Métamorphoses de l'État productiviste. Le management public du fordisme au néolibéralisme, saisi à partir de ses savoirs de gouvernement
Auteur / Autrice : | Brice Nocenti |
Direction : | Anne Kupiec |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sociologie, démographie. Sociologie |
Date : | Soutenance le 05/04/2019 |
Etablissement(s) : | Sorbonne Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Economies, espaces, sociétés, civilisations : pensée critique, politique et pratiques sociales (Paris ; 2000-2019) |
Partenaire(s) de recherche : | établissement de préparation : Université Paris Diderot - Paris 7 (1970-2019) |
Laboratoire : Laboratoire de changement social et politique (Paris ; 2014-...) | |
Jury : | Président / Présidente : Marie-Anne Dujarier |
Examinateurs / Examinatrices : Anne Kupiec, Marie-Anne Dujarier, Lionel Jacquot, Daniel Bachet, Frédéric Pierru | |
Rapporteur / Rapporteuse : Lionel Jacquot, Daniel Bachet |
Résumé
À la fin des années 1910, Max Weber écrivait : « Avant tout, dans la vie quotidienne, la domination est administration. » S'il revenait un siècle plus tard, il reformulerait : « La domination est gestion. » Comment comprendre, du point de vue d'une histoire des bureaucraties publiques et privées, l'invasion actuelle des services publics par des techniques managériales ? Cette thèse de sociologie historique du management public a pour objet l'émergence dans l'entreprise et la diffusion dans l'État de plusieurs dispositifs de gestion en France de 1945 à nos jours. Plutôt que de se contenter paresseusement de l'attribuer au « néolibéralisme », il s'agit de replacer les transformations à l'œuvre dans l'histoire longue du salariat public et des transformations du capitalisme. Instrument central de la première révolution managériale, la direction par objectifs a donné naissance à un nouveau mode d'organisation de l'entreprise : un gouvernement individualisé des cadres par les chiffres, orienté vers l'augmentation indéfinie de la productivité des ouvriers et employées. Les hauts fonctionnaires de l'État planificateur fordiste ont tenté sans succès de transposer dans les ministères cette forme de bureaucratie managériale : pas au nom du « marché », mais du contrôle du travail des petits fonctionnaires, de la croissance du PIB et de la puissance de l'État français. Dans le contexte tout autre des années 1990-2000 et du capitalisme financiarisé, la LOLF et la RGPP ont finalement institué ce gouvernement des services publics par objectifs, au service d'une fin nouvelle : la réduction des dépenses de l'État. Le système hospitalier, la collecte des impôts, les préfectures ou Pôle emploi ont été réorganisés sur le modèle de la grande entreprise fordiste intégrée des années 1970. Certains hauts fonctionnaires cherchent aujourd'hui à radicaliser ce projet en imposant une nouvelle forme d'organisation, plus opposée encore à un service public démocratique : la bureaucratie néolibérale de l'entreprise issue de la seconde révolution managériale des années 1980-1990, dont l'un des éléments centraux est le gouvernement des producteurs directs par une concurrence salariale formalisée, au moyen d'une gestion des ressources humaines vouée à « banaliser » le statut des fonctionnaires