Thèse soutenue

Les lymphocytes T CD8 innés, une nouvelle population T non conventionnelle (re)programmée en transplantation rénale

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Auteur / Autrice : Lauren Daniel
Direction : André HerbelinAntoine ThierryAlice Barbarin
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Aspects moléculaires et cellulaires de la Biologie
Date : Soutenance le 08/07/2021
Etablissement(s) : Poitiers
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences Biologiques et Santé (Limoges ; 2018-2022)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Ischémie reperfusion, métabolisme et inflammation stérile en transplantation (Poitiers ; 2012-....) - Ischémie Reperfusion en Transplantation d’Organes Mécanismes et Innovations Thérapeutiques / IRTOMIT
faculte : Université de Poitiers. UFR de médecine et de pharmacie
Jury : Président / Présidente : Luc Pellerin
Examinateurs / Examinatrices : André Herbelin, Antoine Thierry, Alice Barbarin, Julie Dechanet-Merville, Julien Zuber
Rapporteurs / Rapporteuses : Christophe Mariat, Sophie Brouard

Résumé

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Les lymphocytes T (LT) CD8 innés sont une population de LT non conventionnels récemment décrits dans le laboratoire. On les qualifie de « non conventionnels » car ils possèdent des caractéristiques de l’immunité acquise (facteur de transcription Eomesodermine et phénotype T mémoire) mais aussi de l’immunité innée (récepteurs des cellules NK, réponse à une stimulation cytokinique de type inné). Les fonctions de ces cellules sont encore peu connues, même s’il existe un faisceau d’argument en faveur de leur implication dans l’immunité anti-infectieuse et anti-tumorale.Il a été décrit que l’immuno-sénescence et/ou la stimulation antigénique chronique (induite par exemple par les infections virales chroniques au cytomégalovirus ou CMV) entraîne(nt) l’expression de marqueurs NK par les LT. Ce phénotype se rapproche donc de celui de nos cellules d’intérêt. Pour étudier l’effet de la stimulation antigénique chronique sur le compartiment LT CD8, et spécialement sa composante innée, nous avons choisi comme modèle la transplantation d’organe. Dans ce domaine, la recherche s’intéresse aux populations immunitaires susceptibles de jouer un rôle dans la tolérance ou le rejet du greffon. Parmi elles, les LT CD8 innés méritent une attention spéciale, ceci du fait de leurs fonctions innées effectrices/cytotoxiques. Nous avons présumé leur (re)programmation par la stimulation antigénique chronique (du greffon et/ou virale) pendant la transplantation. Cette hypothèse a été testée à partir d’une cohorte de patients transplantés rénaux depuis plus de dix ans, sous traitement immunosuppresseur minimisé (ciclosporine A (CsA) en monothérapie), en l’absence de signe clinico-biologique de rejet. Notre travail a d’abord permis de révéler dans les LT CD8 innés issus des donneurs sains (DS) un phénotype sénescent accentué (fréquence de cellules CD27(-)CD28(-) augmentée) que les LT CD8 conventionnels. En outre, la fréquence de cette population T innée, contrairement aux LT CD8 conventionnels, ne corrélait pas avec l’âge. Dans la cohorte de patients transplantés, nous avons observé une augmentation de la fréquence des LT CD8 innés, accompagnée d’un phénotype sénescent et effecteur terminal (CD45RA(+)CCR7(-)) exacerbé, comparativement aux cellules des DS. Les patients présentant une sérologie positive pour le CMV avaient un phénotype sénescent accru par rapport aux patients présentant une sérologie négative.En altérant la signalisation du TCR, le traitement immunosuppresseur CsA pourrait faciliter la (re)programmation des LT CD8 en faveur de leur versant inné. En accord avec cette hypothèse, une modélisation in vitro des effets de la CsA sur les LT CD8 provenant de DS en présence d’une stimulation du TCR et d’IL-15 a permis de documenter une augmentation du pool de LT CD8 innés au détriment du pool de LT naïfs, laquelle est accompagnée d’une valorisation de leurs fonctions (production innée d’IFN-γ). A l’inverse, chez les patients, les LT CD8 innés étaient dysfonctionnels, avec une production innée d’IFN-γ diminuée qui pourrait résulter de leur expression membranaire diminuée du récepteur de l’IL-15, cytokine indispensable aux LT CD8 innés. Ce dysfonctionnement, qui ne peut être attribué à un programme d’exhaustion ni être relié à un antécédent de cancer, pose la question du rôle de la stimulation allo-spécifique chronique. De façon générale, ce travail suggère que le contexte d’allogreffe rénale entraîne une reprogrammation et un phénotype de type « vieillissement » des LT CD8 innés, liés au moins en partie au traitement immunosuppresseur. Cette hypothèse devra être confortée par une analyse fine de l’allo-spécificité des LT CD8 innés dirigée contre le greffon.