Thèse soutenue

L'Europe plaisante : le recueil de facéties entre culture écrite et oralité à l'époque moderne (France, Italie, Angleterre, XVIe-XVIIe siècles)

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Auteur / Autrice : François Lavie
Direction : Jean-Marie Le Gall
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire
Date : Soutenance le 28/11/2020
Etablissement(s) : Paris 1
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale d'Histoire de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (Paris ; 1992-....)
Jury : Président / Présidente : Roger Chartier
Examinateurs / Examinatrices : Jean-Marie Le Gall, Gigliola Fragnito, Caroline Callard
Rapporteurs / Rapporteuses : Florence Alazard, Malcolm Walsby

Résumé

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Cette thèse documente les dynamiques de circulation (écrite et orale) et de réception de l’humour dans l’Europe moderne, en ancrant la réflexion dans le champ historiographique de l’histoire du livre et des pratiques de l’écrit. A partir de l’étude d’un corpus de recueils de facéties en français, italien et anglais, il s’agit de dessiner les contours d’une « Europe plaisante » définie par un patrimoine commun d’anecdotes mais surtout par une série d’usages partagés de ce matériau imprimé et manuscrit : la lecture proprement dite, qu’elle soit purement récréative, à visée pédagogique ou associée à des préoccupations médicales et diététiques (purgation de la mélancolie), l’acquisition de l’éloquence écrite et orale, l’apprentissage des langues étrangères et des bonnes manières, l’entretien des sociabilités amicales et savantes. Plusieurs éléments ont ainsi contribué à l’émergence d’une culture européenne de l’humour à partir du XVIe siècle : la mobilité accrue du livre avec les progrès de l’imprimerie à caractères mobiles, l’essor des langues vernaculaires et de leur apprentissage, les dynamiques de traduction d’une langue à l’autre, l’émergence d’une littérature de civilité européenne, l’assimilation de pratiques pédagogiques héritées de l’humanisme et facilitant l’accès aux textes sous la forme de compilations, de florilèges et autres compendia. Toutefois, la thèse insiste aussi sur des facteurs limitants qui ont profondément modifié les conditions matérielles et culturelles de circulation et de réception des recueils de facéties aux XVIe et XVIIe siècles. A l’âge des Réformes protestante et catholique, la facétie assume de nouvelles fonctions polémiques dans le cadre de la controverse religieuse, si bien que l’hypothèse d’une confessionnalisation de l’humour mérite d’être examinée. Les autorités civiles et ecclésiastiques, inquiètes de l’essor de l’édition en langue vernaculaire, mettent en œuvre des politiques de contrôle de l’imprimé et de censure qui affectent la production et la diffusion de ce matériau imprimé : le recueil de facéties n’est pas épargné, notamment en Italie où il fait l’objet de toutes les attentions du Saint-Office dès le milieu du XVIe siècle. Les divisions religieuses et la censure du livre, en plus des reconfigurations du marché international du livre, ont ainsi contribué à la fermeture des espaces nationaux et à l’éclatement de « l’Europe plaisante » constituée à la Renaissance.