Effet du couvert végétal et des microorganismes sur l'établissement du sapin en forêt boréale
Auteur / Autrice : | Mélissande Nagati |
Direction : | Monique Gardes, Yves Bergeron, Mélanie Roy, Annie Desrochers |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Ecologie, biodiversité et évolution |
Date : | Soutenance le 27/08/2019 |
Etablissement(s) : | Toulouse 3 en cotutelle avec Université du Québec à Abitibi-Témiscamingue |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences écologiques, vétérinaires, agronomiques et bioingénieries (Toulouse) |
Partenaire(s) de recherche : | Laboratoire : Evolution et Diversité Biologique (Toulouse ; 2003-2023) |
Mots clés
Mots clés contrôlés
Résumé
Au Québec, le 49° de latitude nord représente la frontière entre la forêt mixte dominée par le sapin baumier et le bouleau et la forêt boréale dominée par l’épinette noire. Cette frontière tend à migrer vers le nord avec la migration du sapin. En Abitibi, à cette latitude, le sapin a localement un meilleur établissement sous les couverts de peuplier en comparaison de ceux d’épinette. Les conditions climatiques et édaphiques sont similaires dans les deux peuplements, mais les conditions biotiques diffèrent. Le sous-bois sous épinette est dominé par les mousses et des arbustes éricacés, tandis que le sous-bois sous peuplier a une richesse spécifique plus élevée, particulièrement en arbustes et herbacés. Les communautés végétales sont connues pour affecter les communautés fongiques du sol, notamment mycorhiziennes. Ces dernières pourraient expliquer les différences d’établissement du sapin entre les deux types de peuplement. Les mycorhizes sont des symbioses à bénéfices réciproques entre des champignons et les racines et sont importantes pour la nutrition des plantes en forêt boréale. Nous avons testé 1) si les communautés de champignons sont différentes entre les peuplements de peuplier et d’épinette, 2) si les sapins s’associent avec un plus grand nombre et/ou à des espèces différentes sous les peupliers et 3) si les symbioses mises en place sous les peupliers sont plus efficaces que celles sous les épinettes pour la nutrition du sapin. Le séquençage de l’ADN des champignons du sol a permis de détecter une forte diversité et de mettre en évidence des différences entre les communautés fongiques du peuplier et de l’épinette. Soixante plantules de sapins ont été suivis sur le terrain afin de relier la croissance et le taux de nutriments dans les aiguilles au taux de mycorhization et à la diversité fongique. L’analyse a révélé que le taux de nutriments dans les aiguilles du sapin était supérieur sous les peupliers par rapport au sapin poussant sous les épinettes à proximité d’éricacées. De plus, la présence des plantes éricacées était corrélée à des changements de la communauté mycorhizienne associée aux racines du sapin, ainsi qu’à une diminution du contenu en azote dans les aiguilles. Des expériences ont également été menées en chambre de croissance afin de déterminer si la mycorhization avait un impact sur la germination, la survie, la nutrition et la croissance des plantules. Pour ce faire, des sapins ont été semés dans des sols provenant des différents types de peuplement et la moitié a été stérilisée afin d’éliminer les microorganismes. Les résultats obtenus ont permis de détecter un effet de l’identité des microorganismes plutôt qu’un effet du taux de mycorhization sur la nutrition et la croissance du sapin. Les sapins poussant dans les sols récoltés sous épinette mais à distance des éricacées ont eu une meilleure nutrition azotée que dans les sols prélevés sous peuplier. Un dispositif expérimental intégrant la possibilité de formation de réseaux mycorhiziens fonctionnels entre plantes est à envisager afin de tester l’importance des interactions sur l’établissement du sapin. Les résultats de la thèse nous indiquent que les différences d’abondance et de croissance du sapin sous le peuplier et l’épinette sont la résultante d’interactions complexes, où les communautés mycorhiziennes et végétales jouent un rôle. Les différences de communautés fongiques et de nutriments dans le sol entre les peuplements pourraient expliquer la meilleure nutrition du sapin sous les peupliers. D’autre part, la présence d’une communauté ectomycorrhizienne non compatible et/ou peu favorable aux sapins à proximité des éricacées pourrait expliquer en partie les problèmes de croissance et de nutrition sous les épinettes. Ainsi, la facilitation du sapin par le peuplier est partiellement expliquée par les communautés fongiques. Nos données confirment que les champignons du sol sont à prendre en compte dans les modèles de migration du sapin vers le nord.