Exception, law and political unity : the state and its enemy in the Middle-East, from the late Ottoman empire to the rise of the Islamic State
Exception, normativité et unité politique : l’Etat et son ennemi au Moyen-Orient,entre le démembrement l'empire ottoman et l'apparition de l’Etat islamique
Résumé
The reflection of this thesis work questions the idea of 'legitimacy', in the light of the civil war, and revolves around the relationship between order and law and the theoretical and practical crisis of normativity within the state and constitutional system of the Middle East.This thesis therefore lies at the indeterminate and uncertain boundaries of the logic of the law and its organising function, as it oscillates between the methodological field of order and the experimental field of observation of exception and indeterminacy. . Indeed, the study of a post-State context - or pre-State - requires the mobilization of theories and concepts originating from the territory of the exception, this makes it inevitable to be at the crossroads of several disciplines and several academic fields.The territorial rupture in Iraq and Syria and the spatial availability for the rebellion impose a visibility and historicity of the state of nature reflected in this civil and cross-border war. In the face of these events, the legal présupposées of the finalised character of the State and the legal continuity of the constitutional order come out deeply shaken, which reminds, especially from doctrinal perspective, of both conceptions of the order, that of the ‘normal and legal time’ attributed to Hans Kelsen and that of the ‘exceptional moment” attributed to Carl Schmitt.Thus our thesis text is divided into three parts:The first is the legal status of the State based on the international standard of interstate recognition. This allowed us to describe the fragility of the spatial order when various conceptions of legality and norm are opposed. With Hans Kelsen, in whom an internal and external conception of the pure norm and the nomological function of law is emerging, we wanted to highlight the profound contradictions of the concrete order in the rising with the theoretical hypotheses and abstract conception of the constitutional State.In our second part, which is about 'metaphysical and spatial rupture', we have resorted to the thought of Carl Schmitt, for whom legitimacy is not limited to legality nor the State to the constitution. The modern Middle East offers a concrete illustration of Schmittian concepts. Firstly by the contradiction between this interstate order with that of the Jus publicum europaeum, a product of the European spatial and physical order. Then because of the totalitarian rupture during which the State is reduced to the Party and politics to religiosity and uniqueness. The fate of the post-totalitarian State, such as that of Iraq and Syria, also invokes Arendt's work on totalitarianism and Gauchet's work on the metaphysics of unity and political expression of the religious phenomenon. In fact, the Potestas indirecta, a Hobbesian and Schmittian notion, could explain on the occasion of this crisis of unity and religion the logics of continuity and rupture that are discussed by these three authors. In the light of this theoretical association, we define the Exception as the crisis of the Decision and not as the appeal for recovery requesting the Decision.Our third part deals with the Katechon, the theological-political principle of continuity and conservation. We first define the conceptual value of this concept at Hobbes and Schmitt thoughts, and then extend it to the Hegelian condition of civil society and the current aspirations of Arab societies about political change. This part returns first to the crisis of legality, rather than legitimacy, that characterizes the Islamist political project (especially moderate Islamism). Then it evokes political nominalism and the dialectical relationship it defines between ideas and action on the one hand and the project of change on the other.
A la lumière de la guerre civile en Irak et en Syrie, la réflexion de ce travail de thèse s’interroge sur la question de "légitimité" et tourne autour le rapport entre l’ordre et le droit et la crise théorique et pratique de la normativité au sein du système étatique et constitutionnel des Etats du Moyen-Orient. Cette thèse se situe donc aux frontières indéterminées et incertaines de la logique du droit et de sa fonction organisatrice, car elle oscille entre le champ méthodologique de l’ordre et le champ expérimental de l’observation de l’exception et de l’indétermination. En effet, l’étude d’un contexte post-étatique -ou pré-étatique- nécessite la mobilisation de théories et de concepts issus du territoire de l’exception, ceci rend inévitable de se trouver au carrefour de plusieurs disciplines et de plusieurs domaines académiques.La rupture territoriale en Irak et en Syrie et la disponibilité spatiale pour la rébellion imposent une visibilité et une historicité de l’état de nature que traduit cette guerre civile et transfrontalière. Devant ces événements, les présupposées juridiques du caractère finalisé de l’Etat et de la continuité de l’ordre constitutionnel en sortent profondément ébranlées, ce qui rappelle, surtout sur le plan méthodologique et doctrinaire, les deux conceptions de l’ordre, celle du temps normal attribué à Hans Kelsen et celle du temps d’exception attribuée à Carl Schmitt.Ainsi notre texte de thèse se divise-t-il en trois parties :La première porte sur le statut juridique de l’Etat à partir de la norme internationale de la reconnaissance interétatique. Ceci nous a permis de décrire la fragilité de l’ordre spatial lorsque s’opposent diverses conceptions de la légalité et de la norme. Avec Hans Kelsen, chez qui se dessine une conception interne et externe de la norme pure et de la fonction nomologique du droit, nous avons voulu mettre en lumières les contradictions profondes de l’ordre concret au levant avec les présupposées théoriques et abstraites de l’Etat constitutionnel.Dans notre deuxième partie, où il s’agit de ‘rupture métaphysique et spatiale’, nous avons fait recours à la pensée de Carl Schmitt, chez qui la légitimité ne se réduit pas à la légalité ni l’Etat à la constitution. Le Moyen-Orient moderne offre une illustration concrète des concepts schmittiens. D’abord par la contradiction des données de cet ordre interétatique avec celui du Jus publicum europaeum, produit de l’ordre spatial et physique européen, puis en raison de la rupture totalitaire durant laquelle l’Etat se réduit au Parti et le politique à la religiosité et à l’unicité. Le destin de l’Etat post-totalitaire, tel celui de l’Irak et de la Syrie, invoque également les travaux d’Arendt sur le totalitarisme et ceux de Gauchet sur la métaphysique de l’unité et l’expression politique du phénomène religieux. En fait, la Potestas indirecta, notion hobbesienne et schmittienne, pourrait expliquer à l’occasion de cette crise de l’unité les logiques de continuité et de rupture dont il est question chez ces trois auteurs. A la lumière de cette association théorique, nous définissons l’Exception comme la crise de la Décision et non comme l’appel de recouvrement sollicitant la Décision.Notre troisième partie porte sur le Katechon, le principe théologico-politique de la continuité et de la conservation. Nous définissons d’abord la valeur conceptuelle de cette notion chez Hobbes et chez Schmitt, puis nous la prolongeons à la condition hégélienne de la société civile et aux aspirations actuelles des sociétés arabes au sujet du changement politique. Cette partie revient d’abord sur la crise de légalité, plutôt que de légitimité, qui caractérise le projet politique islamiste (surtout l’islamisme modéré). Puis elle évoque le nominalisme politique et le rapport dialectique qu’il définit entre idées et action d’une part et projet de changement de l’autre.
Origine : Version validée par le jury (STAR)