Thèse soutenue

Politique du héros chrétien dans "Clovis" (1657) de Desmarets de Saint-Sorlin et "Saint Louis" (1658) de Pierre Le Moyne

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Auteur / Autrice : Lucien Wagner
Direction : Alain Génetiot
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Langues, Littératures et Civilisations
Date : Soutenance le 03/12/2021
Etablissement(s) : Université de Lorraine
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Humanités Nouvelles - Fernand Braudel (Lorraine)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Littératures, Imaginaire, Sociétés (Nancy)
Jury : Président / Présidente : Béatrice Guion
Examinateurs / Examinatrices : Alain Génetiot, Delphine Reguig, Bernard Teyssandier, Bruno Méniel, Stefano Simiz
Rapporteurs / Rapporteuses : Delphine Reguig, Bernard Teyssandier

Résumé

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Les poèmes héroïques parus en France dans les années 1650 ont longtemps passé pour de pâles imitations d’Homère, de Virgile et de la Jérusalem délivrée. La présente étude tente de restituer ce corpus poétique à son contexte littéraire et politico-culturel propre, afin d’en dégager une nouvelle compréhension, en comparant les deux épopées qui mettent en scène le personnage du Roi de France en héros épique, Clovis (1657) de Desmarets de Saint-Sorlin et Saint Louis (1658) de Pierre Le Moyne. C’est la poétique du Tasse, fondée sur l’ambition d’adapter l’épopée à l’époque moderne, par l’adoption du merveilleux chrétien vraisemblable et du thème de la croisade médiévale, qui inspire cette génération de poètes français. Mais, en France, ce nouveau modèle de protagoniste épique, guerrier magnanime et généreux, s’accorde mal avec l’image dévot du « prince chrétien » de la Contre-Réforme catholique. De plus, cette synthèse entre elle-même en conflit avec la figure du « Prince absolu », incarnation de la souveraineté conceptualisée, à l’époque de la raison d’État, dans le sillage de Jean Bodin, exigeant une obéissance immédiate, qui émerge dans le royaume après les déchirements des guerres de Religion du xvie siècle. Le poème héroïque français des années 1650 se caractérise donc par un nœud de tensions axiologiques entre plusieurs idéaux régulateurs : héroïsme épique d’essence aristocratique, politique royale absolutiste, et sainteté chrétienne post-tridentine. Cette fiction politique se présente en fin de compte comme une « machine à penser sans concepts », qui tente de colmater les brisures de l’histoire et de résoudre les antinomies théologico-politiques de la première modernité, en produisant une synthèse axiologique complexe et instable. C’est la fragilité même de cette construction qui a rendu sa réception difficile dès que la configuration anthropologico-historique qui lui avait donné naissance eut évolué, et a compromis la lisibilité de ce corpus.