Thèse soutenue

Crise identitaire, dédoublement et folie : articulation littéraire et cinématographique de trois romans du XXe siècle. "La Belle image" de Marcel Aymé, "Le Locataire chimérique" de Roland Topor et "La Moustache" d’Emmanuel Carrère

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Auteur / Autrice : Ichrak Sghaier
Direction : Sylvie Camet
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Langues, Littératures et Civilisations
Date : Soutenance le 18/10/2021
Etablissement(s) : Université de Lorraine
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Humanités Nouvelles - Fernand Braudel (Lorraine)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Littératures, Imaginaire, Sociétés (Nancy)
Jury : Président / Présidente : Kristian Feigelson
Examinateurs / Examinatrices : Sylvie Camet, Isabelle Casta, Clara Debard
Rapporteurs / Rapporteuses : Kristian Feigelson, Isabelle Casta

Mots clés

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Mots clés contrôlés

Résumé

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Le phénomène fantastique est une agression du rationnel et de la logique. L’intrusion de l’incertitude vient déstabiliser l’univers du personnage. Il suscite chez lui de l’angoisse ; une forme de peur viscérale face à un événement inconnu et inexpliqué. La victime de ces événements est tiraillée entre une explication rationnelle des faits et une explication surnaturelle. Revenants, esprits, vampires, maisons hantées et créatures surnaturelles ont toujours alimenté les récits fantastiques du XIXe siècle. Mais le fantastique explore aussi les phénomènes de conscience et le thème de l’identité. Psychose, obsessions, folie, monomanie, paranoïa, la figure d’un double maléfique ou encore le dérèglement du comportement humain sont au cœur de la littérature fantastique.Le dédoublement identitaire suscite le doute et la confusion entre le réel et l’imaginaire, entre le concret et le fantasme, entre le songe et l’indéniable. Notre corpus sera composé de trois œuvres littéraires françaises du XXe siècle : La Belle Image de Marcel Aymé apparue en 1941, Le Locataire chimérique de Roland Topor publié en 1976 et La Moustache d’Emmanuel Carrère paru en 1986 – et de leurs adaptations respectives en 1951 par Claude Heymann, en 1976 par Roman Polanski et en 2005 par Carrère lui-même.Le Locataire chimérique relate l’aventure de Trelkovsky, nouveau locataire dans un immeuble parisien qui semble calme et tranquille, qui sera la victime de persécutions de la part de ses voisins. Les harcèlements lui font peu à peu perdre la raison. Trelkovsky s’identifie, d’une manière morbide, à Simone Choule, l’ancienne locataire de l’appartement qu’il occupe, qui s’est défenestrée. Il finira par se transformer totalement en elle (déguisement, perruque, maquillage…) et à reproduire son suicide.La Moustache de Carrère s’ouvre sur une scène de rasage assez banale et routinière. La situation connaîtra un glissement troublant et progressif quand le protagoniste décide de se raser la moustache. Le doute et la paranoïa s’installent lorsque personne ne semble remarquer cette différence, encore pire lorsque sa femme et son groupe d’amis lui affirment qu’il n’a jamais porté une moustache. Toutes ses certitudes et tous ses repères se désagrègent. Le protagoniste finira par douter de sa propre existence.Dans La Belle image, le trouble identitaire s’exprime par la métamorphose du modeste Raoul Cérusier en Roland Colbert ; une image améliorée de lui-même. Il préserve cependant son identité intérieure et cherche vainement à concilier sa nouvelle image avec son identité première.Ces œuvres ont en commun l’expérience psychologique déviante des protagonistes. Elles explorent les phénomènes de conscience, le thème de l’identité, le dérèglement du comportement humain et la modification du rapport au réel. Les protagonistes sont victimes d’une forme insidieuse et fallacieuse de la déformation du moi. Ce thème suscite l’angoisse parce qu’il sous-entend une dépossession identitaire et une perte de soi. Notre recherche se penchera sur l’examen des différentes formes de la fragmentation de l’identité personnelle dans la littérature et au cinéma. À travers cette étude pluridisciplinaire, nous verrons comment ce thème se déploie et comment il est traité dans les deux disciplines.Nous essaierons de chercher des échos entre la littérature et le cinéma et de montrer comment cette interaction a permis d’enrichir les deux arts. Le récit fantastique foisonne de dialogues introspectifs, de monologues et de pensées complexes difficiles à transcrire sur l’écran sans qu’ils perdent leur part de mystère. Quels sont les procédés qu’utilise le cinéma pour préserver le mystère propre au fantastique en traduisant le récit écrit en récit imagé ? Fiction littéraire, philosophie et psychanalyse réfléchissent aux mêmes questions relatives à la condition humaine et notamment sur la mort, le rapport au réel, l’identité. Comment sont corrélées ces trois champs de la connaissance ?