Traitements maternels au long cours et développement foeto-placentaire : impact des inhibiteurs de protéases anti-VIH sur la fonction endocrine placentaire, in vitro
Auteur / Autrice : | Camille Fraichard |
Direction : | Jean Guibourdenche |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Biologie cellulaire et moléculaire |
Date : | Soutenance le 03/12/2020 |
Etablissement(s) : | Université Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Bio Sorbonne Paris Cité (Paris ; 2014-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Physiopathologie & pharmacotoxicologie placentaire humaine (Microbiote pré & post natal ; Paris ; 2014-....) |
Jury : | Président / Présidente : Marie-Noëlle Dieudonné |
Examinateurs / Examinatrices : Marie-Noëlle Dieudonné, Michaël Schumacher, Séverine Mazaud-Guittot, Ioana Ferecatu, Jeanne Sibiude | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Michaël Schumacher, Séverine Mazaud-Guittot |
Mots clés
Résumé
Le nombre de grossesse se déroulant dans un contexte de traitement maternel au long cours, notamment pour les antirétroviraux (ARV) contre l'infection par le Virus de l'Immunodéficience Humaine (VIH), augmente constamment. Des études ont montré que ces traitements entrainaient des complications obstétricales, des fausses couches et des naissances prématurées. D'autres ont établi que les traitements anti-VIH, notamment les inhibiteurs de protéases (IP), altéraient la production d'hormones stéroïdes à la fois chez la mère et le fœtus. Les mécanismes intracellulaires responsables de ces altérations restent mal connus et peu de choses a été décrit au niveau du placenta humain, alors que la fonction endocrine placentaire est indispensable au bon déroulement de la grossesse. La production des hormones placentaires comme l'hormone chorionique gonadotrope humaine (hCG) et la progestérone (P4) est assurée le tissu trophoblastique villeux au sein de la villosité choriale, principalement le syncytiotrophoblaste (ST). Le ST qui est en contact direct avec le sang maternel, résulte de la différenciation des cytotrophoblastes villeux (CTV), processus que nous savons reproduire in vitro au laboratoire. Nous postulons que les complications des grossesses sous ARV impliquent pour partie, une altération de la différenciation morphologique et fonctionnelle du trophoblaste villeux. Notre premier objectif a été de caractériser la stéroïdogenèse placentaire sur culture primaire de trophoblastes villeux humain normaux à terme, et ce dès le stade CTV. Nous avons développé les outils pour évaluer au cours de la différenciation trophoblastique, la sécrétion des principales hormones placentaires (hCG, P4, oestradiol [E2]) dans les surnageants de culture par immunodosages et spectrométrie de masse, et leur synthèse (analyse des partenaires cellulaires impliqués en terme de transcrits et protéines, organelles cellulaires concernés). Le second objectif a été d'étudier in vitro l'impact des principaux IP prescrits (ritonavir et lopinavir) sur cette différenciation, les mécanismes et organelles intracellulaires affectés. Nous nous sommes focalisés sur la progestérone, la mitochondrie et sur deux voies de signalisation, la voie « Unfolded Protein Response » et la voie AMPc/PKA. Nous avons montré que la stéroïdogenèse placentaire n'était pas l'apanage du seul ST mais débutait dès le stade CTV. Le CTV exprime les partenaires clés de la synthèse de P4 à savoir le transporteur du cholestérol (MLN64) et les enzymes (P450SCC et HSD3B1). Leur expression augmente avec la différenciation morphologique des CTV en ST et s'accompagne d'une augmentation de la sécrétion de P4. Cette augmentation est corrélée à celle de la sécrétion d'hCG, suggérant une inter-régulation entre hCG et P4 dans ce processus de différenciation. Nous avons ensuite montré que parmi les 2 principaux IP étudiés, seul le lopinavir altérait la différenciation dès la dose de 10 uM. On observe en effet sur le plan morphologique une diminution de la fusion des CTV pour former du ST, qui s'accompagne d'une diminution de la sécrétion d'hCG. La production de P4 est aussi diminuée tant en terme de sécrétion que de synthèse (diminution de l'expression de P450SCC et HSD3B1). Le LPV altère la structure et la dynamique de fusion/fission des mitochondries avec une diminution de l'expression de la protéine Mfn2. Le LPV induit un stress du RE avec activation de la voie UPR IRE1a. Ainsi, nous avons établi que le trophoblaste villeux humain normal à terme était capable dès le stade CTV in vitro, de produire de l'hCG mais aussi de la P4, et que cette production augmentait avec sa différenciation en ST. Le LPV altère cette différenciation et impacte la mitochondrie et le RE. Il en résulte une diminution de la production de P4 et d'hCG, hormones indispensables à la grossesse, qui pourrait expliquer les complications obstétricales des patientes HIV+ traitées comme la prématurité et les fausses couches.