Traiter la "différence" : le tri des patient.es par les personnels hospitaliers en France et au Québec
Auteur / Autrice : | Camille Foubert |
Direction : | Alexis Spire |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences de la société |
Date : | Soutenance le 15/06/2020 |
Etablissement(s) : | Paris, EHESS |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale de l'École des hautes études en sciences sociales |
Jury : | Président / Présidente : Bénédicte Zimmermann |
Examinateurs / Examinatrices : Bénédicte Zimmermann, Laurence Kotobi, Anne Paillet, Fabien Desage, Sylvie Fainzang | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Laurence Kotobi, Anne Paillet |
Mots clés
Résumé
Le milieu hospitalier est le lieu d’un apparent paradoxe où les professionnel•les affirment qu’on « soigne tout le monde pareil », mais que « chaque patient•e est différent•e ». L’adaptation et la modulation des discours et des pratiques de soins y sont à la fois revendiquées comme un impératif à la réalisation du travail (para)médical et niées comme productrices de différenciations. À partir de ce constat empirique, je me suis intéressée aux usages sociaux par les professionnel•les de santé des caractéristiques sociales de leurs patient•es. Ce travail consiste en une comparaison située basée sur une enquête de terrain par observations et par entretiens. Celle-ci a été menée pendant environ un an au sein de plusieurs services de maladies chroniques du métabolisme (obésité, diabète, médecine interne) dans trois centres hospitalo-universitaires, situés pour deux d’entre eux à Paris et en région parisienne et pour le dernier à Montréal. Il ne s’agit pas de traiter de manière symétrique les « deux côtés ». Le choix d’une observation microsociologique a été au contraire délibérément effectué dans le but de dénaturaliser le cadre « national » et d’en questionner la prééminence. Malgré l’existence de certaines différences (présence différentielle de la religion majoritaire, bilinguisme français-anglais très répandu au Québec…), la prise en compte et les pratiques autour des besoins ou demandes des patient•es y sont largement similaires. L’analyse de la prise en compte des caractéristiques sociales des patient•es par les professionnel•les semble dans les deux contextes répondre d’abord aux mêmes enjeux : celui d’organiser et de permettre le travail dans un contexte où celui-ci est relationnel et sur l’humain. Au croisement de plusieurs champs (la sociologie du travail, la sociologie de l’État et la sociologie des rapports sociaux et des inégalités) et à partir d’une analyse au niveau de la relation et les interactions entre professionnel•les de santé et patient•es à l’hôpital public, cette thèse explore la chaîne ou la somme des petites décisions, réalisées de façon routinière et permanente, par les professionnel•les hospitalier•es, de classement, de priorisation ou de négligence. Celles-ci constituent le phénomène du tri des patient•es à l’hôpital. Elles sont prises dans la tension permanente entre personnalisation du soin et différenciation sociale des traitements. Elles fondent également la production localisée de la « différence », de classe, de race et de sexe, dans la configuration étudiée qu’est la prise en charge à l’hôpital public.