©ciaux de pro-drop. Dans cette thĂšse, j’étudie plusieurs structures du français impliquant une extraction hors d’un sujet nominal, infinitif ou phrastique. J’examine la contrainte FBC (Focus-Background Conflict) que nous avons proposĂ©e pour l’anglais et le français (AbeillĂ© et al.,2020). Cette thĂ©orie, inspirĂ©e de propositions prĂ©cĂ©dentes par Erteschik-Shir (1973) et Goldberg (2006), stipule qu’un Ă©lĂ©ment focal ne peut pas faire partie d’un constituent du fond (c.Ă .d. prĂ©supposĂ©) car cela rĂ©sulterait en une contradiction pragmatique. Les sujets sont en gĂ©nĂ©ral topique de phrase, et font donc partie du fond. L’originalitĂ© majeure de cette hypothĂšse est qu’elle fait des prĂ©dictions diffĂ©rentes pour les structures focalisantes (interrogatives et clivĂ©es) et pour les relatives. Je prĂ©sente les rĂ©sultats de huit Ă©tudes de corpus, en montrant la distribution des extractions ainsi que d’autres facteurs (p. ex. les types de verbe, la restrictivitĂ©, les rĂŽles sĂ©mantiques). Les donnĂ©es confirment ce que dit Godard (1988): il est possible d’extraire hors du sujet avec dont, et c’est son usage le plus courant. Mais l’on trouve des extractions hors du sujet dans les relatives en de qui, en duquel ou en avec qu- (contre(contre Tellier, 1990, 1991). On observe une diffĂ©rence majeure entre relatives et interrogatives, car il n’y a aucun cas d’interrogative avec extraction hors du sujet dans nos donnĂ©es. Je prĂ©sente ensuite 16 expĂ©riences, dont les rĂ©sultats confirment que les locuteurs acceptent les extractions hors du sujet dans les relatives et qu’elles ne provoquent pas d’augmentation des temps de lecture. Les extractions hors du sujet reçoivent des jugements d’acceptabilitĂ© plus faibles dans les interrogatives, et probablement aussi dans les clivĂ©es (mĂȘme si les rĂ©sultats pour ces derniĂšres sont plus discutables). Je compare ces rĂ©sultats aux diffĂ©rentes hypothĂšses sur les Ăźlots sujets et conclus que la contrainte FBC est la mieux Ă  mĂȘme d’expliquer les donnĂ©es.Pour finir, je propose une analyse dans une grammaire syntagmatique (HPSG). J’adopte une analyse des extractions sans catĂ©gorie vide (via le trait slash) pour les interrogatives (Ginzburg & Sag,2000), les relatives (AbeillĂ© & Godard, 2007) et les clivĂ©es (Winckel & AbeillĂ©, 2020). Je montre comment la syntaxe interagit avec la structure informationnelle en utilisant la reprĂ©sentation de cette derniĂšre proposĂ©e par Song (2017) qui l’inclut dans les objets sĂ©mantiques de type MRS (Copestake et al., 2005). Je propose une analyse formelle de la contrainte FBC dans ce cadre.