La sidération des formateurs, un analyseur de l’institutionnalisation de la réingénierie de la formation infirmière de 2009.

The sideration of Trainers, a 2009 Nursing Education Reengineering Institutionalization Analyzer.

• Auteur / Autrice : Catherine Aubouin
• Direction : Gilles Monceau, Caroline Le Roy
• Type : Thèse de doctorat
• Discipline(s) : Sciences de l'éducation
• Date : Soutenance le 14/12/2021
• Etablissement(s) : CY Cergy Paris Université
• Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Education, Didactique, Cognition (Cergy-Pontoise, Val d'Oise)
• Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Ecole, mutations, apprentissages (2010-)
• Jury : Président / Présidente : Arnaud Dubois
• Jury : Examinateurs / Examinatrices : Gilles Monceau, Caroline Le Roy, Joris Thievenaz, Patricia Bessaoud-Alonso, Cinira Magali Fortuna
• Jury : Rapporteur / Rapporteuse : Joris Thievenaz, Patricia Bessaoud-Alonso

Mots clés

Mots clés contrôlés

Soins infirmiers -- Étude et enseignement

Mots clés libres

Réflexivité

Analyse institutionnelle

Psychanalyse

Sidération

Institutional analysis

Reflexivity

Collaborative research

Sideration

Résumé

Les mutations profondes du monde de la santé et de l'enseignement supérieur impactent les professionnels de santé dans leur quotidien de travail, dans la gestion de leur carrière, ainsi que dans les modalités de leurs formations actuelles et future. En 2009, la réingénierie de la formation infirmière, réinterroge le partage des responsabilités entre les différents espaces de formation. Les tensions en jeu dans l’évolution du dispositif de formation provoquent chez les formateurs infirmiers un décalage important entre la manière dont ils conçoivent leur travail au quotidien et la (re)construction en cours de leur monde professionnel. Ces évolutions semblent provoquer de véritables paradoxes générant un effet de sidération qui empêche toute capacité réflexive. Un retour socio-historique sur la genèse de la profession infirmière fait cependant apparaitre que cet empêchement à penser était déjà présent aux origines du métier, et qu’il persiste jusque dans son processus de professionnalisation. Chaque crise vécue par la profession semble le réactualiser d’une manière nouvelle. C’est le cas avec la réingénierie de la formation dont cette recherche doctorale tente d’analyser les effets sur les sujets en charge de la mettre en œuvre. La posture de praticien-chercheur, adoptée dans cette recherche doctorale, diffère de celle de praticien réflexif (Schön, 1983) promue dans la formation infirmière. Plus qu’une « réflexivité sur soi du praticien » (Perrault Soliveres, 2001), qu’une capacité du praticien à « penser contre soi » (Bourgeois, 2003), c’est un véritable statut assumé (Khon, 1986) qui caractérise la praticienne-chercheuse que je suis dans le contexte d’universitarisation des études infirmières. Ma recherche s’inscrit dans le cadre théorique de l’analyse institutionnelle (Lourau, 1997), qui invite à l’analyse de mes implications (Monceau, 2010) afin de penser les « positions enchevêtrées » (Kohn, 2001) du « doctorant-praticien-chercheur » (Saint Martin (de) et al, 2014), d’une part et dans un cadre d’orientation psychanalytique autorisant à la fois « qu’une perturbation soit créée en [moi]» (Devereux, 1994) et l’analyse des « effets sur soi » (Roussillon, 2003) provoqués par le fait de mener ce travail dans mon propre cadre professionnel d’autre part. Cette démarche multiréférentielle (Ardoino, 1993) me place dans un entre-deux, pensé comme créatif, qui s’actualise dans une pluralité de dispositifs cliniques de recherche. C’est ainsi que j’ai souhaité observer et interroger les effets de sidération sur les formateurs et formatrices vivant la mise en œuvre de la réingénierie des études. La question se pose en effet de savoir comment ce que les infirmières ont incorporé de leur histoire les prédisposent à entendre cette nouvelle injonction au changement se traduisant par une universitarisation de la formation dans le contexte de la Nouvelle gestion publique qui bouleverse le cadre juridique et institutionnel du monde de la santé. Au final, cette recherche doctorale montre que ces transformations affectent non seulement le rapport au savoir des formateurs en soins infirmiers, mais aussi leur rapport à l'expérience du métier et à sa transmission. Elle interroge certaines formes de déliaison dans le processus de transmission du métier et la réactualisation d’un empêchement à penser au moment même où la réflexivité est promue comme principe central de la formation. Elle traite la sidération en analyseur de la violence vécue par les professionnels de la formation infirmière, qu’ils soient formateurs en IFSI ou bien tuteurs de stage accueillant les étudiants en soins infirmiers dans les services de soins. Par l’attention portée, à certains moments-clefs, aux effets de cette recherche sur les différents participants, cette démarche initie enfin un possible dépassement de la sidération. Il s’agit ainsi de penser un autre possible que le « fatalisme institué » qui semble frapper la profession infirmière en France.

The profound changes in the world of health and higher education have an impact on health professionals in their daily work, in the management of their careers, and in the modalities of their current and future training. In 2009, the reengineering of nursing education reexamines the sharing of responsibilities between the different training areas. The tensions involved in the evolution of the training system are causing a significant gap between the way in which nursing trainers conceive of their daily work and the ongoing (re)construction of their professional world. These developments seem to provoke real paradoxes that generate an effect of stupefaction that prevents any reflexive capacity. However, a socio-historical review of the genesis of the nursing profession reveals that this impediment to thinking was already present at the origins of the profession, and that it persists right up to its professionalization process. Each crisis experienced by the profession seems to update it in a new way. This is the case with the reengineering of training, the effects of which this doctoral research attempts to analyze on the subjects in charge of implementing it. The posture of practitioner-researcher, adopted in this doctoral research, differs from that of reflective practitioner (Schön, 1983) promoted in nursing education. More than a ''reflexivity on oneself of the practitioner'' (Perrault Soliveres, 2001), than a capacity of the practitioner to ''think against oneself'' (Bourgeois, 2003), it is a real assumed status (Kohn, 1986) that characterizes the practitioner-researcher that I am in the context of the universitarization of nursing studies. My research falls within the theoretical framework of institutional analysis (Lourau, 1997), which invites the analysis of my implications (Monceau, 2010) in order to think about the ''entangled positions'' (Kohn, 2001) of the ''doctoral practitioner-researcher'' (Saint Martin (de) et al., 2014), on the one hand, and within a psychoanalytically oriented framework allowing both ''a disturbance to be created in [me]'' (Devereux, 1994) and the analysis of the ''effects on oneself'' (Roussillon, 2003) caused by the fact of carrying out this work in my own professional setting on the other. This multi-referential approach (Ardoino, 1993) places me in an in-between, thought of as creative, which is actualized in a plurality of clinical research devices. This is how I wished to observe and question the effects of disorientation on trainers living the implementation of the reengineering of studies. The question arises as to how what nurses have incorporated from their history predisposes them to hear this new injunction to change, which translates into a universalization of training in the context of the New Public Management, which is disrupting the legal and institutional framework of the health world. In the end, this doctoral research shows that these transformations affect not only the relationship to knowledge of nursing trainers, but also their relationship to the experience of the profession and its transmission. It questions certain forms of delinking in the process of transmission of the profession and the re-actualization of an impediment to thinking at the very moment when reflexivity is promoted as a central principle of training. It treats the sideration as an analyzer of the violence experienced by professionals in nursing training, whether they are trainers in the IFSI or tutors welcoming nursing students in the care services. By paying attention, at certain key moments, to the effects of this research on the various participants, this approach finally initiates a possible overcoming of the sideration. It is thus a question of thinking about another possibility than the ''instituted fatalism'' that seems to strike the nursing profession in France.