Thèse soutenue

Construction des inégalités sociales de cancer du sein : mécanismes impliqués dans l'incidence et la présentation initiale de la maladie

FR  |  
EN
Auteur / Autrice : Eloise Berger
Direction : Cyrille DelpierreRaphaële Castagné
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Epidémiologie
Date : Soutenance le 23/06/2021
Etablissement(s) : Toulouse 3
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Mathématiques, informatique et télécommunications (Toulouse)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre d'Epidémiologie et de Recherche en santé des Populations de Toulouse (2021-....)
Jury : Président / Présidente : Gwenn Menvielle
Examinateurs / Examinatrices : Cyrille Delpierre, Raphaële Castagné, Guy Launoy, Sylvana Côté
Rapporteurs / Rapporteuses : Pascal Guénel, Virginie Ringa

Résumé

FR  |  
EN

Des inégalités sociales de mortalité par cancer du sein ont été mises en évidence dans la littérature. Le cancer du sein est un cancer relativement fréquent, bien documenté, pour lequel un nombre important de déterminants a été identifié. Au fil des années de plus en plus d'études se sont intéressées à l'impact de ces déterminants sur le gradient social d'incidence de cancer du sein. Cependant, ces déterminants ne suffisent pas à eux seuls à expliquer les inégalités d'incidence observées suggérant que d'autres mécanismes sont en jeu. Nous faisons l'hypothèse que les inégalités sociales observées dans la mortalité par cancer du sein sont la conséquence d'une distribution socialement différenciée de l'incidence de la maladie mais aussi de ses caractéristiques initiales, et de l'accès au système de soin. Cette thèse propose d'étudier le lien entre la position socio-économique (PSE) et l'incidence du cancer du sein ainsi que ses caractéristiques cliniques en considérant un large ensemble de variables de médiation potentielles. L'étude du lien entre la PSE et le fonctionnement biologique a fait l'objet de mon premier travail de thèse. Ce travail a mis en évidence un lien entre un faible niveau d'éducation et une inflammation plus élevée, indépendamment de la PSE au début de la vie ou à l'âge adulte, ainsi que des facteurs comportementaux et de l'indice de masse corporel. J'ai ensuite étudié le lien qui pouvait exister entre PSE, inflammation et risque de cancer. J'ai approfondi cette exploration dans le champ des cancers à travers trois travaux menés au sein de la cohorte prospective française E3N (N = 98 995 femmes dont 7 877 cas de cancer du sein), dans lesquels j'ai cherché à étudier la façon dont les facteurs sociaux, biologiques, comportementaux, anthropométriques et reproductifs interagissent à différents moments de la vie pour favoriser la survenue des cancers du sein et influencer leurs caractéristiques au moment du diagnostic. Dans un travail qui s'est intéressé à l'incidence de la maladie, mes résultats ont mis en évidence un risque de cancer du sein plus élevé chez les femmes éduquées, largement expliqué par un âge plus tardif à la première grossesse. Cependant, cette association n'était pas totalement expliquée par la prise en compte d'un nombre important de facteurs de risque, suggérant que d'autres déterminants ou mécanismes sont en jeu. Parmi ces mécanismes, nous avons étudié le lien entre le niveau d'éducation et des biomarqueurs. Un second travail a ainsi permis de mettre en évidence que certains biomarqueurs [la protéine C-réactive, les lipoprotéines de haute densité, l'œstradiol, la testostérone et les protéines de liaison des hormones sexuelles] étaient associés au risque de cancer du sein, indépendamment des facteurs comportementaux, anthropométriques et reproductifs, et que ces biomarqueurs étaient socialement distribués. Le lien entre l'éducation et ces biomarqueurs était en partie expliqué par les facteurs de risque considérés sauf en ce qui concerne la testostérone, suggérant que la relation entre l'éducation et cette hormone sexuelle pourrait constituer un mécanisme nouveau impliqué dans le gradient d'incidence. Concernant les caractéristiques des cancers, un troisième travail nous a permis de montrer que les femmes moins éduquées, bien que moins à risque de développer un cancer du sein, sont plus à risque de développer des tumeurs agressives et un sous type de moins bon pronostic. Ce travail doctoral souligne l'importance des facteurs reproductifs sur le risque de cancer du sein mais met également en évidence que d'autres mécanismes d'incorporation biologique de l'environnement social, en plus des facteurs de risque classiques, pourraient être impliqués dans les inégalités sociales d'incidence et de profils de tumeurs. D'autres travaux sont nécessaires pour mieux caractériser le rôle de l'incorporation biologique, notamment le recours à des analyses de médiation, et analyser les effets sur la survie.