Hétérogénéité moléculaire de l'hyperplasie macronodulaire des surrénales
Auteur / Autrice : | Anna Vaczlavik |
Direction : | Jérôme Bertherat, Bruno Ragazzon |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Biologie cellulaire et moléculaire |
Date : | Soutenance le 23/11/2021 |
Etablissement(s) : | Université Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Bio Sorbonne Paris Cité (Paris ; 2014-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut Cochin (Paris ; 2002-....) |
Jury : | Président / Présidente : Anne-Paule Gimenez-Roqueplo |
Examinateurs / Examinatrices : Estelle Louiset | |
Rapporteur / Rapporteuse : Olivier Chabre, Enzo Lalli |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Introduction : Les hyperplasies macronodulaires bilatérales primitives des surrénales (HMBPS) se caractérisent par le développement de nodules supra centimétriques au dépend du cortex des deux surrénales, responsables d'un hypercorticisme biologique. Le spectre phénotypique des HMBPS est vaste, en rapport avec la sévérité de la sécrétion de cortisol. Certaines formes asymptomatiques sont diagnostiquées lors d'un examen radiologique demandé dans une autre indication. D'autres patients entrent dans la maladie du fait des manifestations cataboliques du syndrome de Cushing en lien avec un hypercorticisme profond. On observe l'expression de récepteurs illégitimes, le plus souvent couplés à la voie AMPc/PKA, à l'origine d'une sécrétion inappropriée de cortisol. L'exemple le mieux caractérisé est celui du syndrome de Cushing dépendant de l'alimentation en lien avec l'expression, dans les nodules surrénaliens, du récepteur au Gastric Inhibitory peptide (GIPR). Actuellement, 25% des patients HMBPS présentent une mutation germinale d'ARMC5 qui prédispose à la survenue de la maladie. La présentation peut être familiale. Elle est souvent sévère. Aucun cas d'hypercorticisme sous dépendance de l'alimentation n'a été décrit chez ces patients. La cause des Cushing dépendant de l'alimentation n'était pas élucidée. Objectifs et méthodes : Premièrement, tous les variants d'ARMC5 identifiés dans l'HMBPS dans notre centre et décrits dans la littérature ont été recensés. Deuxièmement, une étude de génomique intégrée (SNP array, RNA seq, mIRnome, méthylome et exomes) a été conduite sur des tissus provenant de 36 patients HMBPS, collectés au décours de chirurgies surrénaliennes dans le cadre du réseau COMETE. Cette approche avait pour but de proposer une cartographie moléculaire et de nouvelles hypothèses génétiques dans le développement des différentes formes d'HMBPS. Résultats : Cent dix-neuf variants germinaux affectant la séquence codante d'ARMC5 ont été identifiés, dont une large proportion de variants faux sens (44%). Ils sont associés à un second événement tumoral ; il s'agit souvent d'une délétion aboutissant à une perte d'hétérozygotie caractéristique d'un gène suppresseur de tumeur. L'étude de génomique intégrée montre que les tumeurs mutées pour ARMC5 constituent un premier groupe parmi les HMBPS, avec notamment des signatures de methylation et transcriptomique propres. Un second groupe homogène de tumeurs se distingue. Celles-ci présentent une surexpression du récepteur au GIP associée cliniquement à un Cushing dépendant de l'alimentation. Une prédisposition germinale chez ces patients a été identifiée avec la mise en évidence de mutations germinales du gène KDM1A (Lysine Specific Demethylase 1). De plus, nous avons démontré que ces mutations sont associées à une perte de l'allèle sauvage au sein de la tumeur, conduisant à la perte de son expression tumorale. Les tumeurs de ce groupe sont plus riches en cellules éosinophiles. Le troisième groupe identifié par cette étude est constitué de tumeurs provenant de patients dont les niveaux d'hypercorticisme sont plus modestes. Conclusion : Ce travail a permis de décrire l'ensemble des altérations génétiques du gène ARMC5 identifiées à ce jour dans HMBPS et souligne l'importance de déterminer les conséquences fonctionnelles des mutations faux sens pour une meilleure prise en charge des patients et de leurs apparentés. L'analyse de génomique intégrée, quant à elle, met en évidence l'hétérogénéité moléculaire qui existe dans les HMBPS et a permis d'identifier la principale cause génétique des HMBPS associées à un syndrome de Cushing dépendant de l'alimentation. De manière intéressante, les tumeurs mutées pour ARMC5 et KDM1A présentent des signatures clinique, anatomopathologique et moléculaire propres. Les fondements génétiques du troisième et dernier groupe, plus hétérogène, restent à identifier.