Copie et culte : le Suaire du Christ, une image-relique reproductible du XIVe au XVIe siècle
Auteur / Autrice : | Nicolas Sarzeaud |
Direction : | Étienne Anheim, Pierre-Olivier Dittmar |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Histoire (option : histoire de l'art) |
Date : | Soutenance le 25/11/2021 |
Etablissement(s) : | Paris, EHESS |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales |
Jury : | Président / Présidente : Laurence Rivière Ciavaldini |
Examinateurs / Examinatrices : Laurence Rivière Ciavaldini, Michelle Fournié, Anne Lepoittevin, Andrea Nicolotti |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Au XIVe siècle, une « représentation du Suaire du Christ » apparaît en Champagne : si l’image s’inscrit dans la tradition des empreintes du Christ imprimées dans des linges, cette désignation interroge. Où se trouve ce Suaire, présenté au singulier comme s’il n’y en avait qu’un seul, mais dont, au même moment, plus d’une centaine de sanctuaires revendiquent posséder des reliques ? Pendant ce siècle en particulier, plusieurs nouveaux Suaires s’affirment dans le Midi de la France, occasionnant un procès entre deux d’entre eux, Toulouse et Carcassonne, en 1402. Comment s’articulent l’unicité idéale du Suaire du Christ, que travaillent les textes et les images, et la multiplicité des reliques du Suaire ? L’exemplaire champenois, transféré à Chambéry en 1453, devient une relique de la Passion, dont les images se multiplient sur l’axe Flandres-Alpes au début du XVIe siècle ; parmi elles, plusieurs se présentent comme des images faites « à la remembrance du Suaire du Christ », ou, dit autrement, des fac-similés. La pratique de vénérer une image à travers une reproduction fidèle témoigne de l’importance croissante accordée à la singularité de ces images-reliques, mais certaines reproductions, comme le Suaire de Besançon, s’émancipent et sont montrées elles aussi comme d’authentiques reliques de la Passion. Peut-on être à la fois une copie et une relique ? Quelles relations entretiennent ces cultes jumeaux ? Comment cette économie inflationniste des Suaires évolue-t-elle au moment où se met en place un régime de singularité des images, mais où se développe aussi la Réforme ? En effet, les Suaires prospèrent dans des espaces géographiques où se développent le protestantisme, s’attaquant aux reliques et à leur multiplicité jugée invraisemblable. Les Suaires triomphent à l’époque tridentine, avec des dizaines de copies diffusées dans les réseaux des ducs de Savoie et des Habsbourg, mais qui, dès lors, ne deviennent plus des reliques.Cette étude porte sur les conditions d’existence d’une image-relique ubiquitaire, entre le XIVe siècle et le XVIe siècle, c’est-à-dire entre l’apparition des premiers cas de fac-similés et la mise en ordre de cette pratique après le concile de Trente : nous voulons utiliser le cas du Suaire du Christ pour mettre en évidence une mutation de la reproductibilité des images-reliques entre la fin du Moyen Âge et la première Modernité.