La production médiatique de l'opposition au barrage de Sivens sur internet : entre reconfigurations info-communicationnelles et repolitisation de l'enjeu local
Auteur / Autrice : | Laurent Thiong-Kay |
Direction : | Franck Bousquet, Nikos Smyrnaios |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences de l'information et de la communication |
Date : | Soutenance le 06/10/2020 |
Etablissement(s) : | Toulouse 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Arts, Lettres, Langues, Philosophie, Communication (Toulouse) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Laboratoire d'études et de recherches appliquées en sciences sociales (Toulouse ; 1983-....) |
Mots clés
Résumé
Cette recherche s'intéresse aux potentialités des pratiques numériques dans la formation et la publicité d'une mobilisation contre un projet de politique publique. Focalisée sur le terrain de la controverse du barrage de Sivens, cette enquête étudie les caractéristiques d'un réseau informel de militants et de journalistes qui ont œuvré ensemble à la médiatisation de l'opposition par le biais des usages informationnels, communicationnels et participatifs des dispositifs socio-techniques d'Internet. Cette arène publique de producteurs médiatiques occupe une centralité dans la construction puis la publicisation des griefs de cette mobilisation. En d'autres termes, cette enquête vise donc à pénétrer l'opacité qui règne souvent, sur Internet, entre le registre de la communication militante et celui de l'information journalistique "engagée". Fondamentalement, elle interroge les mutations de la sphère médiatique. À partir d'une méthodologie croisant la technique des entretiens semi-directifs avec différentes méthodes d'analyse qualitative des productions, cette thèse revient sur la dynamique de la controverse au fondement de l'arène étudiée. Elle se penche ensuite plus finement sur les reconfigurations médiatiques observées, témoignant de l'ambiguïté des tentatives d'autonomisation des nouveaux mouvements sociaux vis-à-vis du champ journalistique et du potentiel des technologies numériques dans l'organisation de l'action collective. Mais la naissance d'un mouvement de protestation caractérisé par l'originalité du répertoire d'action de la zone à défendre (ZAD) suscite l'intérêt des médias alternatifs apparaissant dans la continuité de la critique altermondialiste du fonctionnement des entreprises de presse. Partageant une partie des motifs de défiance des militants vis-à-vis du fonctionnement des médias dominants, les journalistes qui œuvrent au sein des pure-players d'information couvrent l'événement, en travaillant la nature des relations qui les lient à leurs sources, aussi bien online qu'offline. Un réseau de nature hybride se stabilise alors de part et d'autre d'Internet, conforté par la richesse des pratiques numériques des acteurs qui autorise le raffinement d'identités militantes et journalistiques se jouant des frontières de la communication et de l'information. Cependant, la structuration d'une telle arène d'acteurs dépend de facteurs sociaux qui influencent en retour la critique politique qu'elle formalise. L'étude permet de comprendre que la construction de l'événement dépend de modalités précises, entre l'action de militants désireux de dépasser les clivages qui les séparent traditionnellement à gauche du spectre politique et celle de journalistes souhaitant affirmer une identité en rupture partielle avec l'injonction de la neutralité/objectivité professionnelle. La fabrique de l'événement débouche ainsi sur une lecture de la controverse contestant la légitimité et la pertinence des logiques d'aménagement du territoire. Elle valorise enfin une critique politique en actes étroitement dépendante des épisodes de la controverse. Notre objet, que nous avons appelé "L'Internet-Sivens" accouche ainsi d'une certaine repolitisation des enjeux de l'échelle locale. Par conséquent, cette recherche utilise l'intérêt des Sciences de l'Information et de la Communication (SIC) pour les pratiques politico-médiatiques en ligne comme le moyen d'analyser la construction des problèmes publics.