Exploration expérimentale lagrangienne de la turbulence dans un fluide quantique en rotation
Auteur / Autrice : | Emeric Durozoy |
Direction : | Mathieu Gibert |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Physique de la matière condensée et du rayonnement |
Date : | Soutenance le 05/11/2020 |
Etablissement(s) : | Université Grenoble Alpes |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale physique (Grenoble, Isère, France ; 1991-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut Néel (Grenoble, Isère, France ; 2007-....) |
Jury : | Président / Présidente : Nicolas Mordant |
Examinateurs / Examinatrices : Giorgio Krstulovic, Gregory Paul Bewley, Pierre-Philippe Cortet | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Joachim Peinke, Francesca Chilla |
Mots clés
Mots clés libres
Résumé
Dans cette thèse, nous décrivons un nouvel appareil cryogénique (appelé CryoLEM) utilisé pour étudier les écoulements d'hélium II (ou superfluide) en rotation par la visualisation de particules solides de deutérium. L'hélium II en rotation est un écoulement canonique qui produit un réseau de vortex quantiques organisé et régulier.Le CryoLEM est un dispositif expérimental dont la mise en œuvre a été achevée au cours de cette thèse. Ainsi, les protocoles de démarrage et d'utilisation ont été établis, et les premiers tests en conditions réelles ont été réalisés. Ces tests ont permis de caractériser les performances du cryostat et de mieux comprendre la formation des particules solides de deutérium. Bien que l'objectif à long terme soit d'effectuer des mesures 3D du mouvement des particules, nous sommes restés concentrés sur la réalisation de mesures 2D dans un plan contenant l'axe de rotation. Pour effectuer le suivi lagrangien des particules, un algorithme a été entièrement écrit sur la base des techniques existantes.Ce cryostat a d'abord été utilisé pour étudier les régimes transitoires qui se produisent pendant les injections de particules, et après le début (ou l'arrêt) de la rotation du dispositif. L’objectif est d'estimer les temps caractéristiques de ces régimes, et de les comparer au temps d'Ekman, et à une constante de temps empirique obtenue par Tsakadze & Tsakadze en utilisant une sphère remplie d’hélium II. Après une injection de particules, un temps proportionnel à la vitesse de rotation du cryostat doit s'écouler pour retrouver un état stationnaire. Les résultats de notre étude de la mise en rotation sont en très bon accord avec un temps d'Ekman basé sur le quantum de circulation. Pour l’arrêt de la rotation, un accord qualitatif avec le modèle de Tsakadze est trouvé. Cela nous a ensuite permis de travailler avec des données stationnaires.Pendant la rotation stationnaire de l'hélium II, on observe un mouvement oscillant des particules d'une amplitude de l'ordre du millimètre. Nous ne sommes en mesure de relier l'amplitude de ces oscillations à aucun des paramètres physiques que nous avons mesurés. Néanmoins, ces oscillations ne sont pas observées dans l'hélium I (liquide normal), ce qui montre la nature fondamentalement différente de ces deux fluides, et motive des études plus approfondies.Enfin, un écoulement turbulent d'hélium II causé par une turbine contrarotative dans le CryoLEM en rotation a été étudié. Nous avons caractérisé cet écoulement relativement simple, et compris l’évolution de ses paramètres physiques grâce à un bilan énergétique entre les mécanismes d'injection et de dissipation. Nous avons défini une série de substituts pour estimer le taux de dissipation d'énergie dans cet écoulement anisotrope et turbulent. Ceux-ci utilisent des quantités statistiques du premier au troisième ordre basées sur des incréments de vitesse. Toutes ces mesures conduisent à une évolution cohérente du taux de dissipation d’énergie radial comme le cube de la vitesse de rotation du système, mais avec différents préfacteurs. Les statistiques du troisième ordre nous ont amenés à conclure que l'énergie était transportée de la grande à la petite échelle, tandis que l'anisotropie augmente avec la vitesse angulaire, comme prévu par le théorème de Taylor-Proudman.Cette thèse se termine en soulignant que certaines des particules évoluant dans cet écoulement présentent des oscillations d'une amplitude inférieure à leur taille. Cela pourrait être compatible avec une interaction particule - vortex quantique liée à la force de Magnus. Cette observation ouvre une nouvelle voie pour l'étude de la dynamique des tourbillons quantiques.