Biomarqueurs innovants du rejet en allogreffe rénale : transfert de la recherche à l'utilisation clinique et apports physiopathologiques
Auteur / Autrice : | Claire Tinel |
Direction : | Dany Anglicheau |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Biologie cellulaire et moléculaire |
Date : | Soutenance le 28/09/2020 |
Etablissement(s) : | Université Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Bio Sorbonne Paris Cité (Paris ; 2014-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut Necker Enfants-Malades (Paris ; 2014-....) |
Jury : | Président / Présidente : Christophe Legendre |
Examinateurs / Examinatrices : Christophe Legendre, Pierre Galichon, Oriol Bestard, Sophie Brouard, Pierre Marquet, Maarten Naesens, Sophie Caillard | |
Rapporteur / Rapporteuse : Pierre Galichon, Oriol Bestard |
Mots clés
Résumé
Les avancées technologiques ont permis l'avènement de biomarqueurs innovants pour l'évaluation des lésions du greffon rénal. Toutefois, notre raisonnement médical pour décider d'une biopsie repose toujours sur des données biologiques conventionnelles peu performantes. Au cours de ce travail de thèse, nous avons émis l'hypothèse que le préalable au transfert des biomarqueurs de la recherche vers la clinique était la robustesse de la sélection des candidats puis leur intégration dans des modèles multiparamétriques validés montrant un bénéfice clinique net. Certains biomarqueurs étant des acteurs de la réponse immunitaire alloimmune, nous avons postulé que la découverte de signatures moléculaires diagnostiques du rejet pouvait apporter de nouvelles hypothèses physiopathologiques. Dans un premier travail, nous avons optimisé l'utilisation des chimiokines urinaires CXCL9 et CXCL10 pour le diagnostic non-invasif du rejet aigu. L'expression de ces cytokines chimiotactiques est augmentée dans les urines des patients au cours du rejet aigu, mais également lors des infections urinaires (IU) ou de la réplication du BK virus (BKV) pouvant constituer des facteurs de confusion. Nous avons mesuré les protéines CXCL9 et CXCL10 dans 391 échantillons urinaires, prélevés concomitamment d'une biopsie du greffon, d'un examen cytobactériologique des urines et d'une charge virale sanguine du BK virus. Les concentrations urinaires de CXCL9 et CXCL10 étaient augmentées en cas d'IU, de même qu'en cas virémie à BKV, associée ou non à une néphrite virale (P<0.001). Les chimiokines urinaires et leurs facteurs de confusion ont ensuite été inclus dans un modèle comportant 8 variables (âge et sexe du receveur, débit de filtration glomérulaire, anticorps anti-HLA spécifiques du donneur [DSAs, donor specific antibodies], IU, charge virale sanguine du BKV, CXCL9 et CXCL10), discriminant le rejet aigu avec une aire sous la courbe (AUC, area under the curve) de 0.85 (IC 95% : 0.80-0.89). Après validation interne (calibration, analyse de sensibilité) et externe dans 2 cohortes indépendantes, une analyse de courbe de décision a été réalisée montrant le bénéfice clinique du modèle. Dans un deuxième travail, nous avons quantifié l'expression sanguine de microARN (miARN) qui ont pour fonction la régulation post-transcriptionnelle de l'expression des ARN messages (ARNm). Dans le cadre de l'étude européenne BIOMARGIN, 754 miARN candidats ont été quantifiés dans 126 échantillons (Step 1). Les 141 miARN les plus performants ont été quantifiés dans les 136 échantillons de la seconde cohorte cas-témoins (Step 2) pour développer une signature diagnostique du rejet aigu humoral (RAH) associant 3 miARN (miR-15b, miR-106a, miR-374a). Ses performances ont été validées sur une cohorte prospective non sélectionnée (Step 3, n=444 échantillons, AUC=0.70). Puis la signature miARN a été combinée à la protéinurie et aux DSAs pour obtenir un modèle de diagnostic du RAH avec une AUC à 0,85 (IC 95% : 078-0.93, P<0.0001). L'expression des 3 miARN était diminuée en cas de RAH suggérant une augmentation des gènes cibles de leur régulation. Nous avons montré que 24% des gènes fortement augmentés en cas de RAH (transcriptomique sanguine globale issue de la Step 1) étaient régulés par 1 des 3 miARN. L'analyse in silico suggérant un enrichissement dans les voies de signalisation associées aux cellules myéloïdes, nous avons confirmé in vitro que les 3 miARN étaient principalement exprimés par les monocytes classiques. Ce travail a permis de définir les facteurs confusion à l'utilisation des chimiokines urinaires pour le diagnostic non invasive du rejet aigu, et de démontrer pour la première fois comment leur intégration dans un modèle multiparamétrique pourrait permettre leur adoption en clinique. De plus, l'identification d'une signature miARN d'origine monocytaire au cours du RAH, suggère leur implication physiopathologique au-delà de leur potentiel comme biomarqueurs.