Mécanismes neuronaux des choix fondés sur la valeur : études électrophysiologiques et de stimulation intracérébrale chez les humains
Auteur / Autrice : | Romane Cecchi |
Direction : | Julien Bastin |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences cognitives, psychologie et neurocognition |
Date : | Soutenance le 10/11/2021 |
Etablissement(s) : | Université Grenoble Alpes |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale ingénierie pour la santé, la cognition, l'environnement (Grenoble ; 1995-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut des neurosciences de Grenoble |
Jury : | Président / Présidente : Emmanuel Procyk |
Examinateurs / Examinatrices : Julien Bastin, Catherine Tallon-Baudry, Alizée Lopez | |
Rapporteur / Rapporteuse : Lesley Fellows, Stefano Palminteri |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
L’identification des facteurs dont les fluctuations sont associées à des choix incohérents est un enjeu majeur pour la théorie de la décision rationnelle. Dans cette thèse, nous avons étudié comment l’activité cérébrale peut contribuer à expliquer la variabilité des choix lors d’une tâche de choix multi-attributs en profitant de la possibilité rare d’enregistrer l’activité intra-corticale du cerveau humain ou de réaliser des stimulations intra-corticales pour sonder l’implication causale de régions corticales clés. Dans la première étude, nous avons examiné les mécanismes neuro-computationnels par lesquels les fluctuations de l’humeur peuvent influencer le comportement de choix humain. Nos résultats ont montré que 1) une activité gamma large bande (BGA) élevée dans le cortex préfrontal ventromédian (vmPFC) et l’insula antérieure dorsale (daIns) signalait respectivement les périodes d’humeur élevée et faible, et 2) qu’une activité BGA élevée dans le vmPFC et le daIns favorisait et tempérait respectivement la prise de risque en surpondérant les perspectives de gain/perte monétaires. Ainsi, ces observations révèlent que les feedbacks induisent des états cérébraux qui correspondent à différentes humeurs et biaisent la comparaison des options sûres et risquées. Plus généralement, cette première étude pourrait expliquer pourquoi les personnes qui expérimentent des événements positifs (ou négatifs) dans une partie de leur vie ont tendance à s’attendre à un succès (ou un échec) dans une autre. Dans la deuxième étude, nous nous sommes concentrés sur les corrélats neuroanatomiques qui sous-tendent les effets des fixations visuelles sur le choix en collectant simultanément les données d'EEG intracérébral avec des données de fixations oculaires pendant que les participants effectuaient une tâche de choix multi-attributs risquée. Les résultats de cette deuxième étude ont montré que 1) l’activité neuronale (BGA) dépendant du regard est corrélée positivement avec la valeur d’un attribut donné lorsqu’il est fixé et négativement avec la valeur de celui-ci lorsqu’il n’est pas fixé et ce, dans un large réseau cérébral, 2) l’activité neuronale dépendant du regard dans le vmPFC permet de prédire les choix risqués des sujets lorsqu’ils regardent les gains et 3) l’activité neuronale dépendant du regard dans l’aIns permet de prédire les choix vers l’option sûre lorsque les sujets regardent les pertes. Ainsi, nos résultats permettent de clarifier des éléments neuroanatomiques clés sur la façon dont l’attention visuelle interfère avec l’activité neuronale pour moduler nos choix. Enfin, dans la troisième étude de cette thèse, nous avons étudié l’effet de la perturbation ciblée du cortex insulaire antérieur et du vmPFC sur les choix risqués. L’effet de la stimulation électrique intracrânienne (iES) délivrée directement dans le cortex humain à 50 Hz chez un groupe de patients épileptiques (n = 13) a été examiné pendant que les sujets effectuaient une tâche de choix similaire à celle utilisée dans les deux études précédentes. Les résultats ont montré une dissociation fonctionnelle au sein de l’insula antérieure : la stimulation de l’insula antérieure dorsale (daIns) augmentait les choix risqués tandis que la stimulation de l’insula antérieure ventrale (vaIns) favorisait les choix plus sûrs. À l’inverse, la stimulation du vmPFC a eu tendance à favoriser la prise de risque (comme le daIns). Ces données exceptionnelles soulignent l’importance causale de ces zones cérébrales lors de choix multi-attributs impliquant une incertitude et fournissent des indices pour de futures études mécanistiques de l’anatomie et de la physiologie des choix. Dans l’ensemble, cette thèse a permis de mieux comprendre les mécanismes neuro-computationnels qui sous-tendent les choix multi-attributs en suggérant que des systèmes cérébraux dissociés pourraient être impliqués dans la représentation de la valeur des attributs appétitifs ou aversifs avant et pendant le processus de choix.