Thèse soutenue

Facteurs de risque génétiques et environnementaux de l'infection par Mycobacterium tuberculosis

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Auteur / Autrice : Jocelyn Quistrebert
Direction : Laurent AbelAurélie Cobat
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Épidémiologie génétique
Date : Soutenance le 10/02/2021
Etablissement(s) : Université Paris Cité
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Pierre Louis de santé publique : épidémiologie et sciences de l'information biomédicale (Paris ; 2000-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut des Maladies Génétiques (Paris)
Jury : Président / Présidente : Anne Bourgarit-Durand
Examinateurs / Examinatrices : Anne Bourgarit-Durand, Jacques Fellay, Etienne Patin, Audrey Sabbagh
Rapporteurs / Rapporteuses : Jacques Fellay, Etienne Patin

Résumé

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La tuberculose est une maladie infectieuse chronique causée par Mycobacterium tuberculosis (Mtb). C’est l'une des 10 premières causes de mortalité dans le monde et la première par un unique agent infectieux. Après exposition à Mtb, une majorité d’individus deviennent infectés. L’infection est asymptomatique et ne conduit à la tuberculose maladie que dans ~10% des cas. Le diagnostic d’infection tuberculeuse repose sur des tests immunologiques in vivo (intradermoréaction, IDR, ou test de Mantoux) ou ex vivo (test de production d’interféron-gamma ou IGRA pour interferon-gamma release assay). L’objectif global de cette thèse était d’explorer les facteurs de risques génétiques et non génétiques associés à l’infection tuberculeuse. Mon premier travail s’est focalisé sur une population à haut-risque d’infection: le personnel de santé. Un large échantillon de 631 employés a été recruté au Maroc, un pays où la tuberculose est moyennement endémique et la couverture par le vaccin BCG (Bacille Calmette et Guérin) presque complète. Ces employés ont été testés à la fois par IDR et IGRA. Une forte prévalence de l’infection a pu être observée, allant de 41% si l’on utilisait un test IGRA positif à 52% si l’on utilisait l’IDR avec un seuil de positivité de 10 mm. En définissant un statut d’infection plus robuste par la positivité aux 2 tests, le sexe masculin, l’âge, un antécédent familial de tuberculose et travailler en pneumologie étaient des facteurs de risque associés à l’infection. La consommation de tabac était associée à la positivité à l’IGRA mais pas à l’IDR. Cette étude a confirmé que les résultats d’IDR et d’IGRA ne sont pas pleinement concordants et que, en pratique, un diagnostic d’infection doit tenir compte des propriétés de chaque test et du contexte dans lequel il est réalisé. Dans un deuxième travail, je me suis intéressé aux facteurs génétiques associés au phénotype d’infection. Il existe en effet de nombreuses preuves épidémiologiques qu’une partie des individus fortement exposés à Mtb ne s’infectent pas et la grande variabilité de réponse à une exposition à Mtb à environnement égal par ailleurs suggère un rôle important de ces facteurs génétiques. Une cohorte de contacts familiaux a été établie dans une région très endémique du Vietnam à partir du recensement de cas index atteints d’une tuberculose maladie. Ces contacts ont donc été intensément exposés pendant plusieurs semaines/mois et ont été testés par IDR et IGRA. J’ai réalisé une étude d’association pangénomique sur plus de 5 millions de polymorphismes nucléotidiques entre des individus considérés comme résistants à l’infection testés doublement négatifs par IDR et IGRA (n = 185), et des individus infectés testés doublement positifs ou atteints d’une tuberculose pulmonaire (n = 353). J’ai pu mettre en évidence une association significative au seuil pangénomique sur un locus du bras long du chromosome 10 (10q26.2) dont les polymorphismes confèrent une forte protection contre l’infection par Mtb (pour le marqueur génotypé rs17155120, odds ratio, OR = 0.42, P = 3.71 × 10-8). Cette association a été validée dans une cohorte indépendante constituée de contacts familiaux très exposés en France, en région parisienne, et dans un second échantillon familial recruté en banlieue du Cap, Afrique du Sud, région hyper-endémique pour la tuberculose, avec un OR combiné de 0.50 (P = 1.26 × 10-9) pour le marqueur rs17155120. Ces polymorphismes associés au phénotype sont situés dans l’intron du gène C10Orf90 (ou FATS) codant une ubiquitine ligase E3 qui active le facteur de transcription p53. L’analyse in silico a montré que les allèles protecteurs sont associés à une baisse d’expression du gène voisin ADAM12, pouvant conduire à une réponse exacerbée de lymphocytes Th17. En conclusion, ce travail a permis d’identifier des facteurs de risques de l’infection tuberculeuse sur diverses populations fortement exposées.