Le choix de la cocaïne, une question de délai
Auteur / Autrice : | Ludivine Canchy |
Direction : | Serge Ahmed |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Neurosciences |
Date : | Soutenance le 22/09/2020 |
Etablissement(s) : | Bordeaux |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences de la vie et de la santé (Talence, Gironde ; 1993-....) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Institut des Maladies Neurodégénératives |
Jury : | Président / Présidente : Marcello Solinas |
Examinateurs / Examinatrices : Serge Ahmed, Marcello Solinas, Sébastien Carnicella, Fuschia Serre | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Sébastien Carnicella |
Mots clés
Résumé
L'addiction à la cocaïne est un trouble comportemental qui touche plusieurs millions de personnes en Europe. L'étude des mécanismes neurobiologiques de ce trouble repose beau-coup sur l'utilisation de modèles animaux, généralement des rats ou des souris. Dans la situation expérimentale standard, ces animaux ont accès à la cocaïne sans autre choix possible. Dans ces conditions assez artificielles, il est difficile de savoir si leur consommation de cocaïne est in-fluencée par un état d'addiction ou plutôt par l'absence d'autres récompenses disponibles. En fait, quand on offre à des rats une autre récompense pendant l'accès à la cocaïne (e.g., de l'eau sucrée pendant quelques secondes), la vaste majorité d'entre eux s'abstient pour l'option alter-native. Ce résultat semble difficile à réconcilier avec les prédictions associées à l’hypothèse dopaminergique de l’addiction. Selon cette hypothèse, la libération supranormale de dopamine (aussi bien en intensité qu’en durée) provoquée par la cocaïne lui confère un pouvoir récom-pensant largement supérieur à celui d'autres récompenses (y compris l'eau sucrée), et devrait se traduire par un choix quasi-exclusif pour la drogue. Ce paradoxe apparent peut être résolu si l’on prend aussi en compte les délais imposés par la pharmacocinétique de la cocaïne. En effet, une fois administrée, même par une voie rapide comme la voie intraveineuse, il faut un certain temps à la cocaïne pour atteindre le circuit dopaminergique de la récompense dans le cerveau, ce qui impose un certain délai à la survenue des effets récompensants de la drogue. Selon notre hypothèse, si ce délai d'action était suffisamment long, il pourrait réduire la valeur de la cocaïne au moment du choix en-dessous de celle de la récompense alternative, moins récompensante mais plus immédiate. Ce travail de thèse avait pour but général de tester cette hypothèse. Nos résultats confirment que les effets de la cocaïne ne surviennent qu’après un délai de plusieurs dizaines de secondes. Par ailleurs, lorsque l’influence de ce long délai était neutralisée au mo-ment du choix, les animaux inversaient leur préférence en faveur de la cocaïne, confirmant que la cocaïne génère bien une quantité de récompense supérieure à l’option alternative. Ce travail nous révèle également d’importantes lacunes dans notre compréhension du délai-drogue et de son impact sur le choix. Afin d’y remédier, des études complémentaires, aussi bien théoriques qu’expérimentales, devront être envisagées à l’avenir.