Le patois des autres : rapport langue-territoire et subjectivation politique en milieu rural
Auteur / Autrice : | Félix Danos |
Direction : | Cécile Canut |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sciences du langage |
Date : | Soutenance le 05/12/2019 |
Etablissement(s) : | Université Paris Cité |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences humaines et sociales : cultures, individus, sociétés (Paris ; 1994-2019) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Centre de recherches sur les liens sociaux (Paris ; 2002-....) - Centre de recherche sur les liens sociaux |
Jury : | Président / Présidente : Philippe Hambye |
Examinateurs / Examinatrices : Philippe Hambye, Sylvie Wharton, Gilles Siouffi, Josiane Boutet, Monica Heller | |
Rapporteur / Rapporteuse : Sylvie Wharton, Gilles Siouffi |
Mots clés
Résumé
Appréhendant les discours réflexifs scientifiques et ''non scientifiques'' sur le langage en tant que pratiques langagières, cette thèse propose de questionner les rapports entre langue et territoire en France à travers l'articulation entre discours ''profanes'' et discours légitimes étatiques et scientifiques. Les discours officiels et légitimes sur les langues régionales en France effacent régulièrement les distinctions strictement sociolinguistiques en présupposant une correspondance entre ensembles linguistiques et ensembles territoriaux (hypothèse géolinguistique). En revanche, ces distinctions apparaissent bien plus régulièrement dans les discours d'habitants sur ce qu'ils appellent ''le patois'', au sein desquels elles sont articulées aux catégories territoriales et impliquent, souvent implicitement, un ordonnancement du territoire en termes de centre et de périphérie, ordonnancement répondant à celui des ensembles linguistiques hiérarchisés entre français (non marqué et central) et patois (marqué(s) et périphérique(s)). À l'aide d'un cadre théorique issu de l'anthropologie sémiotique nord-américaine, de la sociolinguistique critique, de la sociolinguistique interactionnelle, et de la géographie, ce travail propose l'analyse de données hétérogènes provenant d'un travail ethnographique de deux ans dans un village de la Montagne bourbonnaise, au sud-est du département de l'Allier. Dans un premier temps, l'analyse de conversations, de documents historiques datant du XIXe siècle, et de publications associatives contemporaines permettra de rendre compte de l'historicité du processus étatique de production, de naturalisation et de réactualisation de l'hypothèse géolinguistique. Dans un second temps, la focalisation sur un corpus de conversations fera apparaître la mise en rapport entre langue et territoire en tant que pratique de production sémiotique et d'occupation subjective du territoire, territoire par des locuteurs à travers leurs discours réflexifs sur le langage. Proposant d'appréhender le rapport langage-territoire en partant des discours de locuteurs/habitants et sans présupposer qu'une façon de parler correspond à un endroit, cette thèse invite à penser la dimension géographique et historique de toute réflexivité langagière et à reconnaître l'importance des discours sur le langage dans la production et l'occupation de l'espace et du temps. En ce sens, cette thèse met en lumière des processus de subjectivation politique dans les discours traitant du langage, entendue comme la remise en cause de rapports catégoriels présupposés et la production d'agencements inédits.