Thèse soutenue

Réduire l'aversion pour l'incertitude au procès pénal : approche stratégique et probabiliste du faisceau d'indices dans l'investigation criminelle

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Auteur / Autrice : Charles Sauleau
Direction : Thierry MartinIsabelle Drouet
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Épistémologie, histoire des sciences et des techniques
Date : Soutenance le 26/11/2020
Etablissement(s) : Bourgogne Franche-Comté
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sociétés, Espaces, Pratiques, Temps (Dijon ; Besançon ; 2017-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Logiques de l'Agir (Besançon)
établissement de soutenance : Université de Franche-Comté (1971-....)
Jury : Président / Présidente : Yves Schuliar
Examinateurs / Examinatrices : Isabelle Drouet, Yves Schuliar, Anouk Barberousse, Erik-André Sauleau
Rapporteurs / Rapporteuses : Anouk Barberousse, Erik-André Sauleau

Mots clés

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Résumé

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Lors de ces trente dernières années, l'approche probabiliste de l'évaluation de la force probantedes indices s'est fortement développée dans la littérature scientifique, promouvant les rapportsde vraisemblance et les réseaux bayésiens. Mise en perspective des hypothèses d'enquête et ducontexte relatif de l'affaire, cette approche permet davantage de respecter certains principes fondamentauxdu procès pénal. Cependant, le contraste paraît entre la faiblesse de son succès et la forcede ses enjeux, bien que l'ensemble des cas criminels s'y prêtent et les avantages soient nombreux.Il s’agit de montrer que la nature même de l'investigation criminelle confère une place auraisonnement probabiliste dans l'évaluation du faisceau d'indices, les réseaux bayésiens offrant dereprésenter sa structure et sa force probante conjointe. Cette pertinence se distille ensuite dans letraitement d'une affaire, pour améliorer la rationalité de l'action, où la force probante agit comme pivotde la coordination criminalistique, et les réseaux bayésiens comme liens. Ce raisonnement sepoursuit dans le processus d'investigation pour optimiser les combinaisons de choix, à l'aide des valeursd'options basées sur les forces probantes. Enfin, pour atteindre des objectifs stratégiques deconcentration des efforts et d'économie des moyens, elle offre une conception alternative du systèmejudiciaire, capable de produire des connaissances reproductibles. L’approche probabiliste ainsidéclinée rationalise l’action en suivant les principes de la stratégie, à travers une construction demodèle apprenant de ses séries plutôt que reproduisant les mêmes erreurs.La problématique pratique consiste ainsi à comprendre les mécanismes de la théorie de ladécision expliquant des décisions judiciaires incohérentes à partir d'indices pourtant correctementévalués et représentés, tant en perspective de gains que de pertes. Le phénomène de l'aversion pourl'incertitude, révélé par l'expérience de Ellsberg (1961), est formalisé dans la prise de décision judiciaire,où les mises en situation expérimentales corroborent la pratique observée en milieu professionnel,confirmant la violation de l'axiomatique du modèle d'utilité espérée. L'explication de cephénomène décisionnel nécessite alors des objets mathématiques spécifiques, telles que lescapacités, la comonotonie et les intégrales de Choquet, et l'étude de propriétés comme lacomonotonie.La reconnaissance du raisonnement probabiliste spécifique aux sciences forensiques permetalors d'esquisser l'architecture logique de l'ensemble des signes de l'investigation criminelle. En effet,les raisonnements incertains la jalonnant participent à un processus plus large, celui de l'interprétationdes signes au cours de celle-ci.Intégrer les notions essentielles de l'investigation telles que l'hypothèse d'enquête, le modeopératoire ou les séquences psychodynamiques dans un ensemble valide de connaissances, supposede les définir et articuler sous un formalisme logique. La sémiotique offre cette architecture à traversl’algèbre des signes, et le formalisme mathématique proposée par Robert Marty dans le treillisde classes de signes et les morphismes de classes.Cette démarche permet de construire une discipline du point de vue épistémologique, et dépasserun empirisme séduisant mais impropre à développer une stratégie. La figure du stratège setrouve alors réhabilitée chez l'enquêteur et le coordinateur criminalistique, dans une penséenécessairement duale et complexe, comme guide de l'action dans l'investigation criminelle.