Thèse soutenue

Modèles levure de maladies associées au gène mitochondrial ATP6 : bases moléculaires et perspectives thérapeutiques

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Auteur / Autrice : Xin Su
Direction : Déborah Tribouillard-Tanvier
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Biologie Cellulaire et Physiopathologie
Date : Soutenance le 26/11/2020
Etablissement(s) : Bordeaux
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sciences de la vie et de la santé (Talence, Gironde ; 1993-....)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Institut de biochimie et génétique cellulaires (Bordeaux)
Jury : Président / Présidente : Jean-Pierre Mazat
Examinateurs / Examinatrices : Déborah Tribouillard-Tanvier, Jean-Pierre Mazat, Vincent Procaccio, Véronique Paquis-Flucklinger, Philippe Diolez
Rapporteurs / Rapporteuses : Vincent Procaccio, Véronique Paquis-Flucklinger

Résumé

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Par définition, les maladies mitochondriales résultent d’un défaut dans le processus des oxydations phosphorylantes (OXPHOS). Celui-ci permet aux cellules de se fournir en ATP, soit la principale source d’énergie qu’elles peuvent utiliser. Dans ce processus, quatre complexes (I-IV) insérés dans la membrane mitochondriale interne transfèrent à l’oxygène moléculaire les équivalents réducteurs libérés par l’oxydation de carbohydrates et d’acides gras. Cette activité génère une force proton motrice utilisée pour la synthèse d’ATP à partir d’ADP et de phosphate inorganique par le complexe V ou ATP synthase.Des maladies dont NARP (Neuropathy Ataxia Retinitis Pigmentosa) et MILS (Maternally Inherited Leigh Syndrome) ont été associées à des mutations de la sous-unité a de l’ATP synthase. Son gène (ATP6) est dans le génome mitochondrial. Celui-ci est présent jusqu’à plusieurs milliers de copies par cellule. Les mutations du gène ATP6 coexistent souvent avec des copies sauvages du génome mitochondrial dans les cellules et tissus des patients, ce qui rend leur étude difficile. La levure Saccharomyces cerevisiae dont on peut modifier à loisir le génome mitochondrial permet de s’affranchir de cette hétérogénéité génétique (appelée hétéroplasmie). De plus, grâce à sa bonne capacité fermentaire, elle est capable de survivre à l’inactivation du système OXPHOS.J’ai au cours de ma thèse exploité ces caractéristiques pour mieux définir les conséquences sur l’ATP synthase de cinq mutations du gène ATP6 identifiées chez des patients : m.8993T>G, m.9191T>C, m.8969G>A, m.8909T>C, et m.9166T>C. Le pouvoir pathogène des trois premières a été établi. Les deux dernières sont des nouveaux variants de l’ADN mitochondrial. Via l’identification de suppresseurs intragéniques, et à la lumière de structures à haute résolution de l’ATP synthase décrites récemment, j’ai pu définir les bases moléculaires des mécanismes pathogènes induits par les mutations m.8993T>G, m.9191T>C, et m.8969G>A. Le variant m.8909T>C a été identifié en combinaison avec une mutation pathogène bien connue dans un ARN de transfert (m.3243A>G). Nous avons trouvé qu’un équivalent de cette nouvelle mutation a en levure des effets délétères sur l’assemblage ou la stabilité de la sous-unité a comparables à ceux induits par des mutations du gène ATP6 (m.8993T>C, m.9176T>C) dont le pouvoir pathogène a été établi, et qu’elle a donc potentiellement la capacité d’affecter seule la santé humaine. Mes études en levure sont cohérentes avec des études ayant conclu récemment à la pathogénicité du variant m.9166T>C et permettent de mieux comprendre comment il impacte l’ATP synthase.J’ai identifié un mécanisme de suppression actif sur des modèles levure de mutations pathogènes de la sous-unité a. Il implique le transporteur des oxodicarboxylates (Odc1) localisé dans la membrane mitochondriale interne. J’ai trouvé que la surexpression d’Odc1 permet une plus grande activité du cycle de Krebs (ou TCA). Ce cycle intervient dans l’oxydation de substrats organiques dont les équivalents réducteurs sont ensuite transférés à l’oxygène par la chaîne respiratoire. Il tourne à bas régime dans les mutants de l’ATP synthase dont l’activité canal à protons est altérée. La suppression-Odc1 dépendante entraîne un découplage partiel de la membrane interne, de sorte que le cycle TCA est stimulé malgré le défaut en ATP synthase. Cet effet permet une plus grande production d’ATP via la phosphorylation d’ADP couplée directement à une des réactions du cycle de Krebs. Ces résultats ouvrent des perspectives intéressantes pour le traitement des maladies associées à des altérations de l’ATP synthase, et possiblement d’autres désordres métaboliques. Cette étude apporte de plus un éclairage nouveau sur le contrôle de la biogenèse du complexe IV par l’ATP synthase.