La construction sociotechnique des joueurs coproducteurs : Ethnographie des pratiques de modification d’un logiciel de jeu : Kerbal Space Program
Auteur / Autrice : | Wilfried Coussieu |
Direction : | Pierre Musso |
Type : | Thèse de doctorat |
Discipline(s) : | Sociologie |
Date : | Soutenance le 09/07/2019 |
Etablissement(s) : | Université Paris-Saclay (ComUE) |
Ecole(s) doctorale(s) : | École doctorale Sciences de l'Homme et de la Société (Sceaux, Hauts-de-Seine ; 2015-....) |
Partenaire(s) de recherche : | établissement de préparation de la thèse : Télécom Paris (Palaiseau, Essonne ; 1878-....) |
Laboratoire : Institut interdisciplinaire de l'innovation (Paris ; 2012-....) | |
Jury : | Président / Présidente : Cécile Méadel |
Examinateurs / Examinatrices : Antonio A. Casilli | |
Rapporteurs / Rapporteuses : Cécile Méadel, Dominique Boullier |
Mots clés
Résumé
Quel est le sens des pratiques de modification de logiciels de jeux ? Quel est leur rôle et comment s’articulent-elles au travail de conception de ces objets techniques ? Ce travail de thèse interroge la façon dont les pratiques ludiques et techniques de ‘modding’ du jeu commercial Kerbal Space Program découlent de sa conception tout en permettant sa remise en question à travers la figure de l’usager-moddeur. Nous explorons cette problématique en réalisant une ethnographie au croisement de trois approches conceptuelles : les Science and Technology Studies, la théorie de l’Acteur-Réseau et la sociologie pragmatique (Barthe et al., 2013 ; Lemieux, 2018), en les appliquant aux pratiques informatiques et vidéoludiques de notre terrain. Nous mobilisons un corpus de données qualitatives tractées par un travail d’observation participante, un questionnaire et une quinzaine d’entretiens approfondis auprès de moddeurs et développeurs salariés de l’entreprise du jeu. L’enquête aboutit à deux résultats de recherche en mettant à jour un régime d’action particulier : « l’engagement contributif ». Premièrement, l’équipe de développement pense un logiciel qui, au point de départ, doit être aussi ludique à manipuler qu’intéressant à modifier sur le plan technique. L’entreprise applique une stratégie d’innovation fondée sur la stimulation des attentions et des intérêts passionnés, des goûts et des besoins individuels (Boullier, 2009). Ce dispositif met en œuvre un enrôlement des forces critiques et suggestives des joueurs pour les rediriger vers une forme de « production conjointe » (Lallement, 2007). Ainsi, notre ethnographie décrit des pratiques d’usagers construites autour de normes juridiques et techniques permettant la collaboration en ligne, intriquées avec des valeurs d’ouverture, de partage et d’amélioration. Deuxièmement, en questionnant la rationalité de ces pratiques, c’est-à-dire en cherchant la justification (Boltanski, Thévenot, 1991) qui fonde la prétention des acteurs à se solliciter et s’entraider entre eux, de même qu’à se déléguer librement les tâches d’examen, de test et d’intervention sur le logiciel, nous mettons à jour les principes d’une nouvelle forme de travail collectif en réseau, brouillant la frontière entre les dichotomies classiques telles que : utilisateur et concepteur, producteur et consommateur, loisir et travail…