Thèse soutenue

Benjamin Constant et le problème de l'arbitraire : un décisionnisme modéré

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Auteur / Autrice : Felipe Freller
Direction : Frédéric BrahamiEunice Ostrensky
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Etudes politiques (option Philosophie politique)
Date : Soutenance le 27/11/2020
Etablissement(s) : Paris, EHESS en cotutelle avec Universidade de São Paulo (Brésil)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales
Jury : Président / Présidente : Eunice Ostrensky
Examinateurs / Examinatrices : Frédéric Brahami, Eunice Ostrensky, Newton Bignotto de Souza, Christian Edward Cyril Lynch, Pierre Manent
Rapporteurs / Rapporteuses : Newton Bignotto de Souza, Christian Edward Cyril Lynch

Résumé

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Cette thèse a pour objet le « problème de l’arbitraire » chez Benjamin Constant. Bien que l’auteur critique impitoyablement les gouvernements arbitraires, nous cherchons à aborder l’arbitraire comme un véritable problème politique auquel il a dû faire face, et non pas comme un simple mal qu’il rejette selon une morale normative. Nous soutenons que Constant n’écarte pas définitivement la décision arbitraire du domaine de la politique légitime, mais qu’il cherche plutôt à incorporer l’arbitraire au système politique d’une manière contrôlée, afin d’éviter sa dérive tyrannique – une attitude pour laquelle nous proposons la désignation de « décisionnisme modéré ». Nous attribuons la primauté méthodologique à l’interaction dynamique de l’auteur avec la réalité politique de son temps, considérant cette interaction comme productrice des problèmes qu’il cherche à élaborer au niveau théorique. Ainsi, au Chapitre 1, nous tâchons de comprendre comment le problème de l’arbitraire émerge dans la pensée de Constant sous le Premier Directoire (1795-1797), dans un dialogue critique avec des auteurs que nous proposons d’interpréter selon la catégorie du « libéralisme de l’ordre » – notamment Pierre-Louis Roederer et Adrien de Lezay-Marnésia. Bien que la première réponse de Constant au problème de l’arbitraire soit son rejet inconditionnel, nous avançons, au Chapitre 2, que ce rejet subit une réévaluation après le coup d’État du 18 fructidor an V, aboutissant à la formulation de l’idée du pouvoir neutre comme une « autorité discrétionnaire ». Au Chapitre 3, nous examinons la nouvelle configuration du problème de l’arbitraire qu’engendre le « tournant libéral » des Principes de politique de 1806, en cherchant à montrer qu’en même temps que l’arbitraire y est condamné sur de nouvelles bases, la décision arbitraire y est désormais disséminée à l’intérieur de l’édifice constitutionnel, sous la forme de domaines divers dans lesquels la loi peut être contournée voire transgressée, afin d’éviter la tyrannie de la loi excessive. Au Chapitre 4, nous abordons la place de l’arbitraire dans la monarchie constitutionnelle théorisée par Constant à partir de 1814, en analysant les nouvelles nuances de la version monarchique du pouvoir neutre et l’interprétation de la responsabilité des ministres comme un jugement inéluctablement arbitraire. La conclusion vise à discerner dans l’œuvre de Constant un paradigme de la décision alternatif à ceux déjà établis dans la théorie politique.