Prise en compte des interactions interspécifiques dans l'étude de la dynamique des populations d’oiseaux grâce aux modèles intégrés multispécifiques
Auteur / Autrice : | Maud Queroue |
Direction : | Olivier Gimenez, Pierre-Yves Henry |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | EERGP - Écologie, Evolution, Ressources Génétique, Paléobiologie |
Date : | Soutenance le 07/12/2021 |
Etablissement(s) : | Montpellier |
Ecole(s) doctorale(s) : | École Doctorale GAIA Biodiversité, agriculture, alimentation, environnement, terre, eau (Montpellier ; 2015-...) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre d'écologie fonctionnelle et évolutive (Montpellier) |
Jury : | Président / Présidente : Anne Charmantier |
Examinateurs / Examinatrices : Olivier Gimenez, Pierre-Yves Henry, Anne Charmantier, Emmanuelle Cam, Michael Schaub, Marlène Gamelon | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Emmanuelle Cam, Michael Schaub |
Résumé
Pour comprendre et prédire la trajectoire des espèces dans le temps, il faut pouvoir appréhender les différents facteurs façonnant leur dynamique. Au sein des communautés, les espèces interagissent entre elles à travers de nombreuses relations interspécifiques (e.g. compétition, prédation), mais aussi avec les individus de leur propre espèce, ainsi qu’avec leur environnement (e.g. conditions climatiques, habitat). La complexité des analyses réside dans la nécessité de travailler à différents niveaux biologiques, de l’individu jusqu’à la communauté. Les modèles de population intégrés (IPM) permettent, dans leur forme la plus simple, de combiner des données à l’échelle individuelle (e.g. capture-recapture) ou à la l’échelle de la population (e.g. comptages) dans une même analyse et offrent ainsi la possibilité d’estimer des paramètres démographiques et des tailles de population. Leur extension à l’échelle multispécifique permet d’analyser l’effet de la taille de population d’une espèce sur les paramètres démographiques d’une autre espèce tout en tenant compte de covariables environnementales et en propageant toutes les sources d’incertitudes. Ainsi, ces modèles pourraient permettre de mieux appréhender le rôle des interactions interspécifiques dans la dynamique des espèces. L’objectif de cette thèse, à l’interface entre la modélisation et l’écologie, est de mettre en avant le potentiel des IPM multispécifiques en les appliquant à des cas d’étude pertinents.A travers trois cas d’étude, les effets de différentes interactions interspécifiques (prédation, compétition) ainsi que plusieurs autres facteurs (covariables climatiques, qualité de l’habitat, phénologie) ont été analysés pour appréhender les mécanismes sous-jacents à la dynamique des espèces. Un premier cas d’étude consiste en un système prédateur-proie d’oiseaux marins (le pétrel bleu Halobaena caerulea et le labbe subantarctique Catharacta lonnbergi). Les effets des relations de prédation ont été analysés tout en tenant compte des conditions climatiques en mer pour mettre en évidence leurs rôles respectifs sur la dynamique des espèces. Une deuxième analyse se focalise sur un système de mésanges (la mésange charbonnière Parus major et la mésange bleue Cyanistes caeruleus) pour analyser les effets des relations de compétition. Dans cette analyse, l’effet de l’habitat est pris en compte pour déterminer son influence sur les relations interspécifiques. Enfin, un dernier cas d’étude s’intéresse à la compétition entre deux espèces de fauvettes aux stratégies de migration différentes (la fauvette à tête noire Sylvia atricapilla et la fauvette des jardins Sylvia borin). Dans ce système, la phénologie de la reproduction est étudiée pour comprendre comment elle peut moduler les interactions interspécifiques.Globalement, les IPM multispécifiques se sont bien adaptés aux différents cas d’étude et ont permis une meilleure compréhension du rôle des interactions interspécifiques dans la dynamique des espèces. Dans le système labbe-pétrel, ces modèles ont mis en évidence l’effet majeur de la disponibilité en proies dans la dynamique des espèces. Chez les mésanges, ils ont généralisé des processus de compétition connus à l’échelle de quelques sites, à l’ensemble de la population française, tout en les nuançant selon la qualité de l’habitat. Enfin, pour les fauvettes, ils ont montré l’importance de la phénologie de reproduction dans l’intensité des interactions interspécifiques. De nombreuses perspectives de travail restent à explorer pour exploiter au mieux ces modèles. Parmi elles, il sera intéressant de développer les IPM multispécifiques, non plus avec des systèmes à deux espèces, mais en utilisant un grand nombre d’espèces pour étudier les dynamiques à l’échelle de la communauté. Ces modèles pourraient aussi permettre de projeter la dynamique des espèces selon différents scénarios climatiques et/ou de gestion et ainsi pouvoir être utilisés à des fins de conservation.