Thèse soutenue

Virus Herpès Simplex de type 1 : une cible potentielle pour la prévention de la maladie d’Alzheimer ?

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Auteur / Autrice : Morgane Linard de Guertechin
Direction : Catherine Helmer
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Santé publique Epidémiologie
Date : Soutenance le 29/03/2021
Etablissement(s) : Bordeaux
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sociétés, politique, santé publique (Talence, Gironde ; 2011-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Bordeaux population Health
Jury : Président / Présidente : Christophe Tzourio
Examinateurs / Examinatrices : Catherine Helmer, Christophe Tzourio, Claudine Berr, Tamas Fülöp, Alberto-Luis Epstein
Rapporteurs / Rapporteuses : Claudine Berr, Tamas Fülöp

Mots clés

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Résumé

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Malgré de nombreuses avancées concernant la compréhension des mécanismes impliqués dans la maladie d’Alzheimer (MA), son étiologie précise reste inconnue aujourd’hui. Cependant, un nombre croissant d’articles suggèrent que l’implication du virus Herpès Simplex de type 1 (HSV-1) pourrait expliquer à la fois les séquences topographique et temporelle ainsi que le type d’atteintes retrouvées dans la MA. En effet, HSV-1 est un virus neurotrope retrouvé dans le cerveau de personnes âgées et présentant un tropisme particulier pour les zones impliquées dans la MA. Il est également capable de se propager de cellules en cellules. Durant la vie, HSV-1 reste à l’état latent dans le corps et est capable de se réactiver périodiquement. Avec l’avancée en âge, le déclin du système immunitaire pourrait permettre la survenue de réactivations plus fréquentes et/ou plus intenses du virus, expliquant ainsi potentiellement la survenue tardive et progressive de la MA. De plus, les principaux marqueurs anatomopathologiques de la MA (lésions amyloïde, tau, neuroinflammation) peuvent être induits in vitro et chez l’animal par l’inoculation du virus HSV-1 et l’accumulation du peptide aβ pourrait être due à son implication dans la défense antimicrobienne. Dans cette thèse, afin de tester cette hypothèse, nous avons dans un premier temps évalué l’association entre les données de sérologies anti-HSV et différents marqueurs de la MA en fonction de la présence de l’allèle APOE4, facteur de risque génétique de MA semblant moduler l’effet du virus sur le cerveau. En effet, la présence de facteurs de susceptibilité, notamment génétiques, permettrait d’expliquer pourquoi, malgré une séroprévalence d’approximativement 80%, certains sujets infectés restent « porteurs sains » tandis que d’autres développent la maladie. Dans les cohortes Trois Cités Bordeaux et AMI (Aging Multidisciplinary Investigation), nous avons ainsi mis en évidence que, parmi les sujets porteurs de l’allèle APOE4, les sujets infectés avaient 2 fois plus de risque de développer une MA par rapport aux non-infectés et 3 fois plus s’ils présentaient un taux d’IgG anti-HSV élevé (reflet possible de réactivations virales plus fréquentes au cours du temps) ; à l’inverse, aucune association n’était retrouvée chez les non-porteurs d’APOE4. Les sujets infectés avaient également plus d’altérations de la microstructure de la substance blanche au niveau du cingulum et du fornix para-hippocampiques que les sujets non infectés et, pour ceux ayant un taux d’IgG élevé, ils présentaient également un volume hippocampique plus faible. Paradoxalement, au sein de l’essai MAPT (Multidomain Alzheimer Preventive Trial), nous avons mis en évidence que, parmi les porteurs de l’allèle APOE4, les sujets infectés (et particulièrement ceux ayant un taux élevé d’IgG) avaient significativement moins de dépôts amyloïdes que les non-infectés tandis qu’aucune association n’était retrouvée chez les sujets non-porteurs d’APOE4. Ce résultat, bien qu’allant dans le sens inverse de celui attendu, pourrait potentiellement être expliqué par un biais de sélection des sujets inclus dans l’essai. Enfin, grâce aux données de 68 291 sujets âgés issus de l’Echantillon Généraliste des Bénéficiaires suivis entre 2009 et 2017, nous avons mis en évidence que la prise d’au moins un anti-herpétique à action systémique était associée à une diminution de 15% du risque de développer une MA. Malgré un nombre faible de participants avec une prise régulière durant le suivi, cette association pourrait refléter un effet protecteur du traitement, en particulier si l’on considère la possibilité d’un traitement plus régulier durant la période de vie précédant l’inclusion. Au total, si nos résultats semblent en faveur de l’implication du virus HSV-1 dans la MA, de nombreuses questions restent encore en suspens pour confirmer cette hypothèse et son potentiel en termes de prévention.