Thèse soutenue

La leptospirose aux Seychelles : investigation d'une maladie zoonotique en environnement insulaire tropical par des approches géographique, moléculaire et épidémiologique
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Auteur / Autrice : Leon Biscornet
Direction : Pablo Tortosa
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Sciences du vivant
Date : Soutenance le 18/09/2020
Etablissement(s) : La Réunion
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences, Technologies et Santé (Saint-Denis, La Réunion)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Processus infectieux en milieu insulaire tropical (Saint-Denis, Réunion)
Jury : Président / Présidente : Catherine Cêtre-Sossah
Examinateurs / Examinatrices : Patrick Mavingui, Gauthier Dobigny
Rapporteurs / Rapporteuses : Mitermayer Reis, Carine Brouat

Résumé

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La leptospirose est une maladie négligée émergente touchant plus particulièrement les régions tropicales, et plus encore les îles tropicales telles que les Seychelles, qui enregistrent des incidences humaines parmi les plus élevées au monde. Cette thèse a pour objectifs d’explorer l’éco épidémiologie de la leptospirose aux Seychelles (i) en utilisant les rats comme marqueurs d’exposition environnementale, (ii) en décrivant l’épidémiologie moléculaire de la maladie chez l’homme et l’animal à travers une approche “One Health”, et enfin (iii) en identifiant les comportements et professions à risque tout en en comparant la situation actuelle à celle décrite il y a 25 ans. La combinaison d’approches géographique, moléculaire et clinique vise à dresser un tableau complet de la situation épidémiologique de cette maladie aux Seychelles en intégrant les réservoirs animaux, l’homme et l’environnement qu’ils occupent.La fragmentation de l’habitat et la proximité de ressources alimentaires apparaissent comme de bons prédicteurs d’infection chez les rats. Les analyses géo-spatiales permettent de mettre en évidence d’autres variables corrélées négativement (altitude ou distance à un point d’eau douce) ou positivement (niveau d’urbanisation, pluviométrie) au statut d’infection chez les rats. Ces résultats pourraient être pris en compte dans les politiques d’aménagement du territoire mises en place dans des buts de conservation des habitats ou de contrôle des rongeurs, afin de réduire l’exposition de l’homme à des pathogènes maintenus dans l’environnement par les rats. Si le niveau d’urbanisation est positivement corrélé avec le statut d’infection, ce patron pourrait au moins en partie résulter de la distribution des deux espèces Rattus norvegicus et Rattus rattus. En effet la première espèce, retrouvée essentiellement en milieu urbain, est nettement plus infectée que la deuxième que l’on retrouve partout sur l’île. Néanmoins, la comparaison des leptospires retrouvés chez les rats et chez les cas humains graves indique que les rats ne sont impliqués que dans un tiers des transmissions à l’homme, la majorité des cas humains étant causée par des leptospires dont le(s) réservoir(s) reste(nt) à identifier. Une incidence annuelle de 54,6 (95% IC 40,7-71,8) pour 100 000 habitants confirme l’importance médicale majeure de cette maladie dans le pays. La maladie touche très majoritairement les hommes (96%) et présente un taux de mortalité élevé (11,2%), essentiellement associé à des formes sévères (dysfonctions rénales et hépatiques, hémorragie pulmonaire). Les activités agricoles et le jardinage, la proximité d’élevages et de chats, une thrombocytopénie, une leucocytose, un taux de bilirubine élevé et des valeurs élevées aux tests de fonction rénale sont de bons prédicteurs de leptospirose. La distribution géographique des cas humains ne correspond pas à celle des districts hébergeant des populations de rats aux prévalences d’infection élevées, en cohérence avec un rôle restreint des rats dans la leptospirose humaine.La comparaison des données présentées ici avec celles publiées il y a 25 ans révèle un changement dans les comportements et les expositions, et montre qu’une meilleure prise en charge hospitalière a vraisemblablement contribué à faire diminuer la mortalité liée à la leptospirose, même si celle-ci reste élevée. Un faible niveau de connaissance de la maladie en population générale souligne l’importance de mettre en place des campagnes de sensibilisation. Les données produites dans le cadre de cette thèse stimulent la mise en place d’études complémentaires visant à mettre en évidence le(s) réservoir(s) complémentaire(s) et adapter les mesures de prévention pour limiter le fardeau que représente cette maladie aux Seychelles, aujourd’hui encore reconnue comme la maladie infectieuse causant le plus de décès dans le pays.