Quand les travailleurs sociaux accompagnent les demandeurs d'asile en centres d'accueil : du cadre prescrit aux régulations et stratégies professionnelles

When social workers accompany asylum seekers in reception centers : from the prescribed framwork to professional regulations and strategies

• Auteur / Autrice : Sophie Mathieu
• Direction : Emmanuel Jovelin
• Type : Thèse de doctorat
• Discipline(s) : Sociologie
• Date : Soutenance le 10/12/2020
• Etablissement(s) : Université de Lorraine
• Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Humanités Nouvelles - Fernand Braudel (Nancy ; 2013-....)
• Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Laboratoire lorrain de sciences sociales (Metz ; 19..-2023)
• Jury : Président / Présidente : Lionel Jacquot
• Jury : Examinateurs / Examinatrices : Emmanuel Jovelin, Maryse Bresson, Catherine Wihtol de Wenden, Gilles Frigoli, Annamaria Campanini
• Jury : Rapporteur / Rapporteuse : Maryse Bresson, Catherine Wihtol de Wenden

Mots clés

Mots clés contrôlés

Centres d'accueil pour demandeurs d'asile

Réfugiés politiques

Travailleurs sociaux

Mots clés libres

Demandeurs d'asile

Travailleurs sociaux

Organisation

Régulations

Autonomie

Interactions

Stratégies

Asylum seekers

Social workers

Organization

Regulations

Autonomy

Interactions

Strategies

Résumé

La demande d’asile est aujourd’hui une préoccupation centrale dans les politiques publiques en matière d’immigration en France. Sa gestion oscille entre une politique de soupçon, une volonté de contrôle des flux migratoires et de lutte contre l’immigration clandestine d’une part, et un principe humanitaire et de compassion, encadré par des accords internationaux d’autre part. Partant de cette double réalité, cette thèse s’applique à comprendre les modalités d’accueil et d’accompagnement des demandeurs d’asile par des travailleurs sociaux, et dans un contexte où l’action sociale entre dans le jeu de la concurrence et dans l’obligation de générer du profit. À la fois agent de l’État et acteur du social, ces professionnels doivent combiner des objectifs souvent éloignés, et parfois contradictoires. À l’aide d’un travail empirique basé sur des observations et entretiens dans trois centres d’accueil, je montrerai en quoi la sociologie des organisations et l’interactionnisme symbolique peuvent permettre de souligner les logiques d’action de ces travailleurs sociaux. Les modalités de définition de leur travail se dessinent au gré des interactions avec le public accompagné, mais aussi avec la direction et entre les travailleurs sociaux eux-mêmes. Par leurs stratégies, leurs bricolages, leurs ajustements, leurs contournements et leurs négociations, ces professionnels adaptent leur travail à la diversité des situations rencontrées et à une pluralité de rationalités. Ils participent ainsi à donner sens et consistance à leur activité, de façon ponctuelle parfois, mais aussi en mettant en place des formes de régulations autonomes, complétant par là même le cadre prescrit et agissant par conséquent sur l’organisation. Plus largement, en s’appropriant les normes institutionnelles de la demande d’asile, ils parviennent à en influer les bornes, et à jouer sur les catégorisations qui la composent.

The asylum application is today a central concern in the public immigration policies in France. Its management oscillates between on the one hand a policy of suspicion, a desire to control migratory flows and a struggle against illegal immigration, and on the other hand a humanitarian and compassionate principle, framed by international agreements. Starting from this double reality, this thesis applies to the understanding of the methods of reception and the support of the asylum seekers by social workers, and in a context where social action comes into the game of competition and in the obligation to generate benefit. As both state agent and social actor, these professionals have to combine objectives that are often distant, and sometimes contradictory. With the help of empirical work based on observations and interviews in three reception centers, I will show how the sociology of organizations and symbolic interactionism can help to highlight the logics of action of these social workers. The ways in which their work is defined take shape through interactions with the supported public, but also with management and among social workers themselves. Through their strategies, their tinkering, their adjustments, their workarounds and their negotiations, these professionals adapt their work to the diversity of situations encountered and to a plurality of rationalities. They thus participate in giving meaning and consistency to their activity, sometimes on an ad hoc basis, but also by setting up forms of autonomous regulations, thereby supplementing even the prescribed framework and consequently acting on the organization. More broadly, by appropriating the institutional norms of asylum application, they manage to influence its boundaries, and play on the categorizations that make it up.