Thèse soutenue

Origine et dynamique de salinité des aquifères fracturés cristallins de la région semi-aride du Ceará, Brésil

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Auteur / Autrice : Marjorie Kreis
Direction : Jean-Denis TaupinEduardo Sávio Passos Rodrigues Martins
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences de l'Eau
Date : Soutenance le 21/07/2021
Etablissement(s) : Montpellier en cotutelle avec Universidade federal do Ceará
Ecole(s) doctorale(s) : GAIA (Montpellier ; École Doctorale ; 2015-...)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : HydroSciences (Montpellier)
Jury : Président / Présidente : Ticiana Marinho de Carvalho Studart
Examinateurs / Examinatrices : Jean-Denis Taupin, Eduardo Sávio Passos Rodrigues Martins, Julio Gonçalvès, Didier Gastmans, Christian Leduc
Rapporteurs / Rapporteuses : Julio Gonçalvès, Didier Gastmans

Résumé

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La forte salinité des eaux souterraines observée dans les roches cristallines du socle dans le nord-est du Brésil semi-aride a stimulé la recherche depuis les années 1960. La présente étude utilise des méthodes hydrodynamiques (données piézométriques mensuelles et horaires) et hydrochimiques (CE, ions majeurs, Cl/Br, éléments traces) en plus d'une vaste investigation analytique basée sur une approche multi-traceurs (180, 2H, 3H, 14C, CFC, SF6) pour identifier l'origine des sels, caractériser les processus de recharge et de circulation et déterminer les mécanismes qui conduisent à la salinisation des aquifères cristallins des régions semi-arides. Le suivi piézométrique a souligné la forte réactivité des aquifères aux précipitations et suggère que la recharge de la nappe dépend des événements pluvieux significatifs de la saison des pluies qui ont probablement favorisé la création de ruissellements et l'accumulation d'eau de surface. En effet, l'investigation menée avec plus de 500 analyses en isotopes stables a mis en évidence que cette recharge se fait par des infiltrations directes avec une proportion plus ou moins significative d'infiltrations indirectes d’eaux de surface évaporées. Même s'il n'y a pas de relation directe entre la pluie totale annuelle et la recharge des aquifères, l'étude a montré que la recharge saisonnière est faible, de l'ordre de 1 à 6 % de la pluie annuelle (≈10 à 40 mm/an). Les aquifères cristallins sont caractérisés par de faibles transmissivités (valeur médiane autour de 3,10-6 m²/s), porosités (< 0,5%) et perméabilités (de l'ordre de quelques centimètres par jour). La compartimentation latérale des aquifères est réduite (absence d'écoulement régional). L'analyse multi-traceurs a souligné que les temps de résidence des eaux souterraines sont courts (de quelques dizaines à centaines d'années, avec une contribution importante d’eau post-1950) et que les processus de circulation sont rapides. Il s'agit toutefois d'âges apparents car en réalité, les flux de circulation dans les aquifères fracturés sont beaucoup plus complexes et sont essentiellement composés par des flux saisonniers d'infiltration verticale (directe et indirecte) et des flux horizontaux de transit plus long (infiltration anté-1960). Ainsi, en plus d'une forte hétérogénéité spatiale, une forte stratification verticale est observée dans le socle fracturé cristallin (augmentation de la CE de l'eau avec la profondeur des fractures). Les eaux sont caractérisées par des concentrations en chlorures élevées (jusqu'à 5 g/L), des faciès essentiellement chlorurés (mixtes ou sodiques) et des CE variant de 890 à 19300 µS/cm. L'étude chimique suggère que les eaux, originellement de faciès bicarbonatés, sont devenues chlorurées en raison de la dissolution et du lessivage de sels (calcite, dolomite, gypse, halite et probablement MgCl2) qui ont précipité dans le sol, la ZNS et/ou les sédiments en raison des forts taux d'évapotranspiration (ETR) des pluies et des eaux de surface. Cependant, les modélisations ont montré que l'aridité climatique et les forts taux d'ETR ne peuvent pas conduire à une forte salinisation de la nappe sur une période de temps de l'ordre d’une centaine d'années, mais conduisent à des concentrations en chlorures de l'ordre de quelques dizaines de mg/L, 100 à 200 mg/L tout au plus. Ainsi, les simulations ont montré que le seul facteur capable de provoquer une forte salinisation est la présence de conditions endoréiques souterraines, dues à la transpiration de l'aquifère par les racines des arbres de la Caatinga avec un taux de près de 100% de la recharge annuelle, ce qui implique qu'il n'y a plus de relation directe entre l'âge apparent de l'eau et l'accumulation de sels dans l'aquifère. Les simulations suggèrent que les aquifères seraient dans une dynamique actuelle de désalinisation en raison de la déforestation de la Caatinga, et ce malgré l'influence d'infiltration d’eau évaporée dans les processus de recharge.