Thèse soutenue

Louis Lafitte : un peintre d'histoire de la Révolution à la Restauration

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Auteur / Autrice : Véronique Mathis
Direction : Michel Biard
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Histoire
Date : Soutenance le 17/09/2020
Etablissement(s) : Normandie
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Normandie Humanités (Mont-Saint-Aignan, Seine-Maritime)
Partenaire(s) de recherche : Equipe de recherche : Groupe de recherche d'histoire (Mont-Saint-Aignan, Seine-Maritime ; 2004-....)
Etablissement de préparation de la thèse : Université de Rouen Normandie (1966-....)
Laboratoire : Groupe de Recherche d'Histoire / GRHis
Jury : Président / Présidente : Hervé Leuwers
Examinateurs / Examinatrices : Michel Biard, Hervé Leuwers, Aurélien Lignereux, Alain Chevalier, Pascal Dupuy, Anne de Mathan
Rapporteurs / Rapporteuses : Hervé Leuwers, Aurélien Lignereux

Résumé

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Louis Lafitte (1770-1828) a tenu toute sa vie à se présenter, avec fierté, comme peintre d’histoire, ce que sa formation artistique justifie pleinement. Après un apprentissage chez le graveur Gilles-Antoine Demarteau, il entre dans l’atelier de Jean-Baptiste Regnault, concurrent et rival de celui de Jacques Louis David dans les années 1780. Présenté par ce maître, il est inscrit à l’Académie royale de peinture, sculpture et architecture en 1784 ; son cursus y est honorable : première médaille au quartier d’octobre 1788, et surtout grand prix de peinture, lors de sa première participation au concours en 1791. Ce parcours d’excellence lui vaut une place à l’Académie de France à Rome, mais il ne peut guère profiter de ce privilège, la situation politique de la France ne trouvant pas grâce aux yeux du gouvernement romain. La population supporte de plus en plus mal la présence française et en janvier 1793, c’est l’explosion ; le Palais Mancini siège de l’Académie est incendié, les pensionnaires dispersés. Tous rentrent plus ou moins rapidement en France ; certains comme Lafitte iront se réfugier à Florence jusqu’à la rupture de la neutralité de la Toscane en octobre 1793. De retour en France, commence une période paradoxale : pensionnaire de la République sur le papier jusqu’en septembre 1800, il en perçoit les modestes indemnités, compte peut-être sur un nouveau séjour romain qui ne viendra pas, mais ne parvient pas à « faire la peinture » à laquelle il aspire, faute d’obtenir un atelier, malgré des demandes répétées. Il n’entre pas non plus dans le cénacle des artistes sollicités régulièrement par les gouvernements successifs, mais il donne parfois de timides signes d’assentiment au régime en place, de l’an II jusqu’à l’Empire où il bénéficie alors de commandes officielles plus importantes, comme le simulacre de l’Arc de triomphe de l’Etoile pour le mariage de Napoléon et Marie-Louise. Son ralliement enthousiaste à la Restauration montre sans doute le vrai visage de Lafitte quant à ses affinités politiques. Il en résulte une place très officielle de dessinateur du Cabinet du Roi, qui conclut avec panache une carrière dont le parcours est souvent difficile à reconstituer. La plus grande partie de sa vie, il n’est pas dans la lumière, car faute de clients publics, il s’est tourné très vite vers une clientèle privée, que son titre de peintre d’histoire, inlassablement mis en avant, n’a pas manqué d’attirer et que ses réels talents de dessinateur ont fixé. On lui demande surtout des travaux en rapport avec les goûts du temps, décors intérieurs pompéiens, ou portraits, tous objets qui malheureusement n’ont que très exceptionnellement laissé des traces. Son crayon sûr et incisif travaille pour les graveurs d’estampes, avec des morceaux célèbres comme les figures du calendrier républicain, ainsi que pour les éditeurs de belles éditions illustrées, dont les lecteurs de l’époque sont friands. On pense notamment à la luxueuse édition Didot de Paul et Virginie, orchestré de bout en bout par Bernardin de Saint Pierre lui-même. Il s’est taillé dans ce dernier domaine une réputation telle, qu’il est resté comme un illustrateur de livres pour une part non négligeable d’auteurs du XIXe siècle. Il n’a pas manqué non plus d’être intéressé par les arts appliqués et de fournir des dessins aussi bien pour de l’orfèvrerie que pour des papiers peints ; des objets de luxe, produits en petit nombre certes, mais industriellement quand même, qui montre un artiste ne dédaignant pas les demandes d’une société de consommation exigeante. Comme on le voit, il ne fait pas œuvre de peintre d’histoire ; mais ce parcours très diversifié, faisant feu de tout bois, montre une adaptation originale à la situation nouvelle que rencontrent les artistes dans une période particulièrement troublée. Elle permit à Louis Lafitte, peintre d’histoire, sinon d’atteindre la gloire, au moins de vivre correctement de son art.