Les pronoms clitiques dans les langues ouest-iraniennes : description, cartographie, et implications typologiques
Auteur / Autrice : | Masoud Mohammadirad |
Direction : | Pollet Samvelian |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences du langage |
Date : | Soutenance le 25/09/2020 |
Etablissement(s) : | Paris 3 |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences du langage (Paris ; 2019-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre de recherche sur le monde iranien. Paris |
Jury : | Président / Présidente : Enrique L. Palancar |
Examinateurs / Examinatrices : Pollet Samvelian, Enrique L. Palancar, Anaïd Donabédian, Geoffrey Haig, Sebastian Fedden, Geoffrey Kahn | |
Rapporteur / Rapporteuse : Anaïd Donabédian, Geoffrey Haig |
Résumé
Les clitiques pronominaux constituent l'un des traits saillants d’un grand nombre de langues ouest-iraniennes.Toutefois, s’ils ont fait l’objet d’investigations plus ou moins systématiques dans certaines d’entre elles, ex.les dialectes kurdes centraux et le persan, ils restent très peu étudiés dans la majorité des langues où ils sont attestés, dont des langues en danger. Plus précisément, les recherches précédentes ont très peu abordé l’émergence des proclitiques, le développement du système de marquage personnel, le positionnement des clitiques, l'ordre interne des séquences de clitiques et les combinaisons clitique-affixe dans une perspective comparative. Cette thèse a pour objectif de combler ces lacunes. L’étude du développement de la procliticisation occupe une place importante dans ce travail. Initialement des (en)clitiques de seconde position dans le sens de Wackernagel, une partie de langues ouest-iraniennes ont développées des proclitiques. L’hypothèse défendue dans ce travail est que cette évolution résulte d’un changement du domaine de cliticisation, plus précisément, de l’abandon de la phrase (ou proposition) comme domaine decliticisation. Ce changement entraîne à son tour une ré-analyse des particules apparaissant en début de phrase,hôtes des clitiques de seconde position, et leur intégration dans le paradigme des clitiques. Ayant perdu leur hôte, les clitiques de seconde position changent d’orientation de rattachement et s’incorporent à l’élément qui les suit, devenant ainsi des proclitiques. L'attachement proclitique constitue donc un développement secondaire par rapport au second positionnement d’autrefois des enclitiques (Steel 1977; Wanner 1987). Le système de marquage personnel, quant à lui, indique un développement inverse pour l'indexation des sujets et des objets dans les constructions passées transitives : les premiers, initialement des clitiques pronominaux,se sont grammaticalisés en marqueurs d'accord, illustrant ainsi une tendance universelle en faveur de l'accord sujet (Siewierska 1999 ; Haig 2018a). Les seconds, réalisés comme des désinences (affixes) personnelles flexionnelles sur le verbe, ont fait l’objet d’une « désinflexionnalisation » à des degrés divers (Norde 2009 ;Haig 2018a), s’écartant ainsi d’une tendance universelle typologique associant les affixes flexionnels et la réalisation de l’accord (Siewierska 2004). En ce qui concerne les domaines de rattachement des clitiques, on peut en énumérer trois dans les langues ouest-iraniennes actuelles : la phrase (proposition), le syntagmeverbal (SV) et le verbe. Un sous-groupe de langues avec le SV comme domaine de cliticisation constitue une source riche pour l'étude des endoclitiques: les endoclitiques des langues ouest-iraniennes sont le résultat de l'interaction entre l'exigence d’un placement en seconde position et les facteurs liés à l’accent. Les systèmes clitiques avec le verbe comme domaine de cliticisation sont caractérisés par l’attachement « ditrophique »des clitiques. L'ordre interne de la séquence des clitiques est déterminé par la hiérarchie d’arguments (A > O> R > POS) dans les langues iraniennes : l'argument classé plus haut dans la hiérarchie apparaît en deuxième position dans le cluster. Cette propriété rapproche les langues iraniennes des langues romanes (Gerlach 2002).Enfin, dans certaines combinaisons clitiques-affixes, les clitiques interrompent les mots morphologiques,remettant en question une distinction catégorique entre les clitiques et les affixes d'une part et la notion de ‘wordhood’ d'autre part (Haspelmath 2011).