Thèse soutenue

"Alerte à la pilule". Politiques contraceptives et régulation du risque au prisme du genre

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Auteur / Autrice : Mylène Rouzaud-Cornabas
Direction : Nathalie BajosDaniel Bénamouzig
Type : Thèse de doctorat
Discipline(s) : Santé publique - sociologie
Date : Soutenance le 02/12/2019
Etablissement(s) : Université Paris-Saclay (ComUE)
Ecole(s) doctorale(s) : École doctorale Santé Publique (Le Kremlin-Bicêtre, Val-de-Marne ; 2015-...)
Partenaire(s) de recherche : Laboratoire : Centre de recherche en épidémiologie et santé des populations (Villejuif, Val-de-Marne ; 2010-....)
établissement opérateur d'inscription : Université Paris-Sud (1970-2019)
Institution : École des hautes études en santé publique (Rennes ; 2008-...)
Jury : Président / Présidente : Laurent Toulemon
Examinateurs / Examinatrices : Nathalie Bajos, Daniel Bénamouzig, Anne Revillard, Jean-Paul Gaudillière, Boris Hauray
Rapporteurs / Rapporteuses : Anne Revillard, Jean-Paul Gaudillière

Résumé

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En décembre 2012, une controverse sur les risques accrus de thrombose veineuse profonde associés aux pilules contraceptives dites de nouvelles générations éclate en France. Cette controverse conduit à l’expression d’une critique à l’égard de la pilule en France, érigée jusqu’alors comme symbole de l’émancipation féminine. Près d’une femme sur cinq abandonne la pilule au profit d’autres méthodes, déstabilisant le modèle contraceptif français centré sur la promotion de ce contraceptif. Malgré son intensité, la controverse est tardive. Dès 1995, les risques associés avaient été identifiés dans de nombreux pays européens, dont le Royaume-Uni.Cette thèse cherche à comprendre le confinement des risques pendant près de vingt années en France. Elle s’appuie sur une enquête par entretiens semi-directifs (n=74) conduits auprès d’acteur·rice·s français·es et européen·ne·s de la contraception, complétée par une analyse des archives du Ministère de la Santé et par une revue de la littérature scientifique et institutionnelle. L’analyse de la controverse britannique de 1995 apporte un éclairage sur les spécificités de la situation française.L’analyse de cette controverse permet de retracer les politiques contraceptives françaises des années 1980 à nos jours. Cette histoire met en évidence la structuration d’un espace de la contraception construit autour d’un schéma hormonal et genré d’appréhension des corps reproducteurs. Il fait apparaître le rôle central des laboratoires pharmaceutiques et l’influence importante de la gynécologie médicale en France. Ces éléments permettent de mieux comprendre la minimisation des risques associés aux contraceptifs hormonaux en France.Outre les stratégies de dissimulation du risque, la trajectoire de cette controverse témoigne aussi d’une division sexuelle du risque, notamment en matière de régulation du médicament. De nombreux travaux ont documenté les effets de la (bio)médicalisation de la contraception sur sa féminisation. Rares sont ceux qui proposent une analyse de la régulation du médicament en général et des contraceptifs en particulier dans une perspective de genre. Les logiques scientifiques, institutionnelles et politiques de définition, mesure et traitement du risque médicamenteux se sont pourtant construites autour d’une appréhension genrée des corps féminin et masculin. La controverse de 2012-2013 met en lumière une distinction et un partage inégal du risque contraceptif entre les sexes, une asymétrie qui repose sur l’essentialisation du travail contraceptif et reproductif.