Nicolás Sartorius : un exemple des modalités de l’action antifranquiste entre agonie du régime et construction démocratique (1956-1978)
Auteur / Autrice : | Virginie Sudre |
Direction : | Florence Belmonte |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | ETUDES ROMANES spécialité Etudes hispaniques et hispano-américaines |
Date : | Soutenance le 11/12/2021 |
Etablissement(s) : | Montpellier 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale 58, Langues, Littératures, Cultures, Civilisations (Montpellier ; 2015-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Recherches sur les suds et les orients (Montpellier) - Recherches sur les suds et les orients (Montpellier) |
Jury : | Président / Présidente : Pierre-Paul Grégorio |
Examinateurs / Examinatrices : Maria Llombart Huesca | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Pilar Martínez-Vasseur, Manuelle Peloille |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Mots clés libres
Résumé
On a longtemps considéré que la transition de la dictature à la démocratie aurait été une période pacifique orchestrée d'une main experte par l'élite politique d'alors : les Espagnols auraient fini par accepter presque passivement une dictature qui leur garantissait un niveau de vie sans comparaison possible avec celui qu'ils avaient à l'issue de la guerre civile, bien que le prix à payer ait été l'absence de libertés fondamentales. Plusieurs travaux ont démontré depuis que même si l'opposition ne réussit pas à elle seule à renverser le régime, elle contribua nettement à l'affaiblir et à le décrédibiliser. A partir des années 1960 il fit face à toujours plus d'actions dissidentes. Ces actions faisaient initialement suite au refus des autorités d'accéder à des revendications socio-culturelles. Au fil du temps et des arrestations, elles se sont transformées en revendications politiques. L'acharnement du régime pour faire taire ces voix contraires révéla son impuissance et son refus de les satisfaire. Nous nous proposons de contribuer à cette reconstruction du contexte politique et social des deux dernières décennies du Franquisme, puis des années de transition politique qui virent l'approbation par référendum du nouveau texte constitutionnel en 1978. Elle est consacrée à la trajectoire personnelle et politique de N.Sartorius, avocat, journaliste et dirigeant emblématique du syndicat Commissions Ouvrières et du PCE, dont l'engagement témoigne de la capacité de mobilisation de secteurs amples de la société espagnole et, plus spécifiquement, de l’élite sociale et intellectuelle dans la conquête et la construction de la démocratie. Son parcours reflète les avancées et des soubresauts que connurent l'Opposition et la construction démocratique du pays. A l’université il prit part au mouvement étudiant naissant et fut un des dirigeants du FLP. En 1962, il se trouvait dans les Asturies lorsque les grèves éclatèrent, et il y prit une part active via le cabinet de conseil juridique qu’il venait d’y ouvrir. Puis, dans les années 1960 et 1970, il contribua à développer et organiser le nouveau mouvement ouvrier, articulé par les CO. Ces Commissions devinrent progressivement un puissant mouvement structuré et coordonné au niveau national, qui s'asseyait à la table des négociations des accords collectifs et appelèrent à des centaines de grèves et de manifestations pour défendre les droits des travailleurs lorsqu'elles n'obtenaient pas satisfaction. D'abord tolérées par la Dictature qui ne savait comment réagir face à ce mouvement aux intentions clairement affichées, elle leur déclara une guerre sans merci lorsqu'elle prit toute la mesure de sa capacité de mobilisation et de nuisance. L’engagement de N. Sartorius le conduisit à être nommé membre du Comité Central puis du Comité Exécutif du PCE. Toutefois, cette activité subversive lui valut de passer 6 ans dans les geôles franquistes, parenthèse pendant laquelle la lutte prit d’autres formes. Enfin, tout au long de ces années il contribua au sein de prestigieuses revues d’information générale, légales mais en confrontation permanente avec la Dictature. Ce travail de sape au long cours contribua à fournir un arsenal rhétorique à l’opposition démocratique, mais aussi à entretenir et encourager l’engagement de la société civile. A la mort du Dictateur, un bras de fer s’engagea entre le Bunker et l’opposition démocratique, qui parvint à ouvrir la voie vers une transition démocratique. Restait à en définir le calendrier et à en négocier les termes, la légalisation des CO et du PCE, bêtes noires de la Dictature en étant des jalons essentiels. Enfin, N. Sartorius a conceptualisé et orienté l’opposition ouvrière, afin de lui donner les moyens de venir à bout de la Dictature et de permettre ensuite une véritable amélioration de leur condition, ce qui fait de lui l’intellectuel organique de ce nouveau mouvement ouvrier espagnol.