Thèse soutenue

Évolution des préférences d'usage de codons et manipulation de la fidelité de la traduction

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Auteur / Autrice : Fanni Borveto
Direction : Ignacio González Bravo
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Biologie Santé
Date : Soutenance le 10/12/2021
Etablissement(s) : Montpellier
Ecole(s) doctorale(s) : Sciences Chimiques et Biologiques pour la Santé
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Maladies infectieuses et vecteurs : écologie, génétique, évolution et contrôle (Montpellier)
Jury : Président / Présidente : Luis-Miguel Chevin
Examinateurs / Examinatrices : Ignacio González Bravo, Luis-Miguel Chevin, Daniel M. Weinreich, Ingrid Lafontaine, Céline Scornavacca, Lucie Etienne
Rapporteurs / Rapporteuses : Daniel M. Weinreich, Ingrid Lafontaine

Résumé

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Les cellules eucaryotes contiennent une machinerie cellulaire complexe, qui contrôle l'expression des gènes. Le code génétique qui est à la base de cette ligne de production est dégénéré, ce qui signifie que 64 codons (trois bases consécutives) codent pour 24 acides aminés. Cela donne lieu à des codons synonymes, qui codent pour le même acide aminé. Les codons synonymes ne sont pas utilisés au hasard, les gènes, les tissus et les organismes ont tendance à avoir des préférences d'utilisation des codons (CUPrefs) divergentes. Le rôle des CUPrefs et les forces qui les façonnent ne sont pas encore clairs, mais il est certain qu'ils occupent une position importante dans l'expression des gènes. Si les CUPrefs d'un gène correspondent au pool d'ARNt, la traduction sera rapide et efficace, tandis qu'une correspondance insuffisante ou excessive des CUPrefs peut entraîner une traduction lente et imprécise ou une compétition entre les gènes pour des ressources telles que les ARNt et les ribosomes. Les virus sont dépendants des ressources de la cellule hôte pour exprimer leurs gènes, l'étude de leurs CUPrefs est donc primordiale pour comprendre leur fonctionnement et leurs interactions avec l'hôte. Dans ce travail, nous tentons d'élargir notre compréhension de l'importance des CUPrefs en analysant les causes et les conséquences des CUPrefs chez les eucaryotes et les virus, et dans une expérience d'évolution à long terme.Pour commencer, nous avons analysé 11 Papillomavirus (PV) recombinants qui infectent exclusivement des Cétacés, ainsi que d'autres PV qui infectent le même ordre d'hôtes : les Cetartiodactyles. Nous avons constaté que les PV recombinants ne sont pas différents des non-recombinants en termes de CUPrefs. Au contraire, les CUPrefs sont associés au type de gène. Elles ne correspondent pas non plus aux CUPrefs de l'hôte, ce qui laisse supposer une stratégie d'évasion immunitaire consistant à maintenir une faible expression des protéines virales du au décalage entre les CUPrefs.Ensuite, nous avons examiné l'évolution des CUPrefs dans le Polypyrimid in tract binding protéin (PTBP) et ses trois paralogues chez les vertébrés. Ces paralogues présentent des CUPrefs distincts,avec un enrichissement en GC lié à des forces mutationnelles locales dans PTBP1 chez les mammifères. Nous proposons que la composition nucléotidique divergente des PTBP est le résultat d'une évolution par sous-fonctionnalisation lors de la duplication des gènes, et qu'elle est liée aux modèles d'expression des gènes dans différents tissus.Dans une manip d'évolution expérimentale, nous avons introduit des gènes synonymes (qui ne diffèrent que par leurs CUPrefs) dans des cellules HEK293, et nous les avons laissé évoluer sous trois types de traitement pendant une centaine de générations. Nous avons constaté que lorsque les gènes hétérologues sont directement soumis à la sélection, les cellules surmontent le décalage des CUPrefs et, malgré les différences, convergent vers un modèle d'expression similaire. En revanche,6lorsque les gènes modifiés font l'objet du hitchiking génétique, les mécanismes de régulation conduisent à des profils d'expression différents afin de limiter le coût métabolique.Dans l'ensemble, nous avons constaté que les CUPrefs jouent un rôle dans la régulation de l'expression des gènes en fonction du moment ou du lieu de leurs expression, comme on l'observe à la fois chez les PVs de et chez les vertébrés. Pendant ce temps, les cellules eucaryotes peuvent s'adapter rapidement par des mécanismes de régulation complexes pour surmonter les désavantages des CUPrefs hétérologues s'ils sont nécessaires à la survie, ou les inhiber si leur expression est coûteuse.