Thèse soutenue

Le développement de l’intimidation par les pairs entre 6 et 17 ans : trajectoires, antécédents et conséquences en étude longitudinale populationnelle
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Auteur / Autrice : Sinziana Oncioiu
Direction : Sylvana CôtéMassimiliano Orri
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Santé publique Epidémiologie
Date : Soutenance le 24/11/2020
Etablissement(s) : Bordeaux
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Sociétés, politique, santé publique (Bordeaux)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Bordeaux population Health
Jury : Président / Présidente : Christophe Tzourio
Examinateurs / Examinatrices : Sylvana Côté, Christophe Tzourio, Lucy Bowes, Mario Speranza, Maria Melchior, Alexandra Rouquette
Rapporteurs / Rapporteuses : Lucy Bowes, Mario Speranza

Résumé

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Autrefois considérée comme un rite de passage pour les enfants d’âge scolaire, la victimisation par les pairs est aujourd’hui reconnue comme un véritable enjeu de santé publique. Ceci s’explique par les conséquences engendrées sur la santé mentale des jeunes ainsi que par sa prévalence élevée, en effet, 1 élève sur 3 déclare avoir été harcelé au cours de sa scolarité. La victimisation se définit par des harcèlements répétés par les pairs sur un enfant cible, ces harcèlements pouvant prendre la forme de violence verbale, physique ou psychologique. Environ 5 à 15% des jeunes sont exposés, de façon chronique, à la victimisation par les pairs et présentent un risque accru de manifester des troubles mentaux comme la dépression, l’anxiété ou les comportements suicidaires. À ce jour, les programmes de prévention du harcèlement scolaire sont largement centrés sur le milieu scolaire, et montrent des effets significatifs, mais modestes sur la réduction de la victimisation par les pairs. Cependant, ces programmes n’abordent pas les vulnérabilités préexistantes au niveau individuel ou familial qui pourraient être associées au risque d’être la cible du harcèlement scolaire. L’effet de ces vulnérabilités sur l’évolution de la victimisation serait encore plus important pendant la petite enfance, une période charnière pour l’apprentissage du vivre ensemble. Pourtant, l’évolution de la victimisation en milieu scolaire, y compris les effets de ses variations au cours du temps sur la santé mentale, n’ont pas été beaucoup étudiés. Cela limite notre compréhension sur les fenêtres temporelles les plus favorables pour mettre en place des interventions visant à réduire l’exposition à la victimisation par les pairs et ses conséquences sur la santé mentale. Les objectifs de ce projet de thèse étaient d’examiner : (1) le développement de la victimisation par les pairs de 6 à 17 ans, et ses associations avec (2) des facteurs individuels et socio-environnementaux à la petite enfance et (3) les comorbidités entre les troubles de santé mentale à l’âge adulte. Ces travaux de thèse ont été réalisés avec les données de l’Étude longitudinale du développement des enfants du Québec, un échantillon de 2120 enfants québécois qui ont été suivis annuellement ou bisannuellement de la naissance jusqu'à l’âge de 20 ans. Nous avons identifié quatre groupes d’élèves qui ont vécu des expériences différentes de victimisation par les pairs de 6 à 17 ans : (1) 33% des élèves ont été peu/pas du tout harcelés (2) 26% des élèves ont été harcelés seulement pendant l’école élémentaire, (3) 30% ont été harcelés surtout au collège et au lycée, (4) 11% des élèves ont vécu une victimisation chronique depuis leur entrée à l’école primaire jusqu’à la fin du lycée. Nous avons montré que les troubles externalisés de l’enfant avant l’âge de 6 ans et les vulnérabilités familiales (c.-à-d., avoir un père avec des antécédents de comportement antisocial ou vivre dans une famille séparée) sont associés aux trajectoires développementales de la victimisation par les pairs. Nous avons aussi trouvé que l’âge d’entrée et l’intensité de la fréquentation de services de gardes préscolaires, identifiés par certains auteurs comme facteur de risque pour les problèmes de comportements, ne sont pas associés au risque de victimisation par les pairs. En outre, nos résultats montrent que tous les jeunes qui ont vécu de la victimisation, même vécue seulement à l’école primaire, présentaient des comorbidités pour les troubles de santé mentale à 20 ans. Cependant, la sévérité de la victimisation par les pairs était associée à la sévérité de troubles mentaux. Dans leurs ensembles, ces résultats suggèrent qu’interrompre le cycle de la victimisation chronique pourrait prévenir les problèmes les plus sévères et complexes de santé mentale à l’âge adulte. Pour cela, il serait nécessaire de mettre en place des interventions pour offrir un support aux enfants vulnérables et leurs familles tôt dans l’enfance.