Thèse soutenue

Auto-organisation de l’activité contractile et des écoulements cytoplasmiques chez l’organisme modèle Physarum polycephalum

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Auteur / Autrice : Valentin Busson
Direction : Marc Durand
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Physique. Biophysique
Date : Soutenance le 15/12/2020
Etablissement(s) : Université Paris Cité
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Physique en Île-de-France (Paris ; 2014-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire Matière & Systèmes Complexes (Paris ; 2001-....)
Jury : Président / Présidente : José Halloy
Examinateurs / Examinatrices : Sylvie Lorthois, Jean-Paul Rieu, Francis Corson, Philippe Marmottant, Audrey Dussutour
Rapporteur / Rapporteuse : Sylvie Lorthois, Jean-Paul Rieu

Résumé

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La génération d’écoulements sur de grandes distances est cruciale pour le fonctionnement de nombreux organismes vivants. Un mécanisme très répandu pour générer de tels écoulements est via la contraction du cortex d’actomyosine pompant le fluide environnant. Même en l’absence d’un “stimulateur” tel que le cœur, on constate que la dynamique du cortex d’actomyosine peut s’auto-organiser pour donner lieu à des écoulements coordonnés sur de grandes distances.À l'instar de E. coli ou C. elegans, Physarum polycephalum fait partie des organismes modèles intensément étudiés par la communauté scientifique. Dans sa phase végétative, appelé plasmode, cet organisme est constitué de milliers de cellules indifférenciées qui ont fusionné pour former une cellule géante multinucléée pouvant atteindre des tailles macroscopiques (plusieurs dizaines de cm²). Cet organisme développe alors un réseau tubulaire dans lequel des écoulements oscillants sont générés par la contraction active de la couche membraneuse entourant les éléments tubulaires. Le rôle de ce réseau de transport est double : d’une part il supplée aux écoulements diffusifs qui sont trop faibles pour transporter les nutriments et les divers signaux biochimiques sur de telles échelles. D’autre part il permet de transporter la masse corporelle de l’organisme en jouant sur la transition sol-gel du cytoplasme.P. polycephalum apparaît donc comme l’un des organismes les plus simples pourvu d’un réseau de transport. En dépit de cette apparente simplicité, la formation de ce réseau tubulaire partage de nombreux points communs avec le développement du réseau vasculaire d’organismes plus évolués, ou celui conduisant à l’irrigation de tumeurs. En particulier, on peut identifier clairement deux phases dans le développement du réseau : tout d’abord une phase de croissance d’un réseau primaire densément réticulé, puis une phase de réorganisation au cours de laquelle le réseau primaire se hiérarchise, certaines veines grossissant au dépend d’autres qui disparaissent. D’un point de vue physique, le plasmodium se comporte comme un gel actif, qui aux temps courts génère des ondes de contraction induisant les mouvements péristaltiques du fluide, et aux temps longs contrôle sa transition sol-gel pour croître, se mouvoir, et modifier l’architecture de son réseau.Ce travail de thèse porte sur la caractérisation de l’activité contractile chez P. polycephalum, et de son couplage avec les écoulements cytoplasmiques traversant le réseau (aux temps courts) et de l’évolution de celui-ci (aux temps longs). L'adaptation non-neurale de l'activité contractile et des écoulements à l’environnement extérieur (via une boucle de rétroaction inconnue) est soupçonnée d’être à l'origine de la capacité de l'organisme à réaliser des tâches complexes telles que la migration préférentielle ou le calcul des plus courts chemins entre des sources de nourritures. La caractérisation de la nature de ce mécanisme auto-organisateur inconnu constitue donc un pas vers la compréhension de l’émergence de la cognition animale. À l’aide d’un dispositif d’imagerie en transmission, j’ai caractérisé les motifs contractiles observés dans des phases de stagnation et de croissance du plasmode, et montré que cette dernière nécessite une coordination de l’activité contractile sur de grandes distances de la part de l’organisme, pourtant dépourvu de cœur et de système nerveux.Puis, dans un travail mêlant expériences et modélisations, j’ai mis en évidence l’effet du confinement spatial sur l’activité contractile, sur les écoulements que celle-ci génère au sein du cytoplasme et sur la réorganisation du réseau tubulaire.Enfin, à partir des observations de réorganisation et de l'analyse numérique des réseaux tubulaires formés je propose un modèle de hiérarchisation de réseaux dont le principe repose sur la minimisation de la dissipation visqueuse due aux écoulements.